• - Nouvelles

    "La fée Benninkova" de Franz Bartelt
    éditions Le Dilettante

    Présentation de l'éditeur :

    Les contes de fées, on connaît, mais les mécomptes d’une fée, la chose est beaucoup plus rare, et fort pathétique. Dont acte avec la Benninkova de Franz Bartelt qui s’en vient cogner, minuit sonnant, à l’huis de Clinty Dabot ! La pauvrette s’avoue toute harcelée par trois malheurs : une envie pressante, la perte de sa baguette et le péril rôdant des Grands Lutins Noirs, horribles malfaisants, gourmets de fées qu’ils dépiautent et savourent en bande. Surpris mais compatissant, Clinty Dabot, béquillard à la patte folle et au dos en vrac, lui offre une hospitalité récompensée, comme il se doit, quand la régie régionale des baguettes de fées aura renvoyé un autre spécimen, par le traditionnel voeu exhaussé. La fée s’acclimatant et la confiance venant, Clinty se met à dévider par le menu les replis d’une existence aussi tortueuse et douloureuse que son squelette. Une vie hantée par le dévoilement tarifé (et au plus haut !) de l’anatomie de Marylène, l’opulente caissière du supermarché dont les rondeurs, les plis et replis, la fourrure et les accès intimes sont la terre d’aventure du Clinty Dabot. Noir, goguenard, hilare et féroce, ce conte féérique inspiré par la fée Clochette et la pulpeuse Paulette de Pichard, est ciselé par le talentueux Franz Bartelt. 

    Première page :

    "Quand elle a frappé à ma porte, il n'était pas minuit. J'étais en train de regarder un dessin animé. Je me suis traîné jusqu'au couloir, pas facile avec ma patte folle et mon dos qui se tord. Par l'œilleton, je l'ai vue. Elle était en larmes, dans sa tenue de pauvre petite créature. Normalement, je n'aurais pas ouvert, j'ai trop peur de tout. Mais, je ne sais pas, la pitié m'est venue d'un coup, comme par miracle. J'ai ouvert. Pas vrai­ment en grand, parce qu'il subsistait en moi une sorte de méfiance sécuritaire. Elle avait beau être belle, la beauté n'est pas une garantie contre les mauvaises surprises.

    « Vous êtes bien Clinty Dabot, le célèbre handicapé? » a-t-elle demandé, en reniflant ses larmes."

    Ce que j'en pense :

    Un conte, une fable, une fantaisie... à la fois féroce et savoureux. Livre rempli d'humour et de dérision. À déguster sans modération.


       

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    "Électe à La Havane" - Léonardo Padura
    traduit par René Solis et Mara Hernandez - Points (Métailié)

    Présentation de l'éditeur :

    Le fils d'un diplomate cubain est retrouvé mort étranglé à La Havane. Alexis Arayan était maquillé en femme. L'enquête conduit Mario Conde sur les traces d'Alberto Marqués, un dramaturge homosexuel, exilé dans son propre pays. Homme cultivé et cynique, Marqués va lui faire découvrir une Havane inconnue où la quête d'identité contraint les individus à suivre d'étranges parcours.

    Première page :

    "La chaleur est une plaie maligne qui envahit tout. Elle tombe tel un lourd manteau de soie rouge qui serre et enveloppe les corps, les arbres, les choses, pour leur injecter le poison obscur du désespoir, de la mort lente et certaine. La chaleur est un châtiment sans appel ni circonstances atténuantes, prêt à ravager l'univers visible; son tourbillon fatal a dû tomber sur la ville hérétique, sur le quartier condamné. Elle est le calvaire des chiens errants, bouffés par la gale, malades d'aban­don, à la recherche d'un lac dans le désert; des vieux aussi qui traînent des cannes encore plus fatiguées que leurs jambes, arc-boutés contre la canicule, en lutte quotidienne pour la survie; et des arbres, autrefois majestueux, à présent courbés sous la montée furieuse des degrés ; et de la poussière morte dans des caniveaux nostalgiques d'une pluie qui n'arrive pas ou d'un vent indulgent, capables d'inverser ce destin immobile et de métamorphoser cette poussière en boue ou en nuages abrasifs ou en orages ou en cataclysmes."

    Ce que j'en pense :

    Toujours Cuba, personnage principal des enquêtes de Mario Conde, mais dans ce troisième volume tout semble poussif et l'ennui nous gagne. Le "message" sur la société cubaine passe nettement moins bien que dans les précédents livres.


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     "L'autre fille " - Annie Ernaux
    éditions NiL (les affranchis)

    Présentation de l'éditeur :

    Yvetot, un dimanche d'août 1950. Annie a dix ans, elle joue dehors, au soleil, sur le chemin caillouteux de la rue de l'Ecole. Sa mère sort de l'épicerie pour discuter avec une cliente, à quelques mètres d'elle. La conversation des deux femmes est parfaitement audible et les bribes d'une confidence inouïe se gravent à jamais dans la mémoire d'Annie. Avant sa naissance, ses parents avaient eu une autre fille. Elle est morte à l'âge de six ans de la diphtérie. Plus jamais Annie n'entendra un mot de la bouche de ses parents sur cette sœur inconnue. Elle ne leur posera jamais non plus une seule question. Mais même le silence contribue à forger un récit qui donne des contours à cette petite fille morte. Car forcément, elle joue un rôle dans l'identité de l'auteur. Les quelques mots, terribles, prononcés par la mère ; des photographies, une tombe, des objets, des murmures, un livret de famille : ainsi se construit, dans le réel et dans l'imaginaire, la fiction de cette " aînée " pour celle à qui l'on ne dit rien. Reste à savoir si la seconde fille, Annie, est autorisée à devenir ce qu'elle devient par la mort de la première. Le premier trio familial n'a disparu que pour se reformer à l'identique, l'histoire et les enfances se répètent de manière saisissante, mais une distance infranchissable sépare ces deux filles. C'est en évaluant très exactement cette distance que l'auteur trouve le sens du mystère qui lui a été confié un dimanche de ses dix ans.

    Première page :

    "C'est une photo de couleur sépia, ovale, collée sur le carton jauni d'un livret, elle montre un bébé juché de trois quarts sur des coussins festonnés, superposés. Il est revêtu d'une chemise brodée, à une seule bride, large, sur laquelle s'attache un gros nœud un peu en arrière de l'épaule, comme une grosse fleur ou les ailes d'un papillon géant. Un bébé tout en longueur, peu charnu, dont les jambes écartées avan­cent, tendues jusqu'au rebord de la table. Sous ses cheveux bruns ramenés en rou­leau sur son front bombé, il écarquille les yeux avec une intensité presque dévo­rante. Ses bras ouverts à la manière d'un poupard semblent s'agiter. On dirait qu'il va bondir. "

    Ce que j'en pense :

    Annie Ernaux s'interroge sur sa place dans le puzzle familial, à l'ombre d'une soeur morte. L'écriture, délicate, précise, intelligente, donne à ce livre une dimension à la foir intime et universelle (comme c'est souvent le cas chez Annie Ernaux)

       

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    "Les liaisons ferroviaires" - Jean Pierre Martin
    Editions Champ Vallon

    Présentation de l'éditeur :

    « C’est un sujet inédit. L’amour contemporain. Ne riez pas. Ou plutôt les amours de rencontre. Les amours médiologiques, corrélés à une technologie, suivez-moi bien. On n’a encore jamais vraiment réussi à parler de ça au sens où je l’entends moi : l’amour au temps du TGV, au temps du porno sur toutes les chaînes, l’amour comme force générale, cœur et corps confondus, comme très grande vitesse de recherche éperdue de l’autre par tous les moyens. »

    Extrait :

    "Laurence Fisher, la psychanalyste.

    J'aurais toutes les raisons de me méfier des aventures ferroviaires : il m'est arrivé dans un train une histoire assez piteuse. Il y avait un beau mec à côté de moi, un physique genre Sami Frey. Le voyage entre Marseille et Paris, quatre heures de train, a été une sorte de flirt ininterrompu. On entrait dans la vie de l'autre comme dans un film, le ton devenait de plus en plus intime, il me dévorait des yeux. Au moment précis où le train s'est immobilisé à la gare de Lyon et où l'on s'apprêtait à quitter nos sièges, il est devenu comme un autre homme. L'air d'être ailleurs, affairé, absent. Il m'a à peine dit au revoir et s'est précipité sur le quai.

    Il marchait vite devant moi, je n'existais déjà plus, et au bout du quai, j'ai aperçu la femme qui l'attendait..."

    Ce que j'en pense :

    Très drôle et très fin. À travers de petites scènes à l'intérieur de la voiture 16 du TGV 9864 Nice-Bruxelles, l'auteur donne la parole à des personnages d'une magnifique comédie humaine. Chaque lecteur (lectrice?) devrait y trouver son compte de fantasmes.

       

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    "Le prédicateur" de Camilla Lâckberg
    actes noirs - Actes Sud

    Présentation de l'éditeur :

    Dans les rochers proches de Fjàllbacka, le petit port touristique suédois dont il était question dans La Princesse des glaces, on découvre le cadavre d'une femme. L'affaire se complique quand apparaissent, plus profond au même endroit, deux squelettes de femmes... L'inspecteur Patrik Hedstrôm est chargé de l'enquête en cette période estivale où l'incident pourrait faire fuir les touristes et qui, canicule oblige, rend difficiles les dernières semaines de grossesse d'Erica Falck, sa compagne. Lentement, le tableau se précise : les squelettes sont certainement ceux de deux jeunes femmes disparues vingt-quatre ans plus tôt. Revient ainsi en lumière la famille Hult, dont le patriarche, Ephraïm, magnétisait les foules accompagné de ses deux petits garçons, Gabriel et Johannes, dotés de pouvoirs de guérisseurs. Depuis cette époque et un étrange suicide, la famille est divisée en deux branches qui se haïssent. Alors que Patrik assemble les morceaux du puzzle, on apprend que Jenny, une adolescente en vacances dans un camping, a disparu. La liste s'allonge... Une nouvelle fois, Camilla Lâckberg excelle à tisser son intrigue, manipulant son lecteur avec jubilation, entre informations finement distillées et plaisir de nous perdre en compagnie de ses personnages dans une atmosphère provinciale lourde de secrets.

    Première page :

    "La journée commença de façon prometteuse. Il se réveilla tôt, avant le reste de la famille, s'habilla aussi discrètement que possible et réussit à filer sans se faire remarquer. Il emporta son casque de chevalier et l'épée de bois qu'il brandit triomphalement pendant qu'il courait sur les cent mètres séparant sa maison de l'entrée de la brèche du Roi. Il s'arrêta un instant et observa respectueusement la trouée escarpée fendant le roc. Deux mètres environ séparaient les parois et elles s'élevaient sur une bonne dizaine de mètres vers le ciel où le soleil avait commencé son ascension. Trois gros blocs de pierre étaient restés coincés à mi-hauteur constituant un spectacle impressionnant. L'endroit avait une force d'attraction magique sur un enfant de six ans, et le fait que la brèche du Roi soit territoire interdit la rendait d'autant plus attirante.

    La faille avait reçu son nom lors d'une visite d'Oscar II à Fjàllbacka à la fin des années 1880, mais, de cela, il ne savait rien, ou s'en fichait, lorsqu'il s'introduisit lentement parmi les ombres, son épée de bois prête à l'attaque. En revanche, son papa avait raconté que les scènes du gouffre de l'Enfer dans Ronya, fille de brigands avaient été tournées dans la brèche du Roi, et au cinéma il s'était senti tout excité en voyant Mattis, le chef des bandits, la franchir au galop sur son cheval. Parfois il venait jouer au brigand ici, mais aujourd'hui il était chevalier. Chevalier de la Table ronde, comme dans le livre de coloriage que sa grand-mère lui avait offert pour son anniversaire."

    Ce que j'en pense :

    Trame narrative identique au précédent de la série, avec peut être un peu trop de personnages... et toujours cette manie de créer un suspens avec vraiment de grosses ficelles.  Et finalement on se laisse "prendre" jusqu'au bout mais je vais attendre quelque temps avant de me replonger dans la suite des aventures de Patrick et d'Erica...

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    "La princesse des glaces" de Camilla Lâckberg
    actes noirs -Actes Sud

    Présentation de l'éditeur :

    Erica Falck, trente-cinq ans, auteur de biographies installée dans une petite ville paisible de la côte ouest suédoise, découvre le cadavre aux poignets tailladés d'une amie d'enfance, Alexandra Wijkner, nue dans une baignoire d'eau gelée. Impliquée malgré elle dans l'enquête (à moins qu'une certaine tendance naturelle à fouiller la vie des autres ne soit ici à l'œuvre), Erica se convainc très vite qu'il ne s'agit pas d'un suicide. Sur ce point - et sur beaucoup d'autres -, l'inspecteur Patrik Hedström, amoureux transi, la rejoint. A la conquête de la vérité, stimulée par un amour naissant, Erica, enquêtrice au foyer façon Desperate Housewives, plonge clans les strates d'une petite société provinciale qu'elle croyait bien connaître et découvre ses secrets, d'autant plus sombres que sera bientôt trouvé le corps d'un peintre clochard - autre mise en scène de suicide. Au-delà d'une maîtrise évidente des règles de l'enquête et de ses rebondissements, Camilla Läckberg sait à merveille croquer des personnages complexes et - tout à fait dans la ligne de créateurs comme Simenon ou Chabrol - disséquer une petite communauté dont la surface tranquille cache des eaux bien plus troubles qu'on ne le pense.

     

    Biographie de l'auteur 

    Camilla Läckberg, née le 30 août 1974, est à ce jour l'auteur de cinq polars ayant pour héroïne Erica Falck et dont l'intrigue se situe toujours à Fjälbacka, port de pêche de la côte ouest en Suède, qui eut son heure de gloire mais désormais végète. En Suède, tous ses ouvrages se sont classés parmi les meilleures ventes de ces dernières années, au coude à coude avec Millénium de Stieg Larsson.

    Les cinq livres de la série :

    - La princesse des glaces

    - Le prédicateur

    - Le tailleur de pierres

    - L'oiseau de mauvais augure

    - L'enfant allemand

    Ce que j'en pense :

    Une histoire qu'on lit jusqu'au bout assez rapidement malgré une utilisation du suspens assez primaire mais on s'attache aux personnages principaux. Il faut lire ce livre si on veut lire les suivants (et on a envie d'en lire quelques uns ... c'est facile, ça change les idées...)

     

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    "Purge" de Sofi Oksanen
    traduction Sébastien Cagnoli - Stock

    Présentation de l'éditeur :

    En 1992, l’union soviétique s’effondre et la population estonienne fête le départ des Russes. Mais la vieille Aliide, elle, redoute les pillages et vit terrée dans sa maison, au fin fond des campagnes. 
    Ainsi, lorsqu’elle trouve Zara dans son jardin, une jeune femme qui semble en grande détresse, elle hésite à lui ouvrir sa porte. Ces deux femmes vont faire connaissance, et un lourd secret de famille va se révéler, en lien avec le passé de l’occupation soviétique et l’amour qu’Aliide a ressenti pour Hans, un résistant. La vieille dame va alors décider de protéger Zara jusqu’au bout, quel qu’en soit le prix. 
    Sofi Oksanen s’empare de l’Histoire pour bâtir une tragédie familiale envoûtante. Haletant comme un film d’Hitchcock, son roman pose plusieurs questions passionnantes : peut-on vivre dans un pays occupé sans se compromettre ? Quel jugement peut-on porter sur ces trahisons ou actes de collaboration une fois disparu le poids de la contrainte ? 

    Première page :

     "Il faut que j'essaye d'écrire quelques mots, pour ne pas perdre la raison, pour garder l'esprit d'aplomb. Je cache mon cahier ici, sous le sol du cagibi. Afin que personne ne le trouve, quand bien même on me trouverait, moi. Ce n'est pas une vie.

    L'être humain a besoin de ses semblables et de quelqu'un à qui parler. Je m'efforce de faire beaucoup de pompes, d'entretenir mes muscles, mais je ne suis plus un homme, je suis un mort. Un homme fait les travaux de sa ferme, mais dans ma ferme, c'est une femme et c'est la honte de l'homme.

     Liide essaye tout le temps de s'approcher. Pourquoi ne me laisse-t-elle pas tranquille ? Elle pue l'oignon.

     Qu'est-ce qui les retarde, les Anglais ? Où est l'Amérique ? Tout ne tient qu'à un fil, rien n'est sûr. Où sont ma fille Linda et Ingel ? L'ennui est plus grand qu'on ne peut le supporter."

    Ce que j'en pense :

    Ecriture originale, certainement très bien traduit. Conduite du récit faisant alterner plusieurs époques dans un contexte historique de l'Estonie entre occupation allemande et soviétique. Deux héroïnes au destin mêlé, entre amour, trahison, secret, jalousie, souffrance. Style direct, phrases courtes; un très bon livre.

       

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