• Je ne suis pas malheureux

    "Je ne suis pas malheureux" de Franz Bartelt - Le Dilettante

    Présentation de l'éditeur :

    Plume ubiquitaire et malin génie littéraire opérant, du polar à la féérie grinçante, dans tous les genre connus et inconnus, Franz Bartelt, dans la foulée du Léon Bloy de l’Exégèse des lieux communs, a inventé un genre : le fait divers ontologique, l’écrasé de chien métaphysique. Bref, la tranche de vie essentielle, en dix nouvelles qui, dans un style gouailleur et acéré, marquées d’un humour outre-noir, sondent les mystères du couple, les affres de l’amour et titillent en souriant la zone anxiogène : l’éros malade de l’homme contemporain.

    Extrait :

    Le mot que je cherchais

    « Non, pas toi, Kenny, pas toi, dit-elle en déposant le sac de commissions sur le coin de la table au bout de laquelle Kenny hochait la tête.

    – Eh si, Mégane ! Bien sûr que si ! Je ne sais pas s’il fallait que ça arrive, mais c’est arrivé.

    – Tu es vraiment sûr ? insista-t-elle, consternée, tout en continuant à trier les commissions.

    – On ne peut pas être plus sûr que je ne le suis. Si je te dis que je somatise, c’est que je somatise. Il m’a fallu du temps pour m’en rendre compte. Au début, je ne voulais pas l’admettre. Et puis, tu vois, je me suis fait une raison.

    – Tu somatises, Kenny, jamais je n’aurais cru ça de toi ! »

    Il la contemplait d’un air ennuyé. Elle confectionnait des tas : un tas pour ce qui devait être rangé au frigo, un tas pour ce qui allait dans le placard, un tas pour les fruits qu’elle empilerait dans la corbeille de faïence, au centre de la table.

    Ce que j'en pense :

    Bartelt fait partie de ces écrivains qui passent rarement dans les médias, et pourtant ! Il est reconnaissable dans la plupart de ses écrits avec son humour plutôt noir mais également farceur et narquois. Il a un don pour faire ressortir nos petites pensées quotidiennes et nos travers ordinaires. Tout cela dans un style à la fois simple et florissant. De nombreux passages sont à faire partager en lecture à voix haute (par exemple le début de "Après l'amour")

    Je ne suis pas malheureux

     

     

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  • Canoës

    "Canoës" de Maylis de Kerangal - verticales

    Présentation de l'éditeur :

    « J’ai conçu Canoës comme un roman en pièces détachées : une novella centrale, “Mustang”, et autour, tels des satellites, sept récits. Tous sont connectés, tous se parlent entre eux, et partent d’un même désir : sonder la nature de la voix humaine, sa matérialité, ses pouvoirs, et composer une sorte de monde vocal, empli d’échos, de vibrations, de traces rémanentes. Chaque voix est saisie dans un moment de trouble, quand son timbre s’use ou mue, se distingue ou se confond, parfois se détraque ou se brise, quand une messagerie ou un micro vient filtrer leur parole, les enregistrer ou les effacer. J’ai voulu intercepter une fréquence, capter un souffle, tenir une note tout au long d’un livre qui fait la part belle à une tribu de femmes — des femmes de tout âge, solitaires, rêveuses, volubiles, hantées ou marginales. Elles occupent tout l’espace. Surtout, j’ai eu envie d’aller chercher ma voix parmi les leurs, de la faire entendre au plus juste, de trouver un “je”, au plus proche. »

    Première page :

    J'attendais que le temps passe, renversée dans un fauteuil de dentiste incliné en position horizontale, les yeux perdus sur le faux plafond de polystyrène, les pieds en l'air, et mordais dans une pâte à base d'alginate au goût de fluor qui durcissait contre mes dents. Le tohu-bohu du boulevard me parvenait de loin, la jeune praticienne debout derrière moi faisait tinter les ustensiles sur sa paillasse et je pistais un filet de musique orientale dans ce petit chaos primitif pendant que s'accomplissait la prise d'empreintes. J'avais donc la bouche pleine et me concentrais pour ne pas déglutir, quand la dentiste s'est approchée de moi pour tendre sous mes yeux son portable: regardez, c'est une mandibule humaine du mésolithique, on l'a trouvée dans le quinzième, rue Henry- Farman, en 2008. À l'écran, éclairée sur fond noir tel un objet précieux, j'ai reconnu distinctement une mâchoire, un ossement qui comptait encore quatre molaires dans leurs alvéoles,…

    Ce que j'en pense :

    Contrairement à beaucoup de critiques je n’ai pas été rebuté par le style de ce livre. Il y a toujours un risque dans un livre de nouvelles qu’elles n’aient pas toutes la même force, c’est un peu le cas ici en particulier pour la dernière. Pour moi c’est un très bon livre qui me « parle » très bien car je suis très sensible au domaine de la voix (peu traité en littérature). L’autrice sait bien nous restitué les atmosphères, les sons, les personnages ou de petits détails comme un regard par exemple.

    Canoës

     

     

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  • Microfictions 2022

    "Microfictions 2022" de Régis Jauffret - Gallimard

    Présentation de l'éditeur :

    "Le monde est une fiction terrible et fabuleuse que les humains se racontent."R. J.

    Première page :

    APPLAUDIR LA FRANCE

     

    Les murs sont proches. Je pourrais les toucher depuis mon lit de mes quatre membres déployés. J’ai un téléphone à moitié mort pour me distraire et photographier mes devoirs. Certains enseignants les retoquent sitôt reçus quand ils trouvent les clichés trop pourris. D’autres me prennent en pitié, m’accordent des notes astronomiques.

    — Puisque les points ne coûtent rien.

    Au supermarché je remplis un chariot de saumon, de cerises, de gâteaux, de champagne. Je l’abandonne devant une caisse. Je vais chercher mes cordons bleus. Le type de la sécurité ouvre sa bouche violette.

    — Pourquoi vous faites ça à chaque fois, mais pourquoi ?

    Je choisis le plus gros des ananas à prix coûtant. Il me suit sur le parking. Il me montre du doigt l’appartement qu’il occupe au vingtième étage d’une tour saccagée.

    — Je voudrais vous inviter à dîner.

    Sûrement pour coucher avec moi. Une bonne raison d’éviter de braver le couvre-feu.

    — Je vais me faire verbaliser par les flics.

    — Vous leur direz que vous allez aider un vieux.

    J’ai apporté l’ananas emballé dans la feuille de papier cadeau doré qui recouvrait le fond d’un tiroir. Demeuraient chez lui des traces de personnes évanouies. Une brosse à cheveux au manche fendu, le capuchon d’un tube de rouge à lèvres dans une coupelle en faïence au chevet du grand lit. Dans la chambre d’enfant sur le tapis taché d’encre où souriait Mickey des fragments de poupée crissaient sous les pieds. Les décalcomanies de monstres et d’animaux donnaient un côté vitrail aux vitres….

    Ce que j'en pense :

    Un livre « monstre » : plus de 1000 pages mais aussi 500 histoires courtes mais féroces, méchantes, cyniques, violentes, provocantes, dérangeantes et, parfois, tendres, subtiles… Surtout, surtout, ne pas lire toutes ces nouvelles à la suite, vous risquez une forte indigestion ! Il faut prendre le temps de déguster chaque histoire puis les laisser se reposer. Ce n’est qu’à cette condition que vous pourrez apprécier ce livre.

    Microfictions 2022

     

     

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  • "Odette Toulemonde et autres histoires" de Eric-Emmanuel Schmitt - Albin Michel

    Présentation de l'éditeur :

    « Cher monsieur Balsan,Je n'écris jamais car, si j'ai de l'orthographe, je n'ai pas de poésie. Or, il me faudrait beaucoup de poésie pour vous raconter l'importance que vous avez pour moi. En fait, je vous dois la vie. Sans vous, je me serais tuée vingt fois.Odette »La vie a tout offert à l'écrivain Balthazar Balsan et rien à Odette Toulemonde. Pourtant, c'est elle qui est heureuse. Lui pas. Leur rencontre fortuite va bouleverser leurs existences.Huit récits, huit femmes, huit histoires d'amour. De la petite vendeuse à la milliardaire implacable, de la trentenaire désabusée à une mystérieuse princesse aux pieds nus en passant par des maris ambigus, des amants lâches et des mères en mal de filles, c'est une galerie de personnages inoubliables qu'Eric-Emmanuel Schmitt poursuit avec tendresse dans leur quête du bonheur.

    Première page :

    Wanda Winnipeg

    En cuir, l’intérieur de la Royce. En cuir, le chauffeur et ses gants. En cuir, les valises et les sacs bourrant la malle. En cuir, la sandale tressée qui annonce une jambe fine au bord de la portière. En cuir, le tailleur jupe écarlate de Wanda Winnipeg.

    Les chasseurs s’inclinent.

    Wanda Winnipeg franchit le seuil sans regarder personne ni vérifier que ses affaires suivent. Comment en serait-il autrement ?

    Derrière le comptoir de l’hôtel, les employés frémissent. Faute de pouvoir capter son attention derrière ses lunettes fumées, ils débordent de formules accueillantes.

    – Bienvenue, madame Winnipeg, c’est un grand honneur pour nous que vous descendiez au Royal Emeraude. Nous ferons tout pour rendre votre séjour le plus agréable possible.

    Ce que j'en pense :

    Ce sont huit nouvelles « à chute » et on sent bien que l’auteur maîtrise son sujet, même si, de temps en temps, les effets sont « attendus ». C’est une lecture rapide, distrayante, et, comme dans les autres livres de nouvelles, certaines sont supérieures à d’autres. Il y a souvent de la douceur, de l’émotion, du suspens, un petit peu de cynisme et parfois de la facilité. Mais, au total, ce livre fait du bien (même si cela ne dure pas longtemps !)

    Odette Toulemonde et autres histoires

     

     

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    "Au coeur d'un été tout en or" de Anne Serre - Mercure de France

    Présentation de l'éditeur:

    Une mère inconnue qui ressemble à Liz Taylor, un père tendrement aimé qui se prend pour Musset, un amant marié qui joue avec un revolver, un autre qui apparaît le jour de la mort de Beckett, des amies en Allemagne, en Corse, en Angleterre, dont parfois le souvenir a presque disparu, et un Je tantôt féminin, tantôt masculin, vulnérable ou assassin, apparaissent tour à tour, comme on abat des cartes, dans ce nouveau jeu d’Anne Serre placé sous le signe de Lewis Carroll. Un autoportrait en trente-trois facettes.

    Première page :

    Ma mère a fait ses paquets, elle est prête à partir. Mais le dimanche après-midi, au tout dernier moment, elle téléphone pour nous proposer de venir dîner avec elle. J'ai mis le frigidaire à dégivrer, m explique-t-elle. Il faut bien que je fasse cuire ce poulet avant qu il ne se gâte.

    Rien ne peut me surprendre autant que ces mots de ma mère qui est une femme élégante, peu douée pour la vie pratique, ne s occupant jamais de son frigidaire ni de cuisiner : elle a pour cela une aide ménagère qu'autrefois on appelait une cuisinière. Mais maman, lui dis-je, je ne te comprends pas, que se passe-t-il ? C'est comme je te le dis, dit ma mère qui n'a jamais employé cette expression de toute sa vie, ça m'embêterait que ce poulet se perde, et puis vous pouvez bien venir dîner de temps en temps, Françou et toi. François est mon compagnon, je ne l'ai jamais appelé Françou ni quiconque à ma connaissance, et ma mère encore moins qui l'a toujours vouvoyé. Maman, lui dis-je, il y a quelque chose qui ne va pas. Je ne te reconnais pas. Ce n'est pas ta manière de parler.

    Ce que j'en pense :

    Ce sont des nouvelles très courtes et souvent assez étranges et mystérieuses. Toutes les nouvelles ne m’ont pas intéressé de la même façon mais je reconnais que certaines sont assez exceptionnelles par leur côté fascinant et énigmatique. En deux ou trois pages Anne Serre nous emmène dans un monde imaginaire où le réel est tout proche mais comme en suspens.

    Au cœur d'un été tout en orAu cœur d'un été tout en orAu cœur d'un été tout en orAu cœur d'un été tout en or

     

     

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  • Oublie l'océan

    "Oublie l'océan" de Cathie Barreau - éditions Pneumatique

    Présentation de l'éditeur :

    Dans chacune de ces nouvelles, les personnages, Elise, Samuel, la petite Lily, Tedbalt… apprennent que les heurts de la vie creusent les cœurs, parfois révèlent les désirs. Un geste, un chagrin, une parole ou un effroi, tous cachés dans l’oubli, se dévoilent, transformés à travers le temps et le paysage.

    Des lieux émanent une aura, un parfum de thym le long du sentier, une guitare électrique rue de Sèvres, un vent iodé par-delà le marais, une clarté sur le fleuve.

    Le mystère d’une sensation captée par le corps suffit à bouleverser le regard sur la vie.

    Première page :

    Ma sœur bien-aimée, j'ai tout gardé en mémoire, les acrobates à la sortie du village, les chauves-souris, les crêtes, la piste sous la maigre lumière, le piqué des engoulevents dans le soir qui semblait ne jamais se vouloir nuit, les menus objets serrés dans nos sacs, la branche de ronce fleurie qui fouetta mon visage et la blessure sur ma joue qui désormais trace une ligne blanche sur ma peau, le sursaut d'Anton quand il vit les perles de sang couler dans mon cou, son malaise et ta voix coléreuse au bout de quelques minutes quand sa torpeur t'agaça au point que tu te détournas de lui et vins vers moi, tes yeux embués dont je ne comprenais pas l’émoi….

    Ce que j'en pense :

    On rentre dans ce recueil de nouvelles comme on entre avec tendresse et douceur chez quelqu’un qu’on aime mais que l’on n’a pas vu depuis longtemps. L’écriture de l’auteure nous transporte au fil de l’eau, sur une plage, dans la montagne… et nous habitons vraiment chaque lieu en compagnie des personnages. C’est un livre simplement vivant, fait de petits détails et de silence qui ne cache rien.

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  • Les petits outrages

    "Les petits outrages" de Claude Bourgeyx - Le Castor Astral

    Présentation de l'éditeur :

    " Bon sang, c'est quoi, le poids des mots ? Cinq cents grammes ? Un kilo ? Allez savoir ! Sans i, compter que les mots n'ont pas tous le même poids. Il existe des mots lourds comme camion ou indigestion, et des mots légers comme duvet ou soupir. Il faut savoir que les mots légers ou réputés tels peuvent être lourds. Lourds de conséquences. Alors posons-nous la question : un mot léger, mais lourd de conséquences, pèse-t-il plus ou moins qu'un mot lourd aux conséquences légères ? " Claude Bourgeyx est passé maître dans l'art du dérapage. De la plus anodine des réalités, il tire des situations exceptionnelles où surréalisme et fantastique caracolent dans un joyeux bruissement de mots. C'est cocasse, cruel, étouffant, léger, pernicieux, intoxicant.
    Claude Bourgeyx tient un scalpel à la place du stylo. Acides et destructeurs, ses textes se révèlent comme un grand cru de l'humour par l'absurde.

    Première page :

    Maja

    Mais qui a bien pu engrosser la Maja nue, de Goya, au musée du Prado ? La drôlesse est enceinte de cinq mois, on ne peut plus dissimuler son état aux visiteurs. On se demande qui est le père. Le conservateur ? Ce n'est pas crédible pour la raison qu'il entretient une liaison avec une copie du David de Michel-Ange. Le responsable de la sécurité ? Pas davantage. Celui-là vise ailleurs, du côté de la Cour. En ce moment, il courtise les Ménines avec l'espoir qu'elles favoriseront son approche de l'infante. Joli monde ! Alors qui ? Un gardien. Un visiteur. Un touriste étranger, peut-être. Un Japonais, si ça se trouve. Beau scandale en perspective ! On imagine sans peine la une des journaux à sensation : l'enfant de la Maja nue a les yeux bridés. Mais aussi, il faut la voir, mollement étendue sur ses coussins de soie, lascive, provocante... La tentation même.

    Maintenant, il est trop tard pour pratiquer une IVG. Quel scandale, mon Dieu, quel scandale!

    Des critiques d'art prétendent que le comte d'Orgaz ne serait pas étranger à cette paternité. Il se serait rendu à Madrid juste avant son enterrement, par la navette de 7 h 48. Là, il aurait eu un rapport bref mais intense avec la jeune femme. Faudra-t-il recourir au test de paternité ? Déjà des voix s'élèvent pour l'exiger.

    En attendant, une main charitable a accroché au mur, à côté de la pécheresse, une petite toile vierge qui servira de berceau au bâtard.

    Ce que j'en pense :

    Recueil de textes courts (nouvelles) qui amènent du fantastique, du burlesque, de l’humour noir, de l’absurde… dans le quotidien. C’est souvent très réussi et cela mérite d’être lu à voix haute ou d’être mis en scène. On ne peut s’empêcher de rire en lisant ces petits bijoux de littérature.

    Les petits outrages

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  • La demie de six heures

    "La demie de six heures" de Marie-Hélène Lafon -éditions la guêpine

    Présentation de l'éditeur :

    Cette nouvelle est née en Aubrac, pays majuscule. C'est une histoire d'amour. C'est un vertige...

    Marie-Hélène Lafon est professeur de lettres classiques à Paris. Depuis vingt ans ses ouvrages sont remarqués pour leur exigence et leur qualité stylistique (Le Soir du chien, L'Annonce, Les Pays. Joseph, Histoires...)

    Première page :

    "Ils allaient dans les bois de hêtres. Ils entraient dedans. Elle allait la première. Elle était dans son regard, et ça lui faisait chaud dans tout le corps de le savoir derrière elle. Ils étaient comme les bêtes le bois les avalait ils coulaient dans son ventre ils connaissaient les sentiers ils les inventaient ça s'écartait pour eux ils passaient. La terre était souple. Sa peau odorante de feuilles et d'herbes, sillonnée d'insectes infimes, craquetait, crissait, bruissait sous eux. Il lui disait mon petit cheval lisse. Leurs mains étaient d'écorce, d'eau et de vent. Le ciel basculait et le monde, tout autour, menait sa danse sourde. La force du sang cognait dans leurs veines serrées. Ils ne voulaient rien d'autre et la lumière du soir les prenait."

    Ce que j'en pense :

    Juste une nouvelle d’une trentaine de pages dans une toute petite maison d’édition. On retrouve l’écriture fine, ciselée et exigeante de l’auteure de « L’annonce », de « Les derniers indiens », de « Joseph » … ainsi que les paysages rudes du massif central (l’Aubrac en particulier). C’est court mais c’est bon.

    La demie de six heures

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  • Snapshots - Nouvelles voix du Caine Prize

    "Snapshots - Nouvelles voix du Caine Prize - Zulma

    Présentation de l'éditeur :

    Cette sélection de six longues nouvelles saluées par le Caine Prize pour la littérature anglophone d’Afrique – émanation du fameux Booker Prize – nous démontre superbement l’originalité et la puissance d’invention de cette toute jeune génération d’écrivains. À commencer par NoViolet Bulawayo, qui nous bouscule sans retenue avec son saisissant Snapshots, où tout du long, l’auteur interpelle son héroïne. Une petite fille au départ d’une vie déshéritée, entre un père bronchiteux qui fume sa mort, une mère esclave colérique, ses frères et sœurs qui iront l’un après l’autre tenter la malchance funeste de l’autre côté de la frontière, en Afrique du Sud. La fillette grandit comme un brin d’ivraie épargnée par la faux, vend des œufs durs au chaland quand naissent ses petits seins « à la coque à l’amour ». « Tu as quatorze ans et demi quand tu rencontres Givemore sur Main Street. » Celle que Givemore appelle Sunrise au matin de leur rencontre et Sunset le soir venu ne connaîtra pas l’âge adulte. Mais irrésistiblement contée dans une langue parlée des plus accomplies, son histoire lamentable devient pour nous emblématique du désastre humanitaire au Zimbabwe comme dans tout le « Tiers-Monde », alors que l’immense énergie opprimée de la jeunesse ne demande qu’à inventer l’avenir.
    Tous ces auteurs ont en partage des thématiques les plus actuelles, dans des zones d’urbanisation éruptives où règnent violence, misère et corruption, mais aussi les plus folles espérances. Trempée dans les réalités mutantes des grandes cités, cette langue anglaise postcoloniale devient un extraordinaire espace de métamorphose des imaginaires et des sensibilités.

    Première page :

    "Un matin ta mère plonge la main dans le soutif qu'elle a quémandé à sa sœur Noma trois ans plus tôt, et elle en sort un billet de vingt. Elle cache toujours son argent dans son soutif pour que ton retraité de père n'aille pas mettre la main dessus pour t'envoyer à la boutique lui acheter deux paquets de cigarettes Kingsgate et ensuite empester le tabac toute la sainte journée (il fume trop). Ta mère te donne le billet de vingt et un sac plastique de chez TM Hyper et te dit, Toi, va voir Maplanka et achète-moi un-pain-blanc-et-demi-avec-une-pinte-de-chimombe.

    Tu enfiles vite fait tes pata-patas jaunes (qui depuis un moment sont un peu lâches parce que ton père s'acharne quelquefois à y enfoncer ses grands pieds) et tu traces ta route pata-pata jusqu'à la boutique de Maplanka. Il te faut à peu près onze minutes, sept si on te dit de te grouiller d'un ton qui rigole pas, et seulement cinq et demi si c'est ta mère qui t'envoie. Sur le chemin tu croises Namgcobha, la vieille toute courbée qui habite dans la cahute minuscule au bout du pâté de maisons."

    Ce que j'en pense :

    Ces nouvelles sont des découvertes littéraires d’une génération d’écrivains africains anglophones bourrés de talent. On les reçoit comme de véritables coups de poing, tant au niveau des thèmes (très variés) que de l’écriture. Bravo aux éditions Zulma pour cette initiative. On a envie de découvrir d’autres livres de ces jeunes auteur(e)s.

    Snapshots - Nouvelles voix du Caine Prize

    Snapshots - Nouvelles voix du Caine PrizeSnapshots - Nouvelles voix du Caine PrizeSnapshots - Nouvelles voix du Caine Prize

     

     

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  • Noir américain

     

    "Noir américain" de Armand Cabasson - Thierry Magnier

    Présentation de l'éditeur :

    Quand le rêve américain tourne au cauchemar, c'est tout le monde moderne qui vacille. En dix nouvelles à suspense, passant du pur thriller au polar psychologique, ce recueil coup de poing trace un portrait au vitriol d'une Amérique qui part en roue libre. Tueurs à la recherche de la rédemption, policiers en déroute, prisonniers hantés par leurs démons intérieurs, Monsieur Tout-Le-Monde en quête du sens de la vie dans la violence... Noir américain est un recueil de récits noirs, très noirs, qui feront date en littérature policière.

    Extrait :

    "Grapp, c'est mon monstre. C'est un vrai monstre et il existe pour de vrai mais il n'y a que moi qui peux le voir. (...) Il peut avoir plein de formes différentes parce qu'il est polymorphe protéiforme. C'est ma maîtresse qui m'a appris ces deux mots qui veulent dire qu'on peut se transformer comme on veut. Ça l'a amusée que je lui pose des questions sur le pouvoir de transformation. Je lui ai dit que c'était au sujet d'un monstre. Elle a souri et elle m'a demandé si je le lui présenterais. J'ai dit non vu que ça pouvait être dangereux. Elle m'a répondu qu'elle comprenait et qu'elle attendrait que mon monstre soit apprivoisé. Ben c'est pas un chat, quand même, que je lui ai dit !

    Ce que j'en pense :

    C'est bien fait, l'auteur respecte les règles de la nouvelle, mais il manque l'essentiel, sauf dans la première et la dernière nouvelle. Tout cela semble assez formel. On a beaucoup de mal à faire corps avec les personnages, les situations. On se demande également pourquoi tout cela se situe aux USA (pour mieux attirer les lecteurs sans doute!)

    Noir américain

     

     

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