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"Ces féroces soldats" de Joël Egloff - Buchet Chastel
Présentation de l'éditeur :
Dans ce récit, Joël Egloff retrace l'histoire singulière et tumultueuse de sa famille durant la seconde guerre mondiale, en Moselle annexée. Pièce par pièce, il entreprend de reconstituer le puzzle de l'enfance et de l'adolescence de ses parents sous le joug nazi. En entrelaçant la petite histoire et la grande, il évoque ces années noires et retrace le périple tragique de son père, à travers l'Europe, incorporé de force par l'ennemi, à dix-sept ans, puis envoyé au front, contre son propre camp, sous le pire des uniformes.
A hauteur du regard de l'enfant qu'il a été, Ces féroces soldats dépeint cette guerre dans toute son ironie macabre et la quintessence de son absurdité
Première page :
Je voudrais cette lettre. Elle doit être quelque part dans la maison, c’est sûr. Où pourrait-elle être, sinon ?
Je l’ai eue entre les mains, pourtant, cela fait des années, et c’est moi qui l’ai rangée, je ne sais où. Elle était à la cave, auparavant, dans une vieille boîte à chaussures sans couvercle, au-dessus de l’armoire à conserves. C’est là qu’elle se trouvait depuis trop longtemps, livrée aux araignées. Je l’avais lue, puis l’avais remontée à l’étage, pour la mettre à l’abri de la poussière.
Dans la même boîte se trouvaient trois grands carnets noirs. Des agendas, des livres de comptes de la petite épicerie que tenait ta mère, avant la guerre. Une épicerie sans vitrine et sans horaires, dans une maison au pied de la côte qui montait vers l’église.
Ce que j'en pense :
Un récit bouleversant qui montre l’absurdité des guerres. L’auteur parle de ses parents (surtout de son père) avec beaucoup de tendresse, de retenue et d’émotion. Il sait nous faire partager ce que ces « Malgré nous » ont pu vivre lors de cette drôle d’époque. L’écriture est simple, délicate et nous entraîne de façon émouvante dans cette histoire familiale.
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"Papi Mariole" de Benoit Philippon - Albin Michel
Présentation de l'éditeur :
« Bon sang de bon soir, mais qu’est-ce que je fous là ? »
À l’entrée du périph, un vieux monsieur, peignoir en velours et chaussons en peluche effilochés, se répète inlassablement cette question. Échappé de son Ehpad, Mariole, tueur à gages, ne se souvient plus de rien, sauf d’une chose : il lui reste une mission à accomplir. Seul problème, il ne sait plus laquelle.
Mathilde, elle, se bourre d’anxiolytiques pour oublier. Victime de revenge porn, jetée en pâture sur les réseaux sociaux, elle se dit que le plus simple est peut-être d’en finir… à moins de faire équipe avec le vieil amnésique venu à sa rescousse : en l’aidant à retrouver la mémoire, Mathilde pourrait se payer une revanche en or.
Première page :
Mathilde marche sur le bord de l'autoroute, les fringues à moitié arrachées, les larmes qui coulent, bien qu'elle ne pleure pas, sonnée. Elle déambule sur la bande d'arrêt d'urgence, lèvre fendue. Elle n'arrive pas à reprendre une respiration régulière. Pieds nus sur le bitume, deux ongles d'orteil cassés, elle oscille entre tachycardie et apoplexie. Depuis combien de temps ? Elle ne sait plus- Les voitures qui passent à cent trente sans ralentir ne la font pas sursauter. Ses sens semblent anesthésiés.
Un routier l'arrose des graves de son klaxon sans plus d'effets. Le conducteur du bahut n'est pas alarmé par la présence de Cette demoiselle débraillée sur le bas-côté d'une voie rapide. À cette heure indue, confondre avec une prostituée des aires de repos est un raccourci vite emprunté par le chauffeur fatigué, trop pressurisé par des horaires de livraison impossibles à honorer. Il salue le professionnalisme de cette fille. « Ce qu'il faut pas faire pour gagner sa croûte », se dit cet autre travailleur de la route, en voyant la silhouette disparaître dans son rétroviseur.
Ce que j'en pense :
On reconnaît bien l’écriture de l’auteur, cette façon d’évoquer des sujets graves (ici, la maladie, le viol) avec humour, souvent grinçant. Bien sûr il ne faut pas trop chercher la vraisemblance dans ses romans mais se laisser aller à des aventures plutôt rocambolesques. Mais ce livre, contrairement par exemple à « Cabossé » ou « Petiote », ne m’a pas complètement »emballé ». Je suis resté un peu sur le bord, avec parfois quelques bonnes émotions mais avec une certaine déception en fin de lecture.
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"La Barque de Masao" de Antoine Choplin - Buchet-Chastel
Présentation de l'éditeur :
Masao est ouvrier sur l'île de Naoshima (Japon). Ce soir-là, en quittant l'usine, il découvre Harumi venue l'attendre plus de dix ans après leur dernière entrevue. Des rendez-vous, emplis de pudeur et d'humanité, vont ponctuer leurs retrouvailles.
Ce face à face ravive les souvenirs... Remonte à la mémoire de Masao, cette histoire d'amour superbe et dramatique avec Kazue, la mère d'Harumi. Les années passées comme gardien du phare d'Ogijima. Ou encore les heures de plénitude à bord de la barque qu'il a construite de ses propres mains.
Première page :
Voilà l’ouvrier Masao, dans l’ignorance de ce qui va lui tomber dessus.
C’est une avance légère que nous avons sur lui. Car nous savons, nous, que, pour lui, cette fin de journée ne ressemblera en rien aux autres, aux centaines, aux milliers d’autres qui l’ont précédée. Et de là où nous nous tenons, autant que nous puissions le distinguer, il n’est pas déraisonnable d’imaginer que sa vie en sera drôlement bousculée.
Mais nous n’en sommes pas là.
Il est seize heures quarante-cinq, en ce mardi d’octobre. À l’équipe de jour, il ne reste qu’un quart d’heure de boulot.
Ce que j'en pense :
C’est un livre magnifique, sans doute un des meilleurs de l’auteur. On retrouve son écriture simple et concise, pleine de silence et de pudeur. Choplin sait nous faire partager les sentiments de ses deux personnages : le père et le fille. On éprouve beaucoup de douceur et de tendresse à la lecture de ce roman. Et la barque de Masao mérite amplement sa majuscule dans le titre du livre.
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"Malheur aux vaincus" de Gwenaël Bulteau - La manufacture de livres
Présentation de l'éditeur :
Sur les hauteurs d’Alger la blanche, la demeure de la famille Wandell vient d’être le théâtre d’un massacre. Six meurtres : maîtres et domestiques ont été assassinés. Tout porte à croire que deux forçats détachés du bagne et travaillant là auraient cherché ainsi un moyen de s’évader. Le lieutenant Julien Koestler, chargé de l’affaire, entreprend de partir à leur recherche à travers la foule grouillante d’Alger. Mais l’enquêteur doit naviguer dans une ville qui, en écho à l’affaire Dreyfus, tremble sous la pression d’un antisémitisme divisant la population des colons français. Sans compter cette série de vols dont sont victimes les employés de plusieurs banques pendant leur service. Et ne faut-il pas aussi essayer d’en savoir plus sur cette effroyable expédition coloniale en Afrique Noire qui impliqua la famille Wandell, quelques mois auparavant…
Première page :
L'enchaînement des événements est prévisible. René Josse entend le même discours depuis l'enfance. La morale, rien que la morale, obéir, reconnaître ses torts, s'amender, rentrer dans le rang. Les instituteurs se doutent qu'il finira mal, le fils Josse, avec ses conneries de petit vaurien, allant des chapardages de matériel agricole aux insolences envers les anciens combattants, comme si le monde et ses règles constituaient un affront à son existence. Les taloches des gendarmes ne sont rien en comparaison des corrections du père qui lui enfonce sa vérité dans le crâne à coups de poing et d'insultes cuisantes. À la mort du vieux, René ne verse pas une larme.
Depuis l'âge de douze ans, il gagne son pain en travaillant à la mine. Le dimanche, au bistrot, les conversations des adultes portent toujours sur le même sujet, les salaires de misère, le manque d'argent. Ce n'est pas une vie, mais un carcan insupportable de privations et d'humiliations quotidiennes. Sa mère le tanne pour qu'il mette de côté.
Ce que j'en pense :
Encore un bon polar historique écrit par Gwenaël Bulteau, avec des thèmes qui restent toujours d’actualité, comme le racisme ou l’intolérance. Il nous fait découvrir également quelques évènements lors de la colonisation de l’Afrique, dont la France ne doit pas être fière. C’est très bien documenté et les personnages, surtout les jeunes et les enfants, sont bien présents dans cette Algérie mise au pas.
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"Mauvais coûts" de Jacky Schwartzmann - Points policier
Présentation de l'éditeur :
Gaby Aspinall n’attend plus grand-chose de la vie. C’est un salaud. Acheteur dans une multinationale, à l’amoralité crasse, il y est comme un poisson dans l’eau. Il déteste, en vrac, les syndicats, Nespresso, Souchon, le rugby, ce sport de gros cons... Seuls les cinq à sept bâclés et les cuites au Get27 trouvent vaguement grâce à ses yeux. Alors si le passé s’invite dans sa petite vie bien réglée…
Première page :
X Works
Je suis un bâtard. Ma mère est toujours allée voir ailleurs si l’herbe des pubis était plus verte. Elle était un peu paysagiste et Papa a vite constaté que lui et moi on se ressemblait à peu près autant que Gaston Defferre et Alain Delon. Il a viré maman et elle n’a pas jugé bon de m’emmener dans ses valises. Parce que dans les années soixante-dix la garde des enfants, c’était pas comme maintenant. On fumait dans le métro, on se rasait pas la chatte, on s’habillait en orange : on faisait tout à la zob. J’avais trois ans, je ne l’ai jamais revue. Quand plus tard j’ai demandé à Papa comment elle était, il m’a répondu qu’elle buvait plus que Gainsbourg et qu’elle était le sosie de Paul Préboist. J’ai donc grandi avec Papa et j’ai appris un peu par hasard que, lui aussi, c’était un bâtard. C’était Bâtard Ier. Ma grand-mère avait couché avec un fils Chapuis. C’étaient des petits commerçants qui avaient pignon sur rue et pour ces gens, la Francine, elle était pas assez bien. Leur rejeton l’a engrossée et il était certainement vaguement amoureux mais lorsqu’il s’est agi de se marier la sentence est tombée : « Tu plaisantes j’espère ! »
Ce que j'en pense :
Très belle satire du monde des affaires avec beaucoup de cynisme, d’humour « vache », de vocabulaire qui va sans doute beaucoup choquer dans les chaumières. Ce personnage de Gaby pourra paraître assez infect, misogyne, énervant, pas très catholique et souvent amoral. Mais cette lecture m’a bien fait rire, au moins autant que son dernier roman « Shit ».
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"La femme aux mains qui parlent" de Louise Mey - Au diable vauvert
Présentation de l'éditeur :
Un conte sensible et envoûtant, aux frontières de nos animalités profondes
Une jeune fille sourde et aveugle vit dans une ferme isolée après la mort de ses parents.
Elle ne communique qu’avec des lettres qu’on écrit dans sa main ou qu’elle écrit dans celles des autres. Entretenant un rapport intime et sensuel à la nature qui l’entoure, elle développe une relation particulière avec ceux qu’elle appelle intérieurement «les chiens du dehors ».
Sous l’œil de ses voisins, deux frères aux intentions bien inquiétantes…Première page :
- Élisabeth
Un jour où leurs parents étaient restés longtemps en visite à l’Institut, à s’inquiéter pour ce qui allait se passer, Élisabeth avait fini par se dire que ça lui ferait des vacances s’ils pouvaient éviter les visites quelque temps, se casser la jambe ou quelque chose du genre, leur mère surtout, et bien sûr quand leur voiture avait quitté la route pour aller s’encastrer dans un platane sur le chemin du retour, la culpabilité lui avait tordu les entrailles.
Elle avait fini par le confier à Geneviève, traçant dans la paume de sa grande sœur la confession du mauvais sort lancé par mégarde; et Geneviève n’avait même pas daigné répondre dans sa main ouverte, elle s’était contentée de lui donner une petite tape sur le genou, …
Ce que j'en pense :
On peut parler d’un conte à la fois tendre et cruel qui nous parle de différence, de respect de la nature, mais aussi de sauvagerie, ou plus exactement de ce qui nous différencie – ou pas – de l’animal. A la fin de la lecture on se demande vraiment qui sont les chiens ! C’est un livre à déguster, à méditer.
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"Points de non-retour" de Alexandra Badea - L'Arche
Présentation de l'éditeur :
[Diagonale du vide] vient clore la trilogie des « Points de non-retour » d’Alexandra Badea débutée avec [Thiaroye] en 2018 (tirailleurs sénégalais fusillés) et suivie de [Quais de Seine] en 2019 (massacre su 16 octobre 1961), formant une grande fresque historique aux récits intimes enchâssés. Dans un foyer abandonné, Nora réalise un documentaire sur les « enfants de la Creuse », un autre récit manquant de l’histoire postcoloniale française : le transfert d’enfants réunionnais organisé par les autorités françaises pour repeupler certains départements démographiquement touchés par l’exode rural, dans les années 1960. Sur les traces de sa mémoire familiale, elle rencontre trois anciens pupilles, J-B, Daria et Hamza, qui ont séjourné dans ce foyer, aujourd’hui dévasté par le temps. S’articulent ainsi mémoire familiale, générations sacrifiées et pages effacées de l’histoire contemporaine, mettant à jour les interférences politiques dans un espace intime anéanti.
Extrait :
THÉRAPEUTE J'ai pas dit ça. C'est vous qui le dites.
NORA J'ai commencé à me sentir très seule ici. Pour une fois j'ai voulu me fondre dans la foule. Me perdre, ne plus exister.
THÉRAPEUTE C'est cet homme que vous voulez suivre dans la mort ?
NORA La mort a été toujours présente en moi.
THÉRAPEUTE Même dans l'amour ?
NORA Surtout dans l'amour. Tout le monde pense que l'amour apaise. C'est faux. L'amour trouble.
THÉRAPEUTE Qu'est-ce que vous voulez dire ?
NORA Vous n'avez jamais aimé ? Ça se voit. Vous auriez moins de certitudes.
THÉRAPEUTE Pourquoi l'amour vous a troublée ?
Ce que j'en pense :
L’autrice a cherché à sortir de l’oubli plusieurs zones d’ombre de l’histoire de France, liées au passé colonial. Elle y parvient admirablement. A la lecture cela peut paraître parfois un peu complexe (sauf sans doute le deuxième tome). Il faut donc imaginer ce que cela peut donner sur une scène et trouver une troupe qui joue ces trois pièces.
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"Sucre amer" de Avni Doshi - Globe
Présentation de l'éditeur :
À la cinquantaine, la mère d'Antara déclenche les premiers symptômes de la maladie d'Alzheimer. Tout le monde attend que sa fille unique prenne soin d'elle. Mais la jeune femme renâcle. Car plus le passé déserte l'esprit de sa mère, plus le sien en est envahi. Ma ne l'a ni élevée, ni aimée, ni respectée. Quand Antara avait quatre ans, Ma s'est entichée d'un gourou, a fait fuir son père, l'a entraînée dans la secte d'Osho puis abandonnée aux tortures d'un pensionnat catholique... Avec les souvenirs cruels, la colère longtemps refoulée déferle jusqu'à lui faire rêver d'euthanasie. À l'heure où elle s'apprête à devenir mère à son tour, Antara en vient à redouter le mimétisme. Ses dessins bizarres, obsessionnels, et ses installations auraient pu lui apporter la paix, si seulement Ma ne s'était pas employée à saboter sa vocation d'artiste. Avec ce premier roman finaliste du Booker Prize, Avni Doshi dissèque les sentiments et les ressentiments d'un amour mère-fille impossible, et brandit à la société indienne, patriarcale et fataliste, un miroir impitoyable.
Première page :
Je mentirais si je disais que les malheurs de ma mère ne m'ont jamais procuré aucun plaisir.
J'ai eu l'honneur d'être moi-même sa victime désignée, quand j'étais enfant, et nombre des humiliations qu'elle subit par la suite me sont toujours apparues comme une expiation qui lui était infligée, mais aussi un juste rééquilibrage des choses où la logique de cause à effet reprenait sens.
Aujourd'hui toutefois, j'ai du mal à faire les comptes, entre nous.
La raison n'est pas difficile à comprendre : ma mère perd la mémoire, et contre ça je ne peux rien. Je ne dispose d'aucun moyen pour la forcer à se souvenir de ce qu'elle fit autrefois, ni la forcer à reconnaître ce dont elle s'est rendue coupable. Parfois il m'arrivait d'évoquer mine de rien — à table, disons — certains exemples de sa cruauté, ne serait-ce que pour le plaisir de voir son visage se renfrogner, ou ses sourcils se froncer. Aujourd'hui, il est rare qu'elle se souvienne de ce dont je parle ; elle se cache en permanence derrière un regard absent, et affiche son sempiternel sourire. Si une tierce personne assiste à la scène, il (ou elle) posera sa main sur la mienne et me soufflera : «Arrête ça. Tu vois bien qu'elle a perdu la mémoire, la pauvre. »
Cette compassion qu'elle suscite chez les autres ferait facilement remonter en moi les pires rancœurs.
Ce que j'en pense :
Ce roman aurait du me plaire et cela a été le cas dans un tiers du livre : une très belle écriture avec un humour assez caustique, une histoire dépaysante en Inde, les relations complexes mère/fille surtout lorsque survient la maladie…Et puis j’ai abandonné aux environs de la page 110 car cela m’a paru trop compliqué : beaucoup de retours en arrière, narration paraissant désordonnée…et le plaisir de lecture s’est envolé.
Abandonné
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"Là où la vie d'emmène" - de Alban Gallée - City éditions
Présentation de l'éditeur :
À tout juste trente ans, Rose s'est enfermée dans une routine qui l'étouffe et elle sent la vie lui filer entre les doigts. La jeune femme rêverait de pouvoir tout quitter, tout recommencer. Loin du métro parisien, du boulot et des habitudes qui l'emprisonnent. Un jour, sa mère l'inscrit à un concours et, miracle, elle gagne le gros lot : six mois offerts sur une île en Australie. Rose n'hésite pas longtemps, elle va enfin réaliser son rêve. Vivre différemment, ailleurs. À l'autre bout du monde, elle rencontre des personnages excentriques qui la poussent à se remettre en question et, au fil des aventures, entre rires et larmes, elle repart à la conquête du bonheur. Et sa vie en est transformée à tout jamais.
Première page :
You’re beautiful.
You’re beautiful.
You’re beautiful, it’s true.
I saw your face in a crowded place,
And I don’t know what to do,
Cause I’ll never be with you.
La voix de James Blunt résonnait sans discontinuer dans la dernière voiture de la ligne 9.
Rose ne se rendait même pas compte que le volume de son iPod était juste un peu trop fort. Mais peu importe. Pour elle, ce n’était pas une simple chanson. C’était une prémonition. Celle qu’elle souhaitait voir se réaliser chaque matin dans la rame qui l’emmenait au travail.
Quand, par hasard, elle y apercevait un homme grand aux yeux clairs, elle aimait s’imaginer que les mots de James Blunt étaient ceux qu’il avait dans la tête. Il la regarderait de loin, timidement. Elle lui rendrait son regard, furtivement. Puis elle détournerait les yeux pendant quelques secondes, le temps pour elle d’espionner le reflet du jeune homme dans la vitre. S’il maintenait ses yeux sur elle, elle le regarderait à nouveau. Elle sortirait un livre de son sac, un roman d’amour, dont le titre serait un message pour le jeune homme. Enfin, non, pas vraiment un message, mais plutôt une invitation à venir lui parler.
Ce que j'en pense :
Les premières pages m’ont relativement intéressé (disons jusqu’au tiers du livre) même si ce genre de maladie dont souffre l’héroïne parait plutôt bizarre. Et puis, au fil des pages et des invraisemblances (surtout lors de sa présence dans l’île) ce roman perd presque tout intérêt : on tourne les pages quand on n’a rien d’autre à faire !
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"L'homme qui marche" de Yves Bichet - Mercure de France
Présentation de l'éditeur :
Robert Coublevie marche sur la plus belle frontière du monde. Sa femme l'a quitté et il arpente ces hauts lieux où il croise des fleurs par milliers, des bêtes sauvages et libres, parfois un marcheur qui lui ressemble. Malgré tout, de temps à autre, il doit replonger dans le chaudron des villes... De nouveau confronté au tumulte, ne sachant que faire des tourments qu'il y découvre, Coublevie choisit d'en rire. La jeune Camille, elle, s'y débat comme un animal blessé, guettant les rumeurs du Café du Nord que tient son père. Elle a seize ans et dissimule de lourds secrets. Jusqu'où va-t-elle entraîner Coublevie? Jusqu'à quel crime? Veut-elle faire de lui le coupable idéal, le témoin complice? Une chose est sûre : la traque a commencé.
Première page :
Je suis un marcheur. J’arpente des sentiers lumineux et ventés, la lisière de nations très anciennes. Je parcours jour après jour le même chemin, sillonnant les pays d’altitude, suivant pas à pas mon bout de frontière Italie-France, au mètre près. J’en connais chaque vallon, chaque torrent, chaque alpage. Je longe cette limite d’un seul côté, jalonnant sans cesse les mêmes crêtes, franchissant les mêmes cols, passant d’un horizon à l’autre : mont Cenis au nord, mont Viso au sud, mont Thabor au centre. Des sommets, des vallées, des alignements de cimes à contourner, des arêtes à franchir… J’en explore les pentes et les parois, les lacs, les arbres et les cailloux, les tournants, les mamelons. C’est comme une peau. J’ai l’impression de suivre une ancienne séparation douce et affaiblie… Je frôle, je foule, je déroule ma vie entière sur ce bout de frontière inusable. Je suis le marcheur d’un seul chemin… Robert Coublevie, ancien pion au lycée agricole d’Embrun (Hautes-Alpes), chemineau par passion et par mélancolie, pauvre par obligation, endurant par devoir, cocu par négligence, arpenteur et fuyard.
Ce que j'en pense :
C’est un livre étrange qui pourrait paraître parfois un peu confus car il est écrit à la façon d’un vagabondage. On passe d’un lieu à un autre, d’un personnage à un autre, d’un paysage à un autre… puis on y revient ; avec toujours, au centre, cette jeune fille Camille. La métaphore de la frontière, de la limite, est vraiment intéressante. C’est touchant, plein d’humanité et très bien écrit.
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