• Mãn

     

    "Mãn" de Kim Thúy - Liana Levi

    Présentation de l'éditeur :

    «Maman et moi, nous ne nous ressemblons pas. Elle est petite, et moi je suis grande. Elle a le teint foncé, et moi j’ai la peau des poupées françaises. Elle a un trou dans le mollet, et moi j’ai un trou dans le cœur.»

    Première page :

    Maman et moi, nous ne nous ressemblons pas. Elle est petite, et moi je suis grande. Elle a le teint foncé, et moi j’ai la peau des poupées françaises. Elle a un trou dans le mollet, et moi j’ai un trou dans le coeur.

    Ma première mère, celle qui m’a conçue et mise au monde, avait un trou dans la tête. Elle était une jeune adulte, ou peut-être encore une fillette, car aucune femme vietnamienne n’aurait osé porter un enfant sans porter un jonc au doigt.

    Ma deuxième mère, celle qui m’a cueillie dans un potager au milieu des plants d’okra, avait un trou dans la foi. Elle ne croyait plus aux gens, surtout quand ils parlaient. Alors, elle s’est retirée dans une paillote, loin des bras puissants du Mékong, pour réciter des prières en sanskrit.

    Ma troisième mère, celle qui m’a vue tenter mes premiers pas, est devenue Maman, ma Maman. Ce matin-là, elle a voulu ouvrir ses bras de nouveau. Alors, elle a ouvert les volets de sa chambre, qui jusqu’à ce jour étaient restés fermés. Au loin, dans la lumière chaude, elle m’a vue et je suis devenue sa fille. Elle m’a donné une seconde naissance en m’élevant dans une grande ville, un ailleurs anonyme, au fond d’une cour d’école, entourée d’enfants qui m’enviaient d’avoir une mère enseignante et marchande de bananes glacées.

    Ce que j'en pense :

    Très beau récit plein de pudeur et de délicatesse. Les horreurs de la guerre, l’exil, les séparations… sont à peine évoqués mais sont sous-jacents. C’est aussi une très belle histoire d’amour où l’on retrouve de merveilleuses recettes de cuisine.  Le style est simple mais je m’attendais à une écriture plus poétique.

    Mãn

     

    __________

     


    votre commentaire
  • Zombi

    "Zombi" de Joyce Carol Oates - Stock

    Présentation de l'éditeur :

    Il pose bien un peu un problème à son professeur de père, et à sa mère - qui l'adore - mais ni l'un ni l'autre ne croient une seconde à l'accusation d'agression sexuelle sur un mineur dont il est l'objet.
    Il est un cas pour le psychiatre-expert auprès des tribunaux chargé de le suivre, qui se sent néanmoins encouragé par la qualité toujours plus positive de ses rêves et de sa franchise à en discuter.
    Il est le plus exquis et le plus attentif des garçons pour sa riche grand-mère de moins en moins capable de lui refuser quoi que ce soit.
    Il est le plus vrai et le plus abominablement terrifiant des tueurs-psychopathes jamais imaginés dans un roman dont on se demande par instants comment l'auteur a pu trouver, avec autant de talent, les mots pour l'écrire.

    Première page :

    Je m’appelle Q… P… & j’ai trente & un ans, trois mois.

    Taille : 1,78 mètre, poids : 67 kilos.

    Yeux marron, cheveux bruns. Corpulence moyenne. Quelques taches de rousseur sur les bras, le dos. Astigmate des deux yeux, port de verres correcteurs obligatoire pour conduire.

    Signes particuliers : néant.

    Sauf peut-être ces petites cicatrices en forme d’asticot sur les deux genoux. Un accident de vélo, il paraît, quand j’étais petit. Je ne dis pas non mais je ne me souviens pas.

    Je ne dis jamais non. Je suis d’accord avec vous quand vous prononcez vos paroles sages. En remuant votre trou du cul de bouche & je dis OUI MONSIEUR je dis NON MADAME. Le regard timide. Derrière mes lunettes à monture en plastique qui ont la couleur de la peau vue à travers le plastique.

    Ce que j'en pense :

    L’autrice nous plonge (au vrai sens du terme) dans le cerveau d’un fou, d’un détraqué sexuel. L’écriture elle-même participe à la confusion de l’homme, avec le signe & qui revient très souvent à la place du « et », avec des phrases très courtes, hachées, avec aussi des dessins faits par le psychopathe. La lecture n’est pas confortable, parfois dérangeante et glaçante. Mais il n’y a jamais de complaisance dans ce voyage réaliste au cœur d’une maladie mentale, et cela c’est une prouesse.

    Zombi

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Sur la plage de Chesil

    "Sur la plage de Chesil" de Ian McEwan - Gallimard

    Présentation de l'éditeur :

    " Ils étaient jeunes, instruits, tous les deux vierges avant leur nuit de noces, et ils vivaient en des temps où parler de ses problèmes sexuels était manifestement impossible... " Le soir de leur mariage, Edward Mayhew et Florence Ponting se retrouvent enfin seuls dans la vieille auberge du Dorset où ils sont venus passer leur lune de miel. Mais en 1962, dans l'Angleterre d'avant la révolution sexuelle, on ne se débarrasse pas si facilement de ses inhibitions et du poids du passé. Les peurs et les espoirs du jeune historien et de la violoniste prometteuse transforment très vite leur nuit de noces en épreuve de vérité où rien ne se déroule selon le scénario prévu. Dans ce roman dérangeant, magistralement rythmé par l'alternance des points de vue et la présence obsédante de la nature, Ian McEwan excelle une nouvelle fois à distiller l'ambiguïté, et à isoler ces moments révélateurs où bifurque le cours d'une vie.

    Première page :

    Ils étaient jeunes, instruits, tous les deux vierges avant leur nuit de noces, et ils vivaient en des temps où parler de ses problèmes sexuels était manifestement impossible. Mais ce n'est jamais facile. Ils venaient de s'installer pour dîner dans un minuscule salon au premier étage d'une auberge de style géorgien. Dans la pièce voisine, visible par la porte ouverte, se trouvait un lit à baldaquin assez étroit, dont la courte- pointe d'un blanc pur s'étendait, incroyable- ment lisse, comme si aucune main humaine ne l'avait touchée. Edward n'avoua pas qu'il n'était encore jamais allé à l'hôtel, alors que Florence, après ses nombreux voyages avec son père dans son enfance, était une habituée. En apparence, tout leur souriait. Leur mariage à l'église St Mary d'Oxford s'était bien passé : la cérémonie religieuse avait été sans fausse note, la réception, festive, les adieux de leurs copains de fac et de lycée, aussi bruyants que chaleureux. Contrairement à ce qu'ils redoutaient tous les deux, les parents de Florence n'avaient pas regardé les siens de haut…

    Ce que j'en pense :

    Livre qui décortique dans les années 60 un amour qui se voudrait éternel mais qui se heurte très vite à un « accident physiologique ». A partir d’une écriture classique, presque austère, avec un humour qui se veut distancié, l’auteur nous offre un roman, plutôt court, qui pourrait être considéré comme « léger » mais qui montre avec force la souffrance et la cruauté de cette misère sexuelle liée au puritanisme de l’époque.

    Sur la plage de Chesil

     

     

    __________


    votre commentaire
  • "Les enfants sont rois" de Delphine de Vigan - folio

    Présentation de l'éditeur :

    "Même dans les drames les plus terribles, les apparences ont leur mot à dire."Mélanie, qui a grandi dans le culte de la téléréalité, n'a qu'une idée en tête : devenir célèbre. Mais son unique apparition à l'écran tourne au fiasco. Quelques années plus tard, mariée et mère de famille, elle décide de mettre en scène le quotidien de ses enfants sur YouTube. Le succès ne se fait pas attendre, et la voilà bientôt suivie par des millions d'abonnés. Jusqu'au jour où sa fille disparaît. Des années Loft Story aux années 2030, marquées par le sacre des réseaux sociaux, Delphine de Vigan explore les dérives d'une époque où l'on ne vit que pour être vu.

    Première page :

    BRIGADE CRIMINELLE - 2019

    DISPARITION DE L'ENFANT KIMMY DIORE

    Objet : Transcription et exploitation des dernières stories Instagram postées par Mélanie Claux (épouse Diore).

    STORY 1

    Diffusée le IO novembre, à 16 h 35.

    Durée : 65 secondes.

    La vidéo est filmée dans un magasin de chaussures. Voix de Mélanie : « Mes chéris, nous sommes arrivés chez Run-Shop pour acheter les nouvelles baskets de Kimmy ! Hein, mon petit chat, tu as besoin de nouvelles baskets car les autres commencent à être un peu serrées ? (La caméra du téléphone portable se tourne vers la petite file qui met quelques secondes avant d'acquiescer, sans grande conviction.) Alors, voici les trois paires que Kimmy a sélectionnées …

    Ce que j'en pense :

    Évidemment que le sujet est important et qu’il est bon de dénoncer toutes les dérives des « youtubeurs » (et assimilés) qui mettent en scène les enfants (et cela en toute légalité). Mais ce livre m’a beaucoup déçu (contrairement à d’autres romans de l’autrice). Les personnages manquent cruellement d’épaisseur et le style est du genre « radoteur »… c’est un roman qui tourne en rond autour de son sujet sans vraiment le pénétrer.

    Les enfants sont rois

     

     

    ___________


    votre commentaire
  • Canoës

    "Canoës" de Maylis de Kerangal - verticales

    Présentation de l'éditeur :

    « J’ai conçu Canoës comme un roman en pièces détachées : une novella centrale, “Mustang”, et autour, tels des satellites, sept récits. Tous sont connectés, tous se parlent entre eux, et partent d’un même désir : sonder la nature de la voix humaine, sa matérialité, ses pouvoirs, et composer une sorte de monde vocal, empli d’échos, de vibrations, de traces rémanentes. Chaque voix est saisie dans un moment de trouble, quand son timbre s’use ou mue, se distingue ou se confond, parfois se détraque ou se brise, quand une messagerie ou un micro vient filtrer leur parole, les enregistrer ou les effacer. J’ai voulu intercepter une fréquence, capter un souffle, tenir une note tout au long d’un livre qui fait la part belle à une tribu de femmes — des femmes de tout âge, solitaires, rêveuses, volubiles, hantées ou marginales. Elles occupent tout l’espace. Surtout, j’ai eu envie d’aller chercher ma voix parmi les leurs, de la faire entendre au plus juste, de trouver un “je”, au plus proche. »

    Première page :

    J'attendais que le temps passe, renversée dans un fauteuil de dentiste incliné en position horizontale, les yeux perdus sur le faux plafond de polystyrène, les pieds en l'air, et mordais dans une pâte à base d'alginate au goût de fluor qui durcissait contre mes dents. Le tohu-bohu du boulevard me parvenait de loin, la jeune praticienne debout derrière moi faisait tinter les ustensiles sur sa paillasse et je pistais un filet de musique orientale dans ce petit chaos primitif pendant que s'accomplissait la prise d'empreintes. J'avais donc la bouche pleine et me concentrais pour ne pas déglutir, quand la dentiste s'est approchée de moi pour tendre sous mes yeux son portable: regardez, c'est une mandibule humaine du mésolithique, on l'a trouvée dans le quinzième, rue Henry- Farman, en 2008. À l'écran, éclairée sur fond noir tel un objet précieux, j'ai reconnu distinctement une mâchoire, un ossement qui comptait encore quatre molaires dans leurs alvéoles,…

    Ce que j'en pense :

    Contrairement à beaucoup de critiques je n’ai pas été rebuté par le style de ce livre. Il y a toujours un risque dans un livre de nouvelles qu’elles n’aient pas toutes la même force, c’est un peu le cas ici en particulier pour la dernière. Pour moi c’est un très bon livre qui me « parle » très bien car je suis très sensible au domaine de la voix (peu traité en littérature). L’autrice sait bien nous restitué les atmosphères, les sons, les personnages ou de petits détails comme un regard par exemple.

    Canoës

     

     

    __________


    votre commentaire
  • On était des loups

    "On était des loups" de Sandrine Collette - JC Lattès

    Présentation de l'éditeur :

    Ce soir-là, quand Liam rentre des forêts montagneuses où il est parti chasser, il devine aussitôt qu’il s’est passé quelque chose. Son petit garçon de cinq ans, Aru, ne l’attend pas devant la maison. Dans la cour, il découvre les empreintes d’un ours. À côté, sous le corps inerte de sa femme, il trouve son fils. Vivant. Au milieu de son existence qui s’effondre, Liam a une certitude. Ce monde sauvage n’est pas fait pour un enfant. Décidé à confier son fils à d’autres que lui, il prépare un long voyage au rythme du pas des chevaux. Mais dans ces profondeurs, nul ne sait ce qui peut advenir. Encore moins un homme fou de rage et de douleur accompagné d’un enfant terrifié.

    Première page :

    C'est la nuit je regarde l'enfant qui dort. Un tout petit enfant, il ne sait rien du monde, il ne sait rien faire. Un enfant ce n'est pas fait pour la vie, cette vie-là je veux dire qui est immense et brutale devant lui devant nous.

    La vie qui.

    L'enfant a des cheveux blonds presque blancs, les mêmes que sa mère, ébouriffés par le sommeil. S'il avait les yeux ouverts, ces yeux d'un éclat bleuté transparent, je penserais encore une fois à mon père son grand- père qui avait lui aussi ce regard-là avec ce ciel à l'intérieur, une ondulation comme les grands lacs de montagne. Mais l'enfant dort et ses paupières sont baissées.

    l a des petits yeux et je me dis vraiment tout est petit en lui. ça grandira, bien sûr. Pour l'instant le bleu de ses yeux ressemble à une tache de myrtille sauvage, celles qui couvrent les sous-bois au début de l'été et que je rapporte à Ava pour qu'elle les mette en bocaux.

    Ce que j'en pense :

    C’est à mon avis le meilleur roman de l’autrice. On retrouve ses thèmes favoris autour de la nature sauvage, profonde et belle mais parfois assez terrible. On y découvre également que l’homme peut avoir de multiples facettes : le chasseur, le père, le monstre, l’ogre…comme dans les contes. L’écriture est magnifiquement adaptée au sujet en nous faisant pénétrer dans les pensées du père. Un coup de cœur qui m’a fait penser parfois à du Mingarelli.

    On était des loups

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Le corps noir

    "Le corps noir" de Dominique Manotti - Points Seuil

    Présentation de l'éditeur :

    Entre le débarquement des Alliés et la libération de Paris, deux mois et demi s'écoulent. La SS allemande - le «corps noir» - et la Gestapo française règnent encore. Dans leur sillage, industriels, banquiers et artistes s'enrichissent et mènent une vie de plaisir. Mais les plus perspicaces sentent le vent tourner...Ce roman peint ceux qui perdent, ceux qui s'en sortent, et ceux qui se retrouvent toujours, quoi qu'il arrive, dans le camp des vainqueurs.

    Première page :

    L'album de photos est là, sur la table, recouvert d'un cuir rouge sombre, moelleux au toucher, un peu éraflé, les charnières fatiguées, les coins usés. Sur la couverture, trois noms gravés en lettres dorées : François, Jeanne, Isabelle. Il faut l'ouvrir précautionneusement, tant il a été feuilleté. Pages de papier épais, rigide, gris foncé, qu'on tourne une à une et sur lesquelles ont été collées de petites photos rectangulaires, brillantes, à bords blancs crantés. Certaines ont jauni plus que d'autres, et parfois le brillant s'écaille. Une belle écriture ferme, à la plume, mentionne ici ou là un nom, un lieu, une date. Encre noire, passée, sur fond gris, peu lisible avec le temps.

    Beaucoup de photos d'enfants à tous les âges, dans des berceaux, à la plage, malades, jouant aux cartes sous les arbres, dans des bateaux, en train de lire ou de dormir dans des fauteuils. Autour d'eux, la mère, les grands-parents, attentifs, émus, fiers, toujours complices. Parfois, très rarement, le père, silhouette mince, élégante et sportive. Chronique d'une famille heureuse.

    Quatre photos, côte à côte, sur l'une des dernières pages.

    Mars, paysage de haute montagne. Soleil éclatant sur un grand champ de neige en pente très douce,

    Ce que j'en pense :

     J'ai lu et apprécié plusieurs livres de Dominique Manotti. Ils sont toujours très bien documentés dans des domaines très différents (la finance, la police...). Mais je n'ai pas pu aller au delà de la page 50 dans ce roman car le style d'écriture m'a lassé : des phrases très courtes, hachées, des énumérations un peu sèches... Dommage

    Le corps noir

     

     

    __________


    votre commentaire
  • La maison nue

    "la maison nue" de Marion Fayolle - magnani

    Présentation de l'éditeur :

    Trois personnages, ayant tendance à se faire souffrir et à saboter leur vie, décident de cohabiter dans une maison?: ­– ­Un homme qui ne s’intéresse qu’aux filles susceptibles de lui faire du mal. – Une femme cavalière qui dit aimer seulement les chevaux les plus dangereux. – Un homme qui cherche à écrire mais qui n’est jamais satisfait et détruit ce qu’il invente. Entre eux, une amitié se noue et leur maison devient l’abri qui les protège de la folie du monde extérieur. Avec La Maison nue, Marion Fayolle met en pages trois existences marginales, qui, malgré leurs profondes différences, cherchent ensemble à mieux se connaître et se comprendre à travers les jeux et les rapports quotidiens de leur colocation. La Maison nue nous questionne sur les douleurs qu’on s’inflige à soi-même, sur la beauté de la mélancolie, l’attrait pour les gouffres et la peur d’être seul.

    Extrait :

    La maison nueLa maison nue

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Ce que j'en pense :

     J'aime beaucoup l'univers graphique de Marion Fayolle, c'est original et très poétique. Elle a une façon bien particulière de déconstruire (de mettre à nu) et de reconstruire (avec des morceaux) ses personnages. On peut penser à du théâtre, de la danse ou à une comédie musicale. C'est un livre à découvrir, comme les autres livres de l'autrice.

    La maison nue

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Le grand soir

    "Le grand soir" de Gwenaël Bulteau - La manufacture des livres

    Présentation de l'éditeur :

    22 janvier 1905. Paris se presse à la suite du cortège funéraire de Louise Michel, icône légendaire de la Commune. Parmi les ouvriers, la jeune Jeanne Desroselles, travestie en femme du peuple, se mêle à la foule. Idéaliste et militante, cette jeune héritière fréquente depuis quelques mois les rassemblements publics, vibrant des revendications de ceux qui luttent pour la justice et la liberté. Mais ce matin d’hiver sera pour Jeanne le dernier. Aux yeux de la police comme de sa famille, Jeanne s’est volatilisée. Sa cousine Lucie n’entend pas se satisfaire de cette conclusion, et elle se glisse de tavernes en ruelles pour retrouver la trace de la disparue. Pendant ce temps, aux quatre coins de la France, les manifestations se multiplient, les femmes se rassemblent pour faire entendre leur droit à la parole et à disposer de leur corps, les mineurs et les ouvriers réclament un travail qui ne les condamne pas à mort... Tous s’apprêtent à venir massivement à Paris, manifester ensemble le 1er mai. Ce sera le Grand Soir.

    Première page :

    Paris, Levallois-Perret, 22 janvier 1905

    La dépouille arriva gare de Lyon, par le tram en provenance de Marseille. Des hommes en costume noir portaient le modeste cercueil, quatre planches sous un linceul rouge, car la défunte n'aurait jamais voulu autre chose.

    Avec la mort de Louise Michel, une époque se terminait. La Louve avait succombé à une pneumonie et des milliers de personnes lui rendaient hommage ce jour-là, sous une neige fine et collante, en suivant son corbillard jusqu'au cimetière de Levallois-Perret. Beaucoup d'ateliers et de petit syndicats s'étalent cotisés. La préfecture avait interdit les drapeaux révolutionnaires, alors, pour contourner le problème, les gens du peuple avalent orné leurs couronnes de petits rubans rouges en souvenir de la Commune. Tout le monde se rappelait que Louise Michel avait voulu se rendre à Versailles pour tuer Thiers de ses propres mains.

    Ce que j'en pense :

     C'est plutôt un roman social qu'un roman noir même s'il y a beaucoup de noir. La période est admirablement reconstituée; on y rencontre des personnages historiques et on retrouve aussi des évènements marquants de cette époque. Évidemment il y a une bonne part de fiction mais tous les personnages sont bien ancrés dans le réel.

    Le grand soir

     

    __________


    votre commentaire
  • Un sacré gueuleton

    "Un sacré gueuleton" de Jim Harrison - J'ai lu

    Présentation de l'éditeur :

    Tous les lecteurs de Jim Harrison connaissent son appétit vorace pour la bonne chère, les meilleurs vins et autres plaisirs bien terrestres qui irriguent son oeuvre. Rassemblés pour la première fois en un seul volume, ces articles publiés au fil de sa carrière ne se contentent pas de célébrer les plaisirs de la table. Savoureux et féroce, Big Jim parle de gastronomie avec la même verve que lorsqu'il évoque la littérature, la politique ou l'amour. En chemin, il déroule des recettes toujours réjouissantes, parfois inattendues, et fait preuve d'un humour dévastateur à l'égard des pisse-vinaigres de tout poil. Autoportrait en creux du célèbre gourmand vagabond, ce livre est un véritable festin littéraire qui comblera tous les appétits.

    Première page :

    Tambouille mentale

    Cher Mike

    Mon désespoir et ma confusion actuels font que ma chronique gastronomique pour le prochain numéro se résumera à ce qui suit. Ne nous voilons pas la face, voilà un moment que les spectres jumeaux de la bouffe et de la politique monopolisent notre attention. Lors d'un récent voyage en Amérique centrale destiné à satisfaire ma curiosité pour les mille et une facettes des révolutions dans ces pays, j'ai franchement mangé comme un dieu. En un seul déjeuner, par exemple, j'ai savouré du calmar mijoté dans son encre, des toasts de caille braisée, une soupe entièrement constituée de minuscules crustacés, plus une brochette de plusieurs langoustes, le tout accompagné de deux bouteilles de vin.

    Ce que j'en pense :

    C’est un livre un peu brouillon qui est constitué à la fois de récits de voyages, de chroniques culinaires, d’hymnes aux vins (français en particulier), de poésies, de politiques, de littérature… Il y a de merveilleux passages qu’on a continuellement envie de surligner. Il y a aussi beaucoup de plats et de vins qu’on a envie de découvrir…Mais il y a aussi quelques répétitions qui peuvent lasser dans la dernière partie du livre.

    Un sacré gueuleton

     

    __________


    votre commentaire