-
"La plus précieuse des marchandises, un conte" de Jean-Claude Grumberg - Seuil
Présentation de l'éditeur et première page :
Il était une fois, dans un grand bois, une pauvre bûcheronne et un pauvre bûcheron.
Non non non non, rassurez-vous, ce n’est pas Le Petit Poucet ! Pas du tout. Moi-même, tout comme vous, je déteste cette histoire ridicule. Où et quand a-t-on vu des parents abandonner leurs enfants faute de pouvoir les nourrir ? Allons...
Dans ce grand bois donc, régnaient grande faim et grand froid. Surtout en hiver. En été une chaleur accablante s’abattait sur ce bois et chassait le grand froid. La faim, elle, par contre, était constante, surtout en ces temps où sévissait, autour de ce bois, la guerre mondiale.
La guerre mondiale, oui oui oui oui oui.Ce que j'en pense :
Voilà, sous forme de conte, un livre qui nous rappelle de cruelles réalités historiques. C’est écrit de façon originale, souvent ironique mais toujours émouvante. C’est un livre parfaitement compréhensible, à mettre entre toutes les mains, pour ne pas oublier que tout ne finit pas aussi bien que dans les contes.
__________
votre commentaire -
"Bondrée" de Andrée A. Michaud - Rivages/Noir
Présentation de l'éditeur :
À l’été 67, une jeune fille disparaît dans les épaisses forêts entourant Boundary Pond, un lac aux confins du Québec rebaptisé Bondrée par un trappeur enterré depuis longtemps. Elle est retrouvée morte, sa jambe déchirée par un piège rouillé. L’enquête conclut à un accident : Zaza Mulligan a été victime des profondeurs silencieuses de la forêt. Mais lorsqu’une deuxième adolescente disparaît à son tour, on comprend que les pièges du trappeur ressurgissent de la terre et qu’un tueur court à travers les bois de Bondrée.
Une écriture raffinée au service d’atmosphères angoissantes et de subtiles explorations psychologiques, dans la plus pure tradition de Twin Peaks de David Lynch.Première page :
"Bondrée est un territoire où les ombres résistent aux lumières les plus crues, une enclave dont l’abondante végétation conserve le souvenir des forêts intouchées qui couvraient le continent nord-américain il y a de cela trois ou quatre siècles. Son nom provient d’une déformation de « boundary », frontière. Aucune ligne de démarcation, pourtant, ne signale l’appartenance de ce lieu à un pays autre que celui des forêts tempérées s’étalant du Maine, aux États-Unis, jusqu’au sud-est de la Beauce, au Québec. Boundary est une terre apatride, un no man’s land englobant un lac, Boundary Pond, et une montagne que les chasseurs ont rebaptisée Moose Trap, le Piège de l’orignal, après avoir constaté que les orignaux s’aventurant sur la rive ouest du lac étaient vite piégés au flanc de cette masse de roc escarpée avalant avec la même indifférence les soleils couchants. Bondrée comprend aussi plusieurs hectares de forêt appelés Peter’s Woods, du nom de Pierre Landry, un trappeur canuck installé dans la région au début des années 40 pour fuir la guerre, pour fuir la mort en la donnant. C’est dans cet éden qu’une dizaine d’années plus tard, quelques citadins en mal de silence ont choisi d’ériger des chalets…"
Ce que j'en pense :
Voilà un polar très original à la fois sur la forme et sur le fond. Au début on peut être surpris par l’écriture qui mêle québécois et américain mais cela fait partie de l’atmosphère voulue par l’auteure. L’intrigue se situe à la frontière américano-québécoise. L’écriture, que l’on peut qualifier d’hybride, traduit bien cette diversité linguistique des protagonistes. Tous les personnages sont étonnants et admirablement campés. J’ai particulièrement apprécié les chapitres où l’auteure donne la parole à Andrée (même prénom que l’auteurs !) une petite fille avec un regard poétique et décalé. C’est rare de lire un polar aussi merveilleusement écrit.
__________
votre commentaire -
"Pense aux pierres sous tes pas" de Antoine Wauters - Verdier
Présentation de l'éditeur :
Dans un pays dont on ignore le nom, où se succèdent des dictateurs qui tentent de le moderniser, une sœur et son frère jumeau vivent à la ferme de leurs parents, au milieu des plaines.
Marcio travaille aux champs avec le père, un homme violent, tandis que Léonora s’occupe de la maison avec sa mère. Ils ont douze ans à peine et leur complicité semble totale, leurs jeux interdits irrépressibles. Mais un soir, alors que leurs corps se rapprochent doucement dans le fenil, le père surgit et voit se confirmer ce qu’il a toujours suspecté.
Tandis qu’un nouveau coup d’État vient de se produire, les parents décident de séparer les jumeaux. Commence alors un combat long et incertain, celui de la réinvention de soi et de la quête obstinée de liberté.
Véritable hymne à la désobéissance, Pense aux pierres sous tes pas est également un cri d’espoir. Et d’amour fou.
Première page :
"Le déguisement
On était nés jumeaux, pourtant mon frère avait toujours été comme un aîné pour moi. Parce qu’il était le garçon et devait s’occuper des cheptels avec Paps, il partait le matin dans les vallées pleines de brume où il n’y avait pas le moindre habitant, mais une forte présence de fleuves. Et, à la seule évocation de ces choses, moi qui n’en pouvais plus d’être enfermée, d’entendre Mams me reprendre de volée quand je rêvais au lieu de l’aider, que j’étais seule et que je rêvais, que je pensais à lui, à mon frère, mon ventre se craquelait d’envie: je rêvais de m’enfuir avec eux et, comme eux, de toucher le ventre des bêtes. L’immensité. Le ciel et les moissons et les sommets.
Tous les deux, on était encombrants pour eux, et on l’avait toujours été. Au point que Paps aurait préféré ne pas nous avoir et rester toute sa vie comme ça, avec Mams, qui le rendait complètement dingue avec ses hanches en montagne de massepain et ses seins lourds toujours luisants.
Pour autant, je ne crois pas qu’il nous détestait. Mais le seul fait de nous voir courir devant lui, et parfois simplement de nous entendre, l’irritait à la puissance mille: il mettait des coups de pied dans les chaises, cassait des vases, hurlait, puis se taillait pendant des heures on n’a jamais su où.
Pauvre Paps."
Ce que j'en pense :
Dans ce drôle de roman le lecteur est entrainé dans du burlesque, du poétique, du fantastique, du politique… C’est parfois complètement déjanté à la manière d’un conte utopiste vu à travers les yeux de l’enfance. On peut aussi penser à la traversée des déserts, mythe biblique, recherche d’une nouvelle vie. Et si c’était cela l’avenir de notre planète : revenir à du petit, du local, retrouver une vraie citoyenneté ?
__________
votre commentaire -
"L'enfant qui" de Jeanne Benameur - actes sud
Présentation de l'éditeur :
Trois trajectoires, trois personnages mis en mouvement par la disparition d'une femme, à la fois énigme et clé. L'enfant marche dans la forêt, adossé à l'absence de sa mère. Il apprend peu à peu à porter son héritage de mystère et de liberté. Avec un chien pour guide, il découvre des lieux inconnus. A chaque lieu, une expérience nouvelle. Jusqu'à la maison de l'à-pic. Le père, menuisier du village, délaisse le chemin familier du Café à la maison vide. En quête d'une autre forme d'affranchissement, il cherche à délivrer son corps des rets du désir et de la mémoire. Et puis il y a la grand-mère, qui fait la tournée des fermes voisines, dont le parcours encercle et embrasse le passé comme les possibles. Porté par la puissance de l'imaginaire, L'Enfant qui raconte l'invention de soi, et se déploie, sensuel et concret, en osmose avec le paysage et les élans des corps, pour mieux tutoyer l'envol.
Première page :
"Dans ta tête d’enfant, il y a de brusques ciels clairs arrachés à une peine lente, basse, impénétrable. Ta mère a disparu. Elle avait beau ne jamais être complètement là, c’est à son odeur, à sa chaleur, à ses mains silencieuses que tu prenais appui pour sentir que tu existais vraiment. Maintenant tu te tiens comme tu peux. Sur une crête. D’un côté, les cris du père. De l’autre, le silence. Abrupt. Toute ta vie désormais au bord de quelque chose qui n’a pas de nom. Dans le monde, ta place s’est réduite. Est-ce qu’elle va s’amenuiser encore? Faudra-t-il pour y tenir que tu te réduises juste à un point? À un trait? Tu ne connais pas encore les peintures des maîtres chinois, l’encre déposée par le pinceau, à peine une trace, et le vide. Si tu les connaissais, tu sau - rais que maintenant, c’est toi. Mais il y a ton corps. Même si tu t’apprends à respirer en laissant le moins d’air possible entrer entre tes côtes. Tous tes os sont là…."
Ce que j'en pense :
J’aime beaucoup les livres de Jeanne Benameur mais pour celui-ci je suis un peu réservé. L’écriture est toujours aussi magnifique mais elle ne me touche pas vraiment… comme si la forme prenait le pas sur le fond, l’impression de lire presque du Bobin sans beaucoup d’émotion. Et pourtant les premières pages m’avaient mis en bel appétit !
__________
votre commentaire -
"Sous l'aile noire des rapaces" de Pierre Siniac - Rivages noir
Présentation de l'éditeur :
Juin 1940. Les Allemands avancent sur Paris. Les ministères ont quitté la capitale et la Banque de France a évacué ses réserves d'or. Mais, par une erreur de libellé sur un bordereau, deux tonnes d'or sont restées dans une chambre forte de Saint-Ouen. Il faut trouver un fourgon blindé et les évacuer en toute hâte. Deux tonnes d'or en balade sur les routes bloquées par l'exode des populations, bombardées et mitraillées par l'aviation ennemie, c'est le coup rêvé pour une bande d'aventuriers qui veulent profiter de la débâcle pour prendre un nouveau départ, quitte à mener leur propre guerre à côté de l'officielle. Mais la mort n'oublie personne... Entre Les douze salopards, Le salaire de la peur et Le bon, la brute et le truand, un grand roman d'aventures et de suspense. Sous l'aile noire des rapaces a été publié en 1975 par les éditions Lattès sous le titre L'Or des Fous.
Première page :
"Aberschweiller
Vingt-quatre heures d'attente dans l'appartement obscur. Une nappe de silence avait envahi peu à peu l'immeuble. L'oreille collée à la porte du palier, son revolver Mauser 7,65 mm au poing, Aberschweiller avait perçu les bruits accompagnant chaque départ : défilés dans l'escalier, familles encombrées de bagages, adieux entre locataires. La réplique de ce qui se passait dans l'immeuble était visible sur les façades d'en face où, en quarante-huit heures, les neuf dixièmes des persiennes s'étaient fermées, en plein jour, pour ne plus bouger.
Le 4 juin, une autre tragédie en toile de fond, les ennuis avaient commencé pour Aberschweiller. Le fait d'avoir été quelque peu mêlé à l'affaire Weidmann et d'avoir tiré habilement son épingle du jeu avait enhardi l'ancien catcheur sarrois. Weidmann, il avait été à deux doigts de marcher avec lui. Il avait trempé dans des combines de contrebande de tabac en Sarre où il s'était lié avec le receleur Roger Million. Il avait même été plusieurs fois des partouzes de La Voulzie. Puis, entre 38 et le printemps 40, il s'était mis à faire ses petits coups en solo."
Ce que j'en pense :
On est loin des meilleurs livres de Siniac. On a l’impression d’être plutôt dans « La grande vadrouille » que dans un roman noir. Rien de réaliste dans ce roman, malgré un regard parfois original sur l’exode de l’été 1940. Les péripéties ne manquent pas, il n’y a même que cela ! Reste toutefois l’anarchisme rampant de Siniac qui transparait dans ces aventures.
__________
votre commentaire -
"Bien connu des services de police" de Dominique Manotti - folio policier
Présentation de l'éditeur :
Été 2005 à Panteuil, en banlieue parisienne, l’ambitieuse commissaire Le Muir a décidé d’appliquer la «nouvelle politique sécuritaire» prônée par le ministre de l’Intérieur. Sur le terrain, les policiers s’arrangent comme ils le peuvent avec la réalité des cités et de leurs petits trafics. Des jeunes flics fraîchement débarqués aux vétérans de la BAC de nuit, tous sont confrontés à la violence et à la peur. Il suffit d’un incendie dans un squat de sans-papiers, d’une bavure ou de quelques vols de voitures pour que Panteuil s’embrase…
Première page :
"La voiture roule au ralenti, phares allumés, dans les ruelles désertes d’un quartier d’entrepôts à la périphérie nord de Paris. À cette heure tardive, au milieu de la nuit, l’ambiance de ce coin de banlieue est sinistre: grilles fermées sur des cours encombrées de détritus, rideaux de fer baissés et tagués, pavés défoncés, trottoirs effondrés, lampadaires éteints, silhouettes massives et noires des entrepôts, tassés les uns contre les autres. Le silence, l’immobilité sont tels que toute présence humaine évoluant à l’air libre ne pourrait être perçue que comme une menace. Dans l’habitacle de la voiture, faiblement éclairé, trois hommes, le chauffeur et ses deux passagers. Ils se ressemblent. Jeunes, costauds, cheveux ras, blousons de toile légère, jeans et baskets. Leurs gestes, leurs mots, leurs silences s’accordent, bouts de phrases sans importance, chewing-gums, rires, regards traînant aux alentours, dans une familiarité décontractée. Une radio grésille en bruit de fond sans que personne n’y prête attention. On se rapproche de Paris. Un cube de béton, coincé entre la zone d’entrepôts et le boulevard périphérique, apparaît au détour d’une ruelle."
Ce que j'en pense :
Comme d’habitude chez l’auteure c’est merveilleusement documenté, presque à la façon d’une historienne. On sent que derrière la fiction (bien ficelée) il y a une terrible réalité. Manotti nous fait pénétrer de façon réaliste à l’intérieur d’un commissariat et ce n’est pas très réjouissant car tout est plausible (et on peut même reconnaître certains personnages de la « vraie vie »).
__________
votre commentaire -
"Un silence brutal" de Ron Rash - Gallimard
Présentation de l'éditeur :
Dans ce coin des Appalaches, entre rivière et montagnes, que l'œuvre de Ron Rash explore inlassablement depuis Un pied au paradis, un monde s'efface devant un autre : à l'enracinement des anciens à leur terre succède la frénésie de profit des entrepreneurs modernes.
Le shérif Les, à trois semaines de la retraite, et Becky, poétesse obsédée par la protection de la nature, incarnent le premier. Chacun à sa manière va tenter de protéger Gerald, irréductible vieillard, contre les accusations de Tucker, propriétaire d'un relais pour riches citadins curieux de découvrir la pêche en milieu sauvage. Dans leur esprit, Gerald est incapable d'avoir versé du kérosène dans l'eau, provoquant la mort des truites qu'il aime tant. Mais alors, qui est le coupable?
La voix de Becky incarne la poésie infinie de la prose de Ron Rash, dont la colère s'exprime dans la description des ravages de la meth, fléau des régions frappées par le chômage et délaissées par les pouvoirs publics.Première page :
"Alors que le soleil colore encore les montagnes, des êtres aux ailes de cuir noir tournoient déjà à faible hauteur. Les premières lucioles clignotent, indolentes. Au-delà de cette prairie des cigales s'emballent et ralentissent comme autant de machines à coudre. Tout le reste paré pour la nuit, hormis la nuit elle-même. Je regarde l'ultime lueur s'élever au-dessus de la rase campagne. Au sol des ombres suintent et s'épaississent. Des arbres en cercle forment des rives. La prairie se mue en étang qui s'emplit, à la surface des dizaines de suzannes-aux-yeux-noirs.
Je m'assieds sur un sol qui fraîchit, bientôt humide de rosée. Près de moi une charrue à versoir abandonnée de longtemps. Des lianes de chèvrefeuille enroulent leurs verts cordons, des fleurs blanches accrochées là comme de petites ampoules de Noël. J'effleure un manche qu'ont poli rotations de poignet et suantes étreintes. Le souvenir des mains de mon grand-père, rondes de cals et aussi lisses que des pièces de monnaie usées. Un matin je l'avais regardé parcourir le champ, la rame d'acier faisant onduler la terre"
Ce que j'en pense :
Beaucoup de sensibilité, de poésie, d’amour de la nature et d’empathie pour ses personnages… comme d’habitude dans les romans de Ron Rash. Mais il manque quelque chose pour retrouver la force d’autres romans de l’auteur, comme dans « Une terre d’ombre » ou « Par le vent pleuré ». J'ai pensé que cela pouvait être du à la traduction mais c'est toujours la même traductrice... je vais donc attendre le prochain roman de l'auteur en espérant que je retrouverai le souffle des autres récits.
__________
votre commentaire -
"La tournée" de Andi Watson - ça et là
Présentation de l'éditeur :
G.H. Fretwell, un petit auteur de romans peu connus, vit dans une petite ville anglaise, avec sa femme, Rebecca, qui ne lui prête pas une grande attention. Son nouveau roman, Sans K, vient de sortir et Fretwell se lance dans une tournée de rencontres en librairie pour en faire la promotion. Plus ou moins bien accueilli dans les librairies de son circuit, Fretwell ne réussit jamais à signer le moindre livre et passe des journées à arpenter des ruelles pour trouver son chemin. Délaissé par son éditeur qui a manifestement d'autres chats à fouetter, il attend impatiemment la parution d'une recension de Sans Kdans la rubrique littéraire d'un grand quotidien, chronique qui ne viendra jamais.
Les ennuis de Fretwell commencent quand il est interrogé par la police à propos d'une valise volée car son circuit est étrangement similaire à celui du « Tueur à la valise », un tueur en série qui sévit à ce moment là. Fretwell va progressivement comprendre que la police le soupçonneExtrait :
Ce que j'en pense :
Voilà une BD qui parait assez minimaliste par le dessin et les dialogues, mais qui ne manque pas d’humour (noir, pince sans rire, « so british »…). L’auteur nous plonge dans un univers kafkaïen entre non sens et angoisse. J’aurai aimé un format plus grand qui aurait donné encore plus de force à certains dessins.
__________
votre commentaire -
"Anatomie de l'amant de ma femme" de Raphaël Rupert - L'arbre vengeur
Présentation de l'éditeur :
A trop fréquenter la littérature, il arrive qu’on tombe dedans. Lecteur invétéré, époux d’une écrivaine nantie d’un petit renom, architecte en rupture de plans, le héros de ce premier roman n’est pas avare de confidences sur son grand projet : écrire un livre, lui aussi.
Mais son écran d’ordinateur ne se remplit que d’images qui ralentissent son travail tout en accélérant son flux sanguin…Les affres de la création deviennent de terribles compagnons dont on se distrait d’un poignet actif.
Alors, le jour où par ennui ou par dépit, notre homme commet l’incorrection de parcourir le journal intime de sa femme, il en est puni par une découverte qui porte un nom : Léon, et par une révélation : c’est un amant hors normes.
Affolé, vexé mais stimulé, il se lance dans une enquête qui a tout d’une quête : pourquoi chez lui sexualité et littérature sont-elles autant liées ? Cet amateur de théories cocasses s’épanche et nous entraîne, l’air de rien, dans la dernière des grandes aventures : celle qui mène à soi.
Un livre réjouissant avec des hauts, débats, et quelques ébats.
Première page :
"À MIDI, JE SUIS ALLÉ faire un tour et je me suis souvenu de quelque chose concernant les débuts de roman. Plus précisément l’introduction des personnages principaux dans un récit. L’auteur se sent parfois tenu de justifier le choix de l’identité qu’il a réservée à ses personnages. Une anecdote relative à la genèse du patronyme, ou à sa sonorité, illustre pourquoi Machin s’appelle Machin et pas MachinChose. Et plus l’anecdote semble crédible, plus l’auteur essaie, dans un effort un peu vain, de justifier son choix, le choix de la première pierre sur laquelle va s’appuyer tout l’édifice de sa fiction.
Car en effet, pourquoi Paul plus que Jacques, pourquoi Estelle plus que Marion ? Et pourquoi Machin plus que MachinChose ?
La sonorité, la sociologie, bien sûr, guident le choix de l’auteur. Un Jean-Jacques, un Jacky feront mauvaise figure pour un entrepreneur du web de 25 ans issu des beaux quartiers, alors qu’un Théo ou un Ferdinand feront parfaitement l’affaire."
Ce que j'en pense :
Dans ce livre il y a des choses originales, drôles, inventives, plutôt (dé)culottées et quelques réflexions intelligentes sur l’écriture, la fiction et les écrivains. Mais au fil des pages on se lasse de toujours tourner autour du même sujet : la bite et les pets !
________
votre commentaire -
"Les gratitudes" de Delphine de Vigan - JCLarrès
Présentation de l'éditeur :
Michka est en train de perdre peu à peu l’usage de la parole. Autour d’elles, deux personnes se retrouvent : Marie, une jeune femme dont elle est très proche, et Jérôme, l’orthophoniste chargé de la suivre.
Première page :
"Vous êtes-vous déjà demandé combien de fois par jour vous disiez merci? Merci pour le sel, pour la porte, pour le renseignement.
Merci pour la monnaie, pour la baguette, pour le paquet de cigarettes.
De merci de politesse, de convenance sociale, automatiques, mécaniques. Presque Vides.
Parfois omis.
Parfois exagérément soulignés: Merci à toi. Merci pour tout. Merci infiniment.
Grand merci.
Des merci de profession: Merci pour votre Réponse, attention Votre collaboration de Votre.
Vous êtes-vous déjà demandé combien de fois dans votre vie aviez-vous vraiment dit? Un vrai merci. L'expression de votre gratitude, de votre reconnaissance, de votre dette.
À qui?
Au professeur qui vous guidé vers les livres? A jeune homme qui est intervenu le jour où vous avez été agressé dans la rue? Au médecin qui vous a sauvé la vie?"
Ce que j'en pense :
Le sujet du livre est intéressant, les personnages sont touchants mais je ne suis jamais complètement entré dans ce roman, comme si l’autrice restait à la surface des choses, sans doute engluée par trop de « bons sentiments ». Certaines parties sont plus fortes, en particulier lorsqu’elle relatent des rêves sans que l’on sache vraiment si c’est ou non la réalité.
__________
votre commentaire