• Les petites filles respirent le même air que nous

    "Les petites filles respirent le même air que nous" de Paul Fournel - folio

    Présentation de l'éditeur :

    «On a joué à bleu-blanc-rouge. Quand la grosse Josiane s'est retournée pour nous surprendre, Maline s'est statufiée. Elle reste, bras écartés, bouche ouverte et jambe en l'air, comme une danseuse pataude. Les autres sont immobiles, au garde-à-vous. On jurerait qu'elles n'ont pas bougé. Madeleine quitte brusquement le jeu, sans raison ; elle s'ébroue, esquisse un ou deux mouvements de gymnastique et va pour rentrer en classe. En frôlant Maline, elle murmure : - Si la mort passe, tu resteras comme ça et on ne pourra même pas t'enterrer.» Dix petites filles inquiètes, dans dix-neuf nouvelles, qui jouent à cache-cache avec l'envie de grandir et la peur d'être grandes. Dix petites filles tendres dans les moments douloureux, ravissants ou magiques de leurs existences.

    Première page :

    "Elle avait essayé le côté gauche, le côté droit (celui de son cœur), elle s'était mise à plat ventre, elle avait embrassé son oreiller, elle était sur le dos les deux yeux grands ouverts ; plus ouverts encore qu'en plein jour, lui semblait-il. Elle tenait les mains croisées sur la poitrine. Entre les rideaux, passait une barre de lune qui coupait son lit en deux et touchait à peine celui de Thérèse, sa sœur. Elle dormait, elle. Chaque fois qu'elle inspi­rait, le coin du mouchoir à carreaux qui lui servait à dormir et à pleurer venait se coller un instant sur ses lèvres. Lorsqu'elle expirait, il flottait comme une algue.

    Au plafond, il y avait douze rosés par rangée, sauf vers la cheminée où il n'y en avait que dix ; au-dessus de la porte il n'en rentrait que deux."

    Ce que j'en pense :

    Livre paru en 1978 (trouvé dans une petite librairie indépendante : "La Gède aux livres" à Batz sur mer), donc très éloigné du "m'as-tu vu" des dernières rentrées littéraires. Il y a un côté à la fois poétique et cruel dans ces nouvelles mais elles vieillissent plutôt bien…

    Les petites filles respirent le même air que nous

    Les petites filles respirent le même air que nous

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Parures

    "Parures" de Franz Bartelt - Atelier In8

    Présentation de l'éditeur :

    Une mère et son jeune garçon vivent en HLM dans une cité Parures pouilleuse. Sans ressources mais obsédée par l'apparence et les vêtements, elle habille son fi ls avec sophistication, telle une star enfantine ou comme un acteur à sa disposition. Tout l’argent des allocations dispensé par la mairie est englouti dans des magasins de luxe. L’enfant est moqué par ses instituteurs et méprisé par les gamins du quartier. Jusqu’à ce qu’une assistante sociale impose le principe qui prévaut:
    les pauvres doivent ressembler à des pauvres. Les allocations de secours sont supprimées, et la mère perd pied, au bout du rouleau. On lui a volé son rêve.

    Première page :

    "Ailleurs, c'eût été différent, je le crois. En ville, par exemple. Ou dans un quartier convenable.

    Tout à l'heure, je me suis approché de la fenêtre, j'ai soulevé le carton qui remplace la vitre, geste machinal pour faire entrer un peu d'air frais dans la chambre.

    Maman est sur le lit. Elle ne dort pas. Nous avons toujours habité ce sale quartier. J'y suis né. Maman venait d'ailleurs. D'en ville. Il me semble.

    Au fond, rien n'est moins sûr : elle ne m'en a jamais parlé. J'ai seul choisi qu'elle vienne d'ailleurs. Pour expliquer. Pour comprendre.

    Dans la mesure, bien sûr, où il est utile de comprendre ce qu'on a vécu.

    Est-ce utile, de comprendre ? Autant vivre sans se poser de questions, comme les animaux. Avec de vraies souffrances, s'il faut souffrir : la faim, le froid, le mal de dents, la migraine, l'essoufflement, j'en passe. Je ne cite que les plus évidentes d'une liste de toute façon interminable, ici-bas. Elle contient déjà. de quoi meubler quelques vies intérieures. Certes, ce mobilier est rustique…"

    Ce que j'en pense :

    C'est une nouvelle moins drôle que parfois chez Bartelt. C'est plutôt cruelle et dérangeante, acide et finalement assez tragique. Bartelt est toujours aussi doué pour nous faire pénétrer dans cet univers où le pauvre doit ressembler à un pauvre.

    Parures

    Parures

    Parures

     

     

    __________


    votre commentaire
  • manuel de survie à l'usage des incapables

    "Manuel de survie à l'usage des incapables" de Thomas Gunzig - éditions au diable vauvert

    Présentation de l'éditeur :

    Né en 1970 à Bruxelles, nouvelliste traduit dans le monde entier, Thomas Gunzig est lauréat du prix Victor Rossel pour son premier roman, Mort d'un parfait bilingue, et du Prix des Éditeurs pour son recueil Le Plus Petit Zoo du monde (Au diable vauvert). 
    Chroniqueur à la radio RTBF, il écrit également pour la scène. Pour son troisième roman, le supermarché, dernier temple du monde moderne, a inspiré son humour ravageur et son sens de l'aventure.

    «Au début, il n'y avait rien.
    Ni espace, ni lumière, ni temps qui passe.
    Pas d'hier, pas de demain, pas d'aujourd'hui.
    Pire qu'un jour de grève.
    Pire qu'une rupture de stock.
    Rien d'autre que le rien, mais bon, le rien,
    c'était déjà pas mal.
    Le rien, ça laisse quand même des perspectives.»

    Première page :

    "Wolf regardait l'eau sombre chargée de morceaux de glace.
    Il ne pensait à rien d'autre qu'au vent froid qui lui attaquait le visage. Il n'avait pas vraiment mal et ce n'était pas bon signe : ça voulait dire que les parties supérieures de son épiderme étaient gelées, ça voulait dire que c'était comme des brûlures et que la douleur ne viendrait que plus tard, ce soir, quand il serait en train de s'endormir, et que tout ce qu'il pourrait faire, ça serait mendier des aspirines au Norvégien qui dormait sur la couchette d'à côté.
    Sur ce bateau, Wolf était le moins expérimenté de tous. Les autres employés avaient déjà fait ça plusieurs fois : embarquer en Irlande sur un gros baleinier industriel et puis remonter vers le nord-est, en direction de l'Islande, passer l'île Jan Mayen pour remonter vers le Spitzberg. À partir de là, en pleine mer polaire, le seul endroit où en vertu des accords passés entre la Commission baleinière internationale, l'Organisation mondiale du commerce et les juristes de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, on pouvait attendre de tomber sur une baleine et on pouvait la harponner."

    Ce que j'en pense :

    Ce monde décrit par l'auteur est fou (mais pas si éloigné de la réalité). C'est truffé d'ironie, de burlesque, de délire. C'est parfois violent et dérangeant mais c'est une vraie bonne surprise dans laquelle il faut se laisser embarquer.

    manuel de survie à l'usage des incapables

    manuel de survie à l'usage des incapables

    manuel de survie à l'usage des incapables

     

    __________


    votre commentaire
  • Ecoute la pluie

    "Ecoute la pluie" de Michèle Lesbre - Sabine Weispeser éditeur

    Présentation de l'éditeur :

    « Puis le ronflement sourd de la rame qui s’approchait à grande vitesse a provoqué un frémissement parmi les rares voyageurs. Le vieil homme s’est tourné vers moi avec toujours ce sourire limpide, j’ai cru qu’il allait me demander quelque chose, mais il a sauté sur les rails comme un enfant qui enjambe un buisson, avec la même légèreté. » Avant que le vieil homme ne se jette sur la voie en lui adressant son dernier sourire, la narratrice partait rejoindre l’homme qu’elle aime à l’hôtel des Embruns. Le choc a fait tout basculer. Plutôt que d’aller à la gare, elle s’enfonce dans les rues de Paris pour une longue errance nocturne sous l’orage. Revenue chez elle au petit matin, toujours incapable d’expliquer à son amant pourquoi elle n’était pas au rendez-vous, elle murmure à son intention le récit de sa nuit blanche. Lui, le photographe pour qui les mots ne sont jamais à la hauteur, sera-t-il capable de comprendre l’énigmatique message qu’elle finit par lui laisser : « Écoute la pluie » ? Avec ce roman dense et bouleversant, Michèle Lesbre poursuit une œuvre lumineuse qu’éclaire le sentiment du désir et de l’urgence de vivre.

    Première page :

    "Lorsque j’ai jeté un œil sur ma montre, hier soir, il était grand temps que je quitte l’agence. J’ai couru jusqu’à la station de métro, je ne voulais pas rater le train pour te rejoindre à l’hôtel des Embruns. Je pensais que, de ton côté, tu étais peut-être sur le chemin de la gare de Nantes. J’essayais de t’imaginer, sac noir sur le dos et petite valise. Depuis que nous ne vivons plus dans la même ville, quelques terrains vagues se faufilent entre nous, ceux de nos imaginaires, qui parfois me font peur. Où es-tu dans l’instant même où je pense à toi, à qui parles-tu ? Pourtant j’aime ces zones d’ombre, elles nous permettent de ne pas laisser l’ennui et l’habitude nous grignoter peu à peu.

    Sur le quai du métro, il n’y avait que quelques voyageurs et un vieil homme près duquel je me suis arrêtée. Il portait un imperméable beige et tenait une canne. Sur l’autre quai, une publicité pour des sous-vêtements masculins révélait le corps lisse et hâlé d’un jeune athlète, peut-être ai-je un souvenir précis de cette affiche à cause du petit homme voûté, de sa canne, de ce face-à-face insolite."

    Ce que j'en pense :

    C'est très bien écrit. Le début est d'une grande force mais la suite est plus laborieuse. Heureusement que le roman est court sinon l'ennui m'aurait guetté car l'introspection tourne un peu en rond.

    Ecoute la pluie

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Fugue

    "Fugue" de Anne Delaflotte Mehdevi, éditions Gaïa

    Présentation del'éditeur :

    Madeleine s'enfuit de l’école le jour de la rentrée. Sa mère, folle d'angoisse, crie sa terreur le long de la rivière. Sa fille est saine et sauve mais Clothilde y perd la voix. Elle consulte, refuse les traitements, se heurte à l’incompréhension des proches, mari père amie. Sa voix perdue, c'est le chant lyrique qui la lui redonnera. Car la voix chantée de Clothilde est d'une beauté peu commune, sublime.

    Première page :

    "Clothilde était au jardin, elle y taillait un buis auquel elle donnait une forme ronde. La musique, qui lui parvenait du salon par la baie laissée ouverte, accompagnait son geste, précis et délicat, du bout des lames. L'Art de la fugue en était au XIVe contrepoint. Quand la musique de Bach cessa au milieu de cette partition dont il n'avait pas écrit la fin, Clothilde continua à sculpter dans le silence.
    Concentrée sur l'arbuste, elle ne perçut d'abord que les mouvements de va-et-vient impatients de son chien blanc sur le fond vert des charmilles. Elle se redressa pour en chercher la cause et c'est alors qu'un filet de brise lui fit parvenir l'appel. Elle s'extirpa du dédale de parterres de fleurs rampantes qu'elle laissait empiéter sur les allées et décrocha enfin. C'était juste avant midi, jour de rentrée scolaire.
    La directrice de l'école demandait à la jeune mère de venir la rejoindre de toute urgence. Clothilde pensa que quelque chose n'allait pas avec ses jumeaux. Adèle avait-elle déclaré la guerre à l'institution ? Dès sa première rentrée ? Elle siffla Beau et le grand chien blanc des Pyrénées se colla comme une ombre à sa maîtresse. Ils s'engouffrèrent dans la voiture pour rejoindre l'école. Quittant les hauteurs du village pour gagner le pied de la colline à l'opposé du bourg, Clothilde nota en bas dans la plaine un banc de brouillard toujours accroché au lit de la rivière, une traîne blanche, comme un cumulus tombé des nues.
    Devant l'école, attendait la directrice, le dos voûté, les mains nouées l'une à l'autre. Noués les doigts de cette femme, nouvelle ici, qui voulait que l'on mît Beau en laisse. Mettre Beau en laisse !"

    Ce que j'en pense :

    C'est un très beau sujet : rechercher sa voie, retrouver sa voix, découvrir une nouvelle voix avec le chant. Par moment cela fonctionne mais le plus souvent on s'ennuie un peu : trop de détails sur l'orthophonie, le chant, comme si l'auteure voulait nous montrer qu'elle s'était bien documentée en la matière. Les personnages du mari, du père et de l'amie manquent de relief. Le style est parfois très poétique mais peut aussi sonner assez faux dans certains dialogues.

    Fugue

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Le congélateur

    "Le congélateur" de Pascale Dietrich - Les éditions In8

    Présentation de l'éditeur :

    Une bouteille de coca, une vieille Peugeot 306 et son thermos de café, un caddie bourré de surgelés jusqu'à la gueule… ne vous fiez pas aux apparences : ces objets inoffensifs masquent de terribles crimes. La famille, c’est sacré : que ne ferait-on pour la défendre ? Dans ces quatre histoires drolatiques, les troubles affectifs se déguisent sous des délires consuméristes.
    Pascale Dietrich croque notre société contemporaine avec une ironie gourmande. Mais elle fait preuve d’une intelligence diabolique pour le poison. Des histoires courtes aussi pétillantes que redoutables.

    Extrait de "Jean-Pierre":

    "Cela faisait six mois que j'étais enceinte. Le terme approchait lentement, mais sûrement. Avec Mathieu, comme la plupart des futurs parents, nous étions tout excités à l'idée de voir naître ce bébé. Nous ne parlions pratiquement plus que de ça et avions déjà tout préparé : la chambre, les layettes, la table à langer... Jusqu'à présent, nous étions sur la même longueur d'onde pour à peu près tout : nous pensions tous les deux qu'il fallait que notre fils bénéficie de l'allaitement maternel, d'une éducation douce mais stricte, et puis, concernant le choix du prénom, nous étions d'accord pour trouver quelque chose de moderne, mais pas trop m'as-tu-vu ni trop excentrique. Cette fin de maternité aurait donc très bien pu se passer, si le père de Mathieu n'avait pas eu la mauvaise idée de mourir subitement, broyé dans un accident de bus. Ça lui a fait un choc, à Mathieu. Pendant une semaine, il n'a pas mis le nez dehors et n'a rien avalé. Finalement, quand il est sorti de son mutisme, il avait pris une décision ferme et définitive, pour la première fois sans me concerter : son fils (le nôtre !) porterait le prénom de son père, en hommage. Sur le principe, je n'avais rien contre."

    Ce que j'en pense :

    C'est la femme (en particulier la mère) qui est au centre de ces histoires. Il y a de l'ironie, du sourire dans chacune de ces nouvelles. Je conseille particulièrement "Jean-Pierre" .

    Le congélateur

    Le congélateur

    Le congélateur

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Deux dans Berlin

    "Deux dans Berlin" de Birkefeld et Hachmeister - Editions du Masque

    Présentation del'éditeur :

    Hiver 1944. Dans un hôpital militaire, Hans Kalterer, un ancien des services de renseignements de la SS, se remet d’une blessure par balle et s’interroge sur son avenir. Il sait que la guerre est perdue et qu’il a besoin de se racheter une conscience. Il rejoint la police criminelle de Berlin où il est chargé d’enquêter sur le meurtre d’un haut dignitaire nazi. Dans le même temps, Rupert Haas s’évade de Buchenwald à la faveur d’un raid aérien et rejoint Berlin pour retrouver femme et enfant. Or leur immeuble a été bombardé et il ne reste plus rien. Il décide de se venger de ceux qui l’ont honteusement dénoncé et qui sont responsables de son malheur. Tandis que la ville disparaît sous les décombres et les cendres, commence une chasse à l’homme sans merci : Haas recherche et tue de sang froid, avec des méthodes dignes des pires nazis et Kalterer, entouré de vieux nazis corrompus et d’ennemis de la dernière heure d’Hitler, se lance à la poursuite du coupable – et d’une position qui lui assurerait un avenir commode

    Première page :

    "Les kapos s'étaient éloignés. Il entendait leurs rires, les voyait fumer au bord de la carrière. Ils jetèrent un coup d'œil au fond, firent des remarques méprisantes, reprirent enfin leur ronde. Plus personne ne lui prêtait attention. Épuisé, il s'adossa au wagonnet.

    Il en avait assez de s'abrutir au travail au fond de ce chaudron, harcelé par ses bourreaux qui le frappaient et lui crachaient dessus ; du lever au coucher du soleil, vêtu de haillons puants, sans trêve ni répit, sans avoir le temps de manger, de pisser, de murmurer même quelques mots.

    Il suivait des yeux le moindre mouvement des kapos, entendait encore leurs rires grossiers ; puis il les vit s'éloigner de plus en plus, s'arrêtant de nouveau et lançant des cailloux dans la carrière. C'était leur occupation favorite. Ils visaient ses camarades qui extrayaient des pierres de la paroi rocheuse, s'amusant ainsi à blesser ou tuer des êtres humains. Ce jeu s'appelait « tir-aux-pigeons-d'argile ».

    Il se détourna un instant, se couvrit la bouche de ses mains pleines d'ampoules, étouffant difficilement une quinte de toux.

    Surtout ne pas attirer l'attention."

    Ce que j'en pense :

    Intrigue intéressante qui se déroule dans un contexte très particulier (la fin de la guerre à Berlin sous les bombes). Les personnages, plutôt complexes, gardent une part d'ambiguïté. C'est un roman original construit dans un cadre historique instructif.

    Deux dans Berlin

    Deux dans BerlinDeux dans Berlin

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Le toucher de la hanche

    "Le toucher de la hanche" de Jacques Gamblin - Le Dilettante

    Présentation del'éditeur :

    Qu'est-ce que la valse ? Un moteur à trois temps à poser sur la machine humaine pour de grandes randonnées à deux, madame en selle, monsieur au guidon. Parfois aussi, une méthode pour raccommoder la porcelaine fêlée des amours maritaux. Les deux dont il s'agit dans ce mince et véloce traité de choréthérapie s'en sont sortis grâce à la valse, sont même devenus des étoiles au balai fameux. Las, un jour, ça grippe. Il y a une paille dans le couple, une poussière dans l'œil, du sucre dans l'essence.

    Première page :

    "LA VALSE c’est le maintien du couple. C’est l’ange gardien du ménage. Parce que vous avez des couples lui il va à la pêche elle va à la chasse et ils se perdent de vue. Que d’avoir un lien commun on est obligés de se voir. Étant obligés de se voir on est obligés de s’aimer. Étant obligés de s’aimer ça continue! Je ne dis pas que si je ne valsais plus on ne s’aimerait plus c’est trop tôt pour le dire. Je dis simplement que si je ne valse pas avec ma femme ce n’est pas le bonheur!

    Parce que vous avez des femmes qui me disent vous êtes champion j’aimerais bien valser avec un champion. Oui mais moi ce n’est pas le bonheur. Bien sûr je ne refuse pas. Je leur dis si vous voulez bien patienter je suis fatigué je viens de valser avec ma femme."

    Ce que j'en pense :

    C'est rythmé, on se laisse entraîner (même si on n'est pas danseur) par ce texte qui valse avec les mots, les émotions, l'humour. C'est parfois étrange, comme le Gamblin acteur.

    Le toucher de la hanche

    Le toucher de la hanche

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Éclats de 14

    "Éclats de 14" de Jean Rouaud, dessins de Mathurin Méheut - éditions dialogues

    Présentation de l'éditeur :

    " Tout a été dit et redit " – cette folie par laquelle des vieillards qui ne combattront pas décident d'envoyer leurs fils à la mort, la stratégie suicidaire de l'état-major prônant l'offensive qui mène des centaines de milliers d'hommes à l'abattoir : " cet ajustement des temps, en catastrophe, c'est ce qu'on appelle la guerre. " Tout a été dit, mais personne ne l'a dit comme Jean Rouaud. Personne n'a dit l'absurde, l'horreur, l'inhumanité, le gâchis, avec cette précision de la langue qu'on lui connaît. Avec acuité. En un texte court, l'auteur des Champs d'honneur décline la guerre sous les quatre éléments de l'univers : la terre, le feu, l'eau, l'air. Guerre mondiale, guerre démesurée. Que l'écriture enveloppe d'un éclat poétique. À quoi s'ajoute celui des dessins sur le vif – le mort saisit le vif – de Mathurin Méheut. Un beau livre en hommage.

    Extrait :

    "La der des ders il faut l'entendre aussi comme la dernière «victoire» d'une armée française. Elle ponctue la fin de ce qui a fait la France. Ce qu'on essaie de trouver en commémorant cette guerre, c'est quelque chose qui aurait trait à un passé d'avant le retrait du pays de la scène internationale, d'avant la crise identitaire. Ce dernier moment où la France aurait été glorieuse et, comme la République, une et indivisible. Ce qui est bien sûr une pure fiction. Ce qui, en ce sens, nous renseigne, cette commémoration la larme à l'œil, sur l'état présent du pays.

    Car ce que dit ce ressassement, c'est que quelque chose de l'histoire de la vieille nation s'est arrêté là. Comme si dans cet armistice claironnant du 11 Novembre célébrant une victoire à la Pyrrhus le pays voyait la fin de son histoire, laquelle se scelle d'une manière moins glorieuse au mois de juin 1940, et qu'ensuite, retiré dans une certaine idée de lui-même, faisant l'impasse sur ces quatre années où il s'était donné à l'Allemagne nazie, il n'avait plus rien à célébrer que la dernière étincelle de sa gloire d'antan."

    Ce que j'en pense :

    Rouaud "écrit" cette guerre avec précision, avec émotion mais sans complaisance. Et nous ressentons, grâce au texte et aux images de Mathurin Méheut, toute l'absurdité, l'horreur, l'inhumanité et l'immense gâchis de cette "der des der". À lire absolument pour que toutes les commémorations résonnent d'une autre façon.

    Éclats de 14

    Éclats de 14Éclats de 14Éclats de 14

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Histoire d'Alice qui ne pensait jamais à rien (et de tous ses maris plus un)

    "Histoire d'Alice qui ne pensait jamais à rien (et de tous ses maris plus un) de Francis Dannemark -Robert Laffont

    Présentation de l'éditeur :

    Paul a cinquante-six ans. Il vient de perdre sa mère. À son enterrement, il rencontre la sœur de celle-ci pour la première fois. Il ne connaît d'elle que son prénom, Alice. À soixante-treize ans, sa tante ne lui apparaît pas comme une vieille dame. Elle est séduisante, un peu mystérieuse et, surtout, pleine de vie et de fraîcheur. Elle invite son neveu à venir la voir à son hôtel et là, en face à face, elle va lui raconter son incroyable existence. Alice fait partie de ces êtres rares qui ont vécu dix vies en une seule. Et s'il est vrai que tous les hommes sont mortels, les maris d'Alice le sont tout particulièrement : elle est veuve pas moins de huit fois ! 

    Extrait :

    "- Oui, précisément. Il y a des gens qui voyagent parce qu'ils ont toujours rêvé de voyager. Moi pas. C'est juste la vie qui a fait ça. M'emmener ici et puis là. Je ne me suis pas posé de questions. Je ne m'en étais pas non plus posé quand Henri avait voulu m'épouser alors qu'il avait deux fois mon âge.

    - À cette époque, c'était peut-être moins gênant que ce ne le serait maintenant.

    Alice a souri et s'est penchée légèrement vers moi.

    - J'ai l'impression que tout est gênant aujourd'hui..., a-t-elle dit à voix basse. Les gens peuvent tout faire, tout dire, il y a tellement de règles qu'il n'y en a plus, mais on dirait qu'ils marchent comme dans ces vieux films policiers, tu sais, quand quelqu'un se sent suivi, une nuit, dans une rue sombre, et qu'il s'arrête tout le temps et se retourne et se remet à avancer en marchant plus vite. Et quand il est enfin chez lui, il ne dort que d'un œil... Avec Henri, je dormais très bien. Il dégageait une chaleur de moteur de camion et j'adorais disparaître dans ses bras. J'avais quand même eu très froid l'hiver où nous sommes arrivés. Mais ce n'était rien à côté de dormir sans lui, durant le deuxième hiver qui a suivi..."

    Ce que j'en pense :

    Lecture agréable, un bon moment à passer en compagnie de cette "veuve joyeuse". C'est bien écrit, rempli de bonne humeur, léger (parfois un peu trop).

     Histoire d'Alice qui ne pensait jamais à rien (et de tous ses maris plus un)Histoire d'Alice qui ne pensait jamais à rien (et de tous ses maris plus un)

     

    __________


    votre commentaire