• On était des loups

    "On était des loups" de Sandrine Collette - JC Lattès

    Présentation de l'éditeur :

    Ce soir-là, quand Liam rentre des forêts montagneuses où il est parti chasser, il devine aussitôt qu’il s’est passé quelque chose. Son petit garçon de cinq ans, Aru, ne l’attend pas devant la maison. Dans la cour, il découvre les empreintes d’un ours. À côté, sous le corps inerte de sa femme, il trouve son fils. Vivant. Au milieu de son existence qui s’effondre, Liam a une certitude. Ce monde sauvage n’est pas fait pour un enfant. Décidé à confier son fils à d’autres que lui, il prépare un long voyage au rythme du pas des chevaux. Mais dans ces profondeurs, nul ne sait ce qui peut advenir. Encore moins un homme fou de rage et de douleur accompagné d’un enfant terrifié.

    Première page :

    C'est la nuit je regarde l'enfant qui dort. Un tout petit enfant, il ne sait rien du monde, il ne sait rien faire. Un enfant ce n'est pas fait pour la vie, cette vie-là je veux dire qui est immense et brutale devant lui devant nous.

    La vie qui.

    L'enfant a des cheveux blonds presque blancs, les mêmes que sa mère, ébouriffés par le sommeil. S'il avait les yeux ouverts, ces yeux d'un éclat bleuté transparent, je penserais encore une fois à mon père son grand- père qui avait lui aussi ce regard-là avec ce ciel à l'intérieur, une ondulation comme les grands lacs de montagne. Mais l'enfant dort et ses paupières sont baissées.

    l a des petits yeux et je me dis vraiment tout est petit en lui. ça grandira, bien sûr. Pour l'instant le bleu de ses yeux ressemble à une tache de myrtille sauvage, celles qui couvrent les sous-bois au début de l'été et que je rapporte à Ava pour qu'elle les mette en bocaux.

    Ce que j'en pense :

    C’est à mon avis le meilleur roman de l’autrice. On retrouve ses thèmes favoris autour de la nature sauvage, profonde et belle mais parfois assez terrible. On y découvre également que l’homme peut avoir de multiples facettes : le chasseur, le père, le monstre, l’ogre…comme dans les contes. L’écriture est magnifiquement adaptée au sujet en nous faisant pénétrer dans les pensées du père. Un coup de cœur qui m’a fait penser parfois à du Mingarelli.

    On était des loups

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Le corps noir

    "Le corps noir" de Dominique Manotti - Points Seuil

    Présentation de l'éditeur :

    Entre le débarquement des Alliés et la libération de Paris, deux mois et demi s'écoulent. La SS allemande - le «corps noir» - et la Gestapo française règnent encore. Dans leur sillage, industriels, banquiers et artistes s'enrichissent et mènent une vie de plaisir. Mais les plus perspicaces sentent le vent tourner...Ce roman peint ceux qui perdent, ceux qui s'en sortent, et ceux qui se retrouvent toujours, quoi qu'il arrive, dans le camp des vainqueurs.

    Première page :

    L'album de photos est là, sur la table, recouvert d'un cuir rouge sombre, moelleux au toucher, un peu éraflé, les charnières fatiguées, les coins usés. Sur la couverture, trois noms gravés en lettres dorées : François, Jeanne, Isabelle. Il faut l'ouvrir précautionneusement, tant il a été feuilleté. Pages de papier épais, rigide, gris foncé, qu'on tourne une à une et sur lesquelles ont été collées de petites photos rectangulaires, brillantes, à bords blancs crantés. Certaines ont jauni plus que d'autres, et parfois le brillant s'écaille. Une belle écriture ferme, à la plume, mentionne ici ou là un nom, un lieu, une date. Encre noire, passée, sur fond gris, peu lisible avec le temps.

    Beaucoup de photos d'enfants à tous les âges, dans des berceaux, à la plage, malades, jouant aux cartes sous les arbres, dans des bateaux, en train de lire ou de dormir dans des fauteuils. Autour d'eux, la mère, les grands-parents, attentifs, émus, fiers, toujours complices. Parfois, très rarement, le père, silhouette mince, élégante et sportive. Chronique d'une famille heureuse.

    Quatre photos, côte à côte, sur l'une des dernières pages.

    Mars, paysage de haute montagne. Soleil éclatant sur un grand champ de neige en pente très douce,

    Ce que j'en pense :

     J'ai lu et apprécié plusieurs livres de Dominique Manotti. Ils sont toujours très bien documentés dans des domaines très différents (la finance, la police...). Mais je n'ai pas pu aller au delà de la page 50 dans ce roman car le style d'écriture m'a lassé : des phrases très courtes, hachées, des énumérations un peu sèches... Dommage

    Le corps noir

     

     

    __________


    votre commentaire
  • La maison nue

    "la maison nue" de Marion Fayolle - magnani

    Présentation de l'éditeur :

    Trois personnages, ayant tendance à se faire souffrir et à saboter leur vie, décident de cohabiter dans une maison?: ­– ­Un homme qui ne s’intéresse qu’aux filles susceptibles de lui faire du mal. – Une femme cavalière qui dit aimer seulement les chevaux les plus dangereux. – Un homme qui cherche à écrire mais qui n’est jamais satisfait et détruit ce qu’il invente. Entre eux, une amitié se noue et leur maison devient l’abri qui les protège de la folie du monde extérieur. Avec La Maison nue, Marion Fayolle met en pages trois existences marginales, qui, malgré leurs profondes différences, cherchent ensemble à mieux se connaître et se comprendre à travers les jeux et les rapports quotidiens de leur colocation. La Maison nue nous questionne sur les douleurs qu’on s’inflige à soi-même, sur la beauté de la mélancolie, l’attrait pour les gouffres et la peur d’être seul.

    Extrait :

    La maison nueLa maison nue

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Ce que j'en pense :

     J'aime beaucoup l'univers graphique de Marion Fayolle, c'est original et très poétique. Elle a une façon bien particulière de déconstruire (de mettre à nu) et de reconstruire (avec des morceaux) ses personnages. On peut penser à du théâtre, de la danse ou à une comédie musicale. C'est un livre à découvrir, comme les autres livres de l'autrice.

    La maison nue

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Le grand soir

    "Le grand soir" de Gwenaël Bulteau - La manufacture des livres

    Présentation de l'éditeur :

    22 janvier 1905. Paris se presse à la suite du cortège funéraire de Louise Michel, icône légendaire de la Commune. Parmi les ouvriers, la jeune Jeanne Desroselles, travestie en femme du peuple, se mêle à la foule. Idéaliste et militante, cette jeune héritière fréquente depuis quelques mois les rassemblements publics, vibrant des revendications de ceux qui luttent pour la justice et la liberté. Mais ce matin d’hiver sera pour Jeanne le dernier. Aux yeux de la police comme de sa famille, Jeanne s’est volatilisée. Sa cousine Lucie n’entend pas se satisfaire de cette conclusion, et elle se glisse de tavernes en ruelles pour retrouver la trace de la disparue. Pendant ce temps, aux quatre coins de la France, les manifestations se multiplient, les femmes se rassemblent pour faire entendre leur droit à la parole et à disposer de leur corps, les mineurs et les ouvriers réclament un travail qui ne les condamne pas à mort... Tous s’apprêtent à venir massivement à Paris, manifester ensemble le 1er mai. Ce sera le Grand Soir.

    Première page :

    Paris, Levallois-Perret, 22 janvier 1905

    La dépouille arriva gare de Lyon, par le tram en provenance de Marseille. Des hommes en costume noir portaient le modeste cercueil, quatre planches sous un linceul rouge, car la défunte n'aurait jamais voulu autre chose.

    Avec la mort de Louise Michel, une époque se terminait. La Louve avait succombé à une pneumonie et des milliers de personnes lui rendaient hommage ce jour-là, sous une neige fine et collante, en suivant son corbillard jusqu'au cimetière de Levallois-Perret. Beaucoup d'ateliers et de petit syndicats s'étalent cotisés. La préfecture avait interdit les drapeaux révolutionnaires, alors, pour contourner le problème, les gens du peuple avalent orné leurs couronnes de petits rubans rouges en souvenir de la Commune. Tout le monde se rappelait que Louise Michel avait voulu se rendre à Versailles pour tuer Thiers de ses propres mains.

    Ce que j'en pense :

     C'est plutôt un roman social qu'un roman noir même s'il y a beaucoup de noir. La période est admirablement reconstituée; on y rencontre des personnages historiques et on retrouve aussi des évènements marquants de cette époque. Évidemment il y a une bonne part de fiction mais tous les personnages sont bien ancrés dans le réel.

    Le grand soir

     

    __________


    votre commentaire
  • Un sacré gueuleton

    "Un sacré gueuleton" de Jim Harrison - J'ai lu

    Présentation de l'éditeur :

    Tous les lecteurs de Jim Harrison connaissent son appétit vorace pour la bonne chère, les meilleurs vins et autres plaisirs bien terrestres qui irriguent son oeuvre. Rassemblés pour la première fois en un seul volume, ces articles publiés au fil de sa carrière ne se contentent pas de célébrer les plaisirs de la table. Savoureux et féroce, Big Jim parle de gastronomie avec la même verve que lorsqu'il évoque la littérature, la politique ou l'amour. En chemin, il déroule des recettes toujours réjouissantes, parfois inattendues, et fait preuve d'un humour dévastateur à l'égard des pisse-vinaigres de tout poil. Autoportrait en creux du célèbre gourmand vagabond, ce livre est un véritable festin littéraire qui comblera tous les appétits.

    Première page :

    Tambouille mentale

    Cher Mike

    Mon désespoir et ma confusion actuels font que ma chronique gastronomique pour le prochain numéro se résumera à ce qui suit. Ne nous voilons pas la face, voilà un moment que les spectres jumeaux de la bouffe et de la politique monopolisent notre attention. Lors d'un récent voyage en Amérique centrale destiné à satisfaire ma curiosité pour les mille et une facettes des révolutions dans ces pays, j'ai franchement mangé comme un dieu. En un seul déjeuner, par exemple, j'ai savouré du calmar mijoté dans son encre, des toasts de caille braisée, une soupe entièrement constituée de minuscules crustacés, plus une brochette de plusieurs langoustes, le tout accompagné de deux bouteilles de vin.

    Ce que j'en pense :

    C’est un livre un peu brouillon qui est constitué à la fois de récits de voyages, de chroniques culinaires, d’hymnes aux vins (français en particulier), de poésies, de politiques, de littérature… Il y a de merveilleux passages qu’on a continuellement envie de surligner. Il y a aussi beaucoup de plats et de vins qu’on a envie de découvrir…Mais il y a aussi quelques répétitions qui peuvent lasser dans la dernière partie du livre.

    Un sacré gueuleton

     

    __________


    votre commentaire
  • Le récit des gouffres

    "Le récit des gouffres" de Thomas Vinau - Le Castor Astral

    Présentation de l'éditeur :

    Thomas Vinau explore ici les abîmes de l’enfance et de la solitude.
    Dans ce récit hanté par les fantômes et les ombres mystérieuses, l’imagination et la littérature sont les seules échappatoires.

    L’enfant grandit dans l’ombre de son père, le gouffre devient alors un refuge à la fois effrayant et rassurant. Il s’évade dans son jardin secret où la nature reprend ses droits. Il navigue à travers les contes et la poésie d’Emily Dickinson.   

    Cependant, l’enfant va devoir abandonner l’ombre d’Emily et laisser derrière lui ce monde imaginaire qu’il a construit depuis l’enfance pour accomplir une quête initiatique.

    Thomas Vinau signe une ode à la nature lumineuse et intime ! Un hommage à l’oeuvre d’Emily Dickinson et aux contes traditionnels.

    Première page :

    Un jour, la cendre et le brouillard ont fait l'amour. Et tu es né. Bien sûr, la cendre n'était que de la cendre. Et le brouillard n'était que du brouillard. Mais crois-moi, ils ont fait l'amour, ils ont vraiment fait l'amour, et tu es vraiment né. Ne laisse personne te laisser croire autre chose. Et que le monde aujourd'hui ne soit plus le monde ne change rien. Ils ont fabriqué de la lumière avec ce qu'ils avaient. L'obscurité. Et tu es né.

    On sait à présent que la vie a commencé par des dents. Parce qu'elle doit mâcher, défendre, arracher. Parce qu'elle doit déchirer le néant. Percer la poche, la coquille, la terre, la pierre. Térébrer. Toujours. Même les oiseaux, avant d'être des oiseaux, avaient des dents. Même le jour a dû creuser la nuit. Et puis nous avons gagné. Nous avons mâché le monde. Et puis nous avons perdu. Nous nous sommes fait mâcher à notre tour. Par quelque chose d'autre.

    Mais la vie survit toujours. Elle survit aux éruptions, aux cataclysmes, aux épidémies, aux météores. À l'atroce appétit des hommes. Elle survit aux dieux. Et les bactéries recommencent à s'agiter. Et les lézards ressortent. Et les larves fendent à nouveau l'humus. Et les rayons recommencent à percer. La vie survit même à la vie. C'est idiot la vie mais c'est comme ça. Elle persiste. Pour la bonne raison qu'il faut quelqu'un pour raconter l'histoire.

    Avant il y avait le printemps. C'était merveilleux. La spirale effrontée des astres. Une danse de sang et de sève. Une irruption, un jaillissement. C'était une force de lumière. La grande dévoration. Toute la terre avait faim. Tous les sexes s'ouvraient. Et la vie reprenait. Plus puissante. Plus colorée. Plus impitoyable que jamais. Avant il y avait le printemps. Maintenant il n'y a plus rien. C'est à toi d'être le printemps.

    Ce que j'en pense :

     L'auteur a le don de nous emmener dans des pays improbables qui ne sont sans doute pas si éloigné de notre réel. Qu'est devenu le monde? Comment sortir du gouffre? Que nous reste-t-il de notre histoire (de l'histoire)?... Autant de questions (et bien d'autres) que nous nous posons à la lecture. Ce livre échappe à toute classification puisqu'il mêle récit, poésie, conte, mythe...

    Le récit des gouffres

     

    __________


    votre commentaire
  • Cher connard

    "Cher connard" de Virginie Despentes - Grasset

    Présentation de l'éditeur :

    «  Cher connard,
    J’ai lu ce que tu as publié sur ton compte Insta. Tu es comme un pigeon qui m’aurait chié sur l’épaule en passant. C’est salissant, et très désagréable. Ouin ouin ouin je suis une petite baltringue qui n’intéresse personne et je couine comme un chihuahua parce que je rêve qu’on me remarque. Gloire aux réseaux sociaux  : tu l’as eu, ton quart d’heure de gloire. La preuve  : je t’écris.  »
    Après le triomphe de sa trilogie Vernon Subutex, le grand retour de Virginie Despentes avec ces Liaisons dangereuses ultra-contemporaines.
    Roman de rage et de consolation, de colère et d’acceptation, où l’amitié se révèle plus forte que les faiblesses humaines…

    Première page :

    OSCAR

    Chroniques du désastre

    Croisé Rebecca Latté, dans Paris. Sont remontés à ma mémoire les personnages extraordinaires qu’elle a interprétés, femme tour à tour dangereuse, vénéneuse, vulnérable, touchante ou héroïque – combien de fois je suis tombé amoureux d’elle, combien de photos d’elle, dans combien d’appartements, au-dessus de combien de lits – j’ai pu accrocher et qui m’ont fait rêver. Métaphore tragique d’une époque qui se barre en couille – cette femme sublime qui initia tant d’adolescents à ce que fut la fascination de la séduction féminine à son apogée – devenue aujourd’hui ce crapaud. Pas seulement vieille. Mais épaisse, négligée, la peau dégueulasse, et son personnage de femme sale, bruyante. La débandade. On m’a appris qu’elle s’était convertie en égérie pour jeunes féministes. L’internationale des pouilleuses a encore frappé. Niveau de surprise : zéro. Je me roule en PLS sur mon sofa et je réécoute Hypnotize de Biggie, en boucle.

    Ce que j'en pense :

    Je suis quand même allé jusqu’à la page 122 ! Je me suis bien fait avoir par le battage médiatique « parisien » autour de ce livre. Et pourtant je suis très méfiant mais je ne sais pas ce qui m’a pris, le titre sans doute… mais j’ai vite déchanté. Cette soit disant correspondance n’a rien d’épistolaire mais ressemble à des monologues assez ennuyeux sauf au tout début. De temps en temps il y a une belle phrase, un beau coup de gueule, mais pour moi ça ne suffit pas.

    Cher connard

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Plus bas dans la vallée

    "Plus bas dans la vallée" de Ron Rash - Gallimard

    Présentation de l'éditeur :

    Un an après son départ pour le Brésil, Serena, personnage emblématique de l’œuvre de Ron Rash, revient dans les Great Smoky Mountains. Selon le contrat qui la lie à la compagnie de Brandonkamp, tous les arbres de la dernière parcelle qu’elle possède aux États-Unis doivent être abattus avant la fin de juillet. Il ne reste que trois jours. La pluie incessante qui fait de ce flanc de montagne un véritable bourbier, les serpents impitoyables, l’épuisement des bûcherons en sous-effectif rendent la tâche presque impossible. La « Lady Macbeth des Appalaches » sera-t-elle à la hauteur de sa sinistre réputation ?
    Autour de ce diamant noir, six nouvelles âpres mais traversées d’éclairs d’un humour parfois grinçant disent la vie rude et privée d’horizon des enfants oubliés de l’Amérique que sont les habitants de cette contrée.

    Première page :

    Quand Serena Pemberton descendit de l'hydravion Com• modore, en juillet 1931, un modeste mais fervent contingent de reporters et de photographes l'attendait. À l'exception du pilote, elle était seule. Ceux qui l'accompagneraient au camp forestier, à la fois bêtes et gens, étaient arrivés par bateau la veille au soir. Ils avaient déjà pris place à bord du train qui les emmènerait de Miami en Caroline du Nord. Tous sauf Galloway, son exécuteur des basses besognes, qui s'était procuré une automobile pour conduire sa patronne à la gare. Tandis qu'on mettait en place l'échelle métallique mobile, il vint se poster à côté de la marche du bas. C'était un homme de petite taille, au corps maigre et nerveux, aux vêtements miteux; un moignon violacé dépassait de l'une de ses manches. Alors que les flashs des appareils photo crépitaient à quelques centimètres à peine de son visage, il ne cillait pas.

    Au moment où Serena entamait la descente, la première question qu'on lui cria porta sur les rumeurs entourant la mort de son mari. Il sembla, l'espace d'un instant, qu'elle n’y répondrait pas…

    Ce que j'en pense :

    Le texte qui donne son nom au livre est trop long pour être une nouvelle et trop court pour être vraiment un roman. L’univers de Ron Rash a besoin de temps et d’espace pour s’épanouir et donner sa pleine mesure comme dans « Une terre d’ombre ». Les autres nouvelles sont bien réussies mais dans des genres très différents. Dans certaines on retrouve l’humour noir souvent piquant de l’auteur.

    Plus bas dans la vallée

     

    __________


    votre commentaire
  • Au temps des galoches

    "Au temps des galoches" de Christian Butaud - La Geste

    Présentation de l'éditeur :

    Septembre 1943 : en pleine tourmente de l’Occupation allemande, un petit garçon de onze ans retrouve toute sa famille dans un coin de campagne française. Dans ce contexte dramatique, la figure du père devient primordiale et l’éducation du garçon se fait parmi une galerie de personnages hauts en couleurs. Petit à petit, l’enfance laisse la place à l’adolescence au milieu du cercle des cousins.

    Première page :

    Je ferre. Une onde de plaisir intense me descend du cerveau au talon. Ça mord ! Et pour la première fois de ma jeune vie de pêcheur ce n'est pas une ablette ni un goujon qui s'intéresse à mon hameçon. Tremblant, les doigts crispés sur la gaule, j'essaie de maintenir le fil tendu sans efforts superflus, de peur de casser mon bas de ligne trop fragile pour une prise de choix. Le flotteur trace des arabesques compliquées à fleur d'eau. La bête me semble vivace, lourde, robuste. Qu'est-ce que ça peut être? Une perche, une carpe, peut-être un brochet, le seigneur de la rivière? Non, ne rêvons pas ! Mais c'est du gros, pour sûr c'est du gros ! Comme je l'ai vu faire par mes oncles, je laisse la bête se fatiguer avant d'intensifier lentement mon effort et de la rapprocher de la berge. Je bous d'impatience et de fébrilité. Pourvu que ça tienne ! Bon sang, il faut que ça tienne. A bout de patience je relève lentement la gaule. Le scion prend sa courbure maximum mais, irrésistiblement, le flotteur sort de la rivière. J'aperçois maintenant la nageoire dorsale qui sillonne la surface. Je vais gagner ! Est-ce possible que moi, gamin de onze ans, je réussisse cet exploit. Je ne saurais dire à quelle extrémité de la ligne il y a le plus d'affolement.

    Bien sûr je n'ai pas d'épuisette. Cet engin est tout à fait superflu pour mes prises habituelles de vingt ou trente grammes. Bientôt le poisson est le long de la berge, gesticulant à cinquante centimètres sous mes pieds. C'est une tanche ! …

    Ce que j'en pense :

    C'est un livre que l'on peut qualifier de terroir ou régionaliste sans que ce soit péjoratif. On est entrainé agréablement dans un lieu (un village des Deux Sèvres) et une époque (les années 43/44). C'est constitué d'une succession de petits chapitres où le jeune narrateur de 11/12 ans nous fait découvrir des scènes de la vie quotidienne de ce village avec de l'empathie pour tous les personnages (enfants et adultes) et avec souvent beaucoup d'humour et de finesse.

    Au temps des galoches

     

    __________


    votre commentaire
  • L'abandon des prétentions

    "L'abandon des prétentions" de Blandine Rinkel - Fayard

    Présentation de l'éditeur :

    « Qu’est-ce qu’une vie réussie ? » Au bic, Jeanine recopie la question sur un post-it, puis, comme chaque jour, part marcher. Croisant, au cours de ses dérives, divers visages : un architecte syrien fuyant son pays, un danseur étoile moscovite, une mythomane espagnole…
    Ne sous-estime-t-on pas, d’ordinaire, l’amplitude des voyages intérieurs suscités par ces rencontres fortuites ? 
    Sans doute fallait-il, pour en prendre la mesure, le regard d’un proche. C’est sa fille qui dresse le portrait de cette femme de soixante-cinq ans, en autant de fragments, composant un kaléidoscope où se confondent le monde et une mère.

    Première page :

    Sans doute n’aimons-nous jamais que les énigmes ; Jeanine en devint une pour moi au sortir de l’enfance quand elle cessa, à l’image du jouet et de l’oreiller, d’appartenir à ce réseau d’évidences amniotiques qu’est la famille jusqu’à nos dix ou douze ans pour devenir – cela prit plusieurs années – un corps distinguable et opposable au mien : non plus l’intime et l’ineffable « maman », mais bien la dicible « ma mère », personnage que je pouvais observer depuis une place de spectatrice détachée, ne la voyant plus strictement enseigner-et-protéger-et-vaincre mais bien aussi hésiter-et-douter-et-désirer, la percevant faillible, fragile et, comme tout humain, si imprenable dans ses failles et sa fragilité qu’elle en devenait un mystère – non plus une mère mais un secret de famille, de ceux qu’on brûle d’écrire pour mieux comprendre qu’on ne les saura jamais tout à fait.

    Ce que je sais surtout d’elle, ce sont des récits, obtenus par les messages qu’elle me laisse hebdomadairement, petits monologues d’une à trois minutes déposés à distance sur mon répondeur...

    Ce que j'en pense :

    Portrait tendre et plein de douceur d’une mère par sa fille. Tout parait juste et très respectueux dans toutes les anecdotes qui ont jalonnées la vie maternelle (surtout depuis sa retraite). J’ai été happé par l’écriture de l’autrice même si certains pourraient lui reprocher un vocabulaire parfois difficile et des phrases un peu longues… ce n’est pas mon cas...  même si je trouve ce livre moins fort que son suivant : « Vers la violence ».

    L'abandon des prétentions

     

     

    __________


    votre commentaire