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Une tombe pour deux
"Une tombe pour deux" de Ron Rash - Gallimard
Présentation de l'éditeur :
Les Hampton, propriétaires de vastes terres, de la scierie et du magasin général de Blowing Rock, petite ville de Caroline du Nord, désapprouvent l'amitié que leur fils Jacob porte à Blackburn, croque-mort défiguré et boiteux à la suite d'une polio. Et plus fortement encore son mariage avec la très jeune Naomi, fille d'un paysan sans le sou. Profitant de l'éloignement de Jacob, parti combattre en Corée après avoir confié Naomi à son ami, ils élaborent un plan inqualifiable justifié à leurs yeux par une certaine idée de l'amour parental. En fait, il s'agit surtout de protéger leurs intérêts et l'honneur de la famille.
Première page :
Jacob était de faction, posté au bord d'une rivière séparant les deux armées. La nuit était plus froide que toutes celles qu'il avait connues chez lui, dans le comté de Watauga. Ce froid faisait plus que s'insinuer sous la peau. Il enfermait les doigts et les pieds dans une gangue de fer, faisait cliqueter les dents comme du verre sur le point de se briser. Aucune épaisseur de laine et de coton, sous la parka doublée de molleton, ne l'atténuait. Depuis des semaines, Jacob attendait que le froid cesse. On était maintenant en mars, pourtant ces lieux n'obéissaient à aucun calendrier. La rivière était toujours gelée. Il imaginait la glace descendue jusqu'au fond – pas de courant, les poissons stoppés net, comme montés sur des supports. La rivière avait un nom, mais Jacob refusait de le laisser se graver dans sa mémoire. Depuis qu'il avait posé le pied sur le quai du port de Pusan, son but avait été d'oublier et non pas de se souvenir.
À Fort Polk, il avait entendu toutes sortes d'histoires sur ce qui l'attendait en Corée. Pour la plupart, ce n'étaient que des foutaises : les Nord-Coréens mangeaient des rats et des serpents crus, voyaient dans le noir aussi bien que les chats.
Ce que j'en pense :
C’est chaque fois une grande joie de découvrir un nouveau roman de Ron Rash. Celui-ci, de façon originale pour l’auteur, commence par nous emmener en Corée. Les scènes de guerre y sont terribles. Lorsque nous revenons en Caroline du Nord nous retrouvons le Ron Rash qui sait parfaitement nous mettre au cœur de la nature et de ces petites choses ordinaires comme une truite qui avale une miette de pain. Là où l’auteur excelle c’est de nous donner à voir des personnages inoubliables (surtout Blackburn).
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