• Ils savent tout de nous

    "Ils savent tout de nous" de Iain Levinson - Liana Levi

    Présentation de l'éditeur :

    Avez-vous déjà rêvé de lire dans les pensées des gens ? Savoir ce que se dit la serveuse en vous apportant votre café du matin. Ce que vos amis pensent vraiment de vous. Ou même ce que votre chat a dans la tête ? Eh bien, c'est exactement ce qui arrive un jour à Snowe, un flic du Michigan. Au début, il se croit fou. Puis ça l'aide à arrêter pas mal de faux innocents... A des kilomètres de là, un autre homme est victime du même syndrome. Mais lui est en prison, et ce don de télépathie semble fortement intéresser le FBI... Iain Levison nous entraîne dans un suspense d'une brûlante actualité, où la surveillance des citoyens prend des allures de chasse à l'homme. Mais sait-on vraiment tout de nous ?

    Première page :

    Si on lui avait demandé quand exacte ment tout avait commencé, Snowe aurait dit que c’était au moment où il avait frappé le toxico devant la pharmacie DaVinci. Depuis environ une semaine il se sentait… réceptif. Comme s’il pouvait ressentir les émotions des autres. Le mercredi, après son service, il avait su que la femme qui trottait sur le tapis de course à côté de lui dans la salle de sport était contrariée, et il avait vaguement compris que c’était à cause de son compagnon. Sur le moment, ça lui avait paru être une simple idée en l’air. Le lendemain matin au café, en allant travailler, il avait senti que la fi lle derrière le comptoir était épuisée, déprimée, et qu’elle avait la gueule de bois. Il imagina qu’elle pensait « mon Dieu, vivement la fi n du service ». Mais n’importe qui aurait pu en faire autant. Même dans ses meilleurs jours ce n’était pas la plus gaie des serveuses, et toute personne ayant un brin d’empathie aurait remarqué chez elle des signes de souffrance. Plus tard, il avait senti que le type à la station-service était tendu parce que son fournisseur d’herbe était en retard, mais n’importe qui aurait pu deviner d’un simple regard la raison de son anxiété évidente. En revanche, lorsqu’il frappa le junkie, il comprit qu’il se passait quelque chose. Il ressentait sa peur et sa douleur, et quand le gamin essaya de lui échapper, il sut qu’il avait souvent été battu, par son père, et qu’il revivait un de ces moments-là, sans penser au présent. Snowe fut tellement secoué par cette révélation qu’il lâcha le gamin.

    Ce que j'en pense :

    Belle analyse de cette surveillance généralisée (qui est tout à fait d'actualité). C'est un livre intelligent, très bien construit, avec juste ce qu'il faut d'humour, de réalisme et d'humanité pour que nous nous interrogions sur un monde qui risque de devenir invivable.

    Ils savent tout de nous

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  • Après le silence

     

    "Après le silence" de Didier Castino - éditions Liana Lévi

    Présentation de l'éditeur :

    «Quand on parle de moi, il y a toujours l’usine. Pas facile de parler d’autre chose.» Dans un monologue destiné au plus jeune de ses fils, Louis Catella se dévoile.
    Mouleur syndicaliste aux Fonderies et Aciéries du Midi, il s’épuise dans la fournaise des pièces à produire et le combat militant. Il raconte aussi la famille, l’amour de Rose, le chahut des garçons, les efforts rageurs pour se payer des vacances... Une vie d’ouvrier, pas plus, pas moins. Jusqu’au grand silence du 16 juillet 1974. Louis meurt accidentellement. Et pourtant l’impossible monologue se poursuit, retraçant la vie sans père de ce fils qui n’avait que sept ans au moment du drame. Partagé entre le désir d’échapper à ce fantôme encombrant dont tout le monde tisse l’éloge et la peur de trahir, c’est à lui maintenant de devenir un homme.
    Ce roman intense brosse la chronique de la France ouvrière des années 60-70, le récit intime de l’absence, la honte et la fierté mêlées des origines. 

    Première page :

    "Et je m’appelle Louis Georges Edmond Catella. Je travaille à l’usine toute la semaine, c’est dur mais ça me plaît. Je suis quelqu’un qui avant tout travaille, a toujours travaillé. C’est ma vie, la reconnaissance et la sécurité. Tout le monde dit que mon travail est l’usine. Où il est Louis ? Il est à l’usine. Attends deux minutes, il va revenir de l’usine. Si tu veux raconter ma vie, tu ne peux parler de moi à l’école. J’ai dû y aller comme y vont les enfants de 1930, mais moi c’est le travail surtout. Très peu d’argent à la maison, on le met dans des boîtes et on essaie de le garder, ne pas s’en servir pour être plus riche un jour, alors l’école… Il ne faut pas y penser ni s’y attarder, on n’en parle pas. Très tôt on comprend que certaines choses nous sont étrangères, tout s’organise entre ceux qui peuvent et ceux qui ne peuvent pas, ceux qui vont à l’école et ceux qui travaillent, c’est l’un ou l’autre. Il n’y a pas de révolte, pas encore, la vie s’épuise ainsi : je ne suis pas de ceux qui doivent aller à l’école trop longtemps, moi je ferai autre chose, je travaillerai. Aller à l’école, je n’y pense même pas, je gagnerai de l’argent et j’en mettrai dans les boîtes, à mon tour. Je crois que j’ai commencé à vivre quand je me suis rendu compte de cette donnée incontournable. Avant, qu’ai-je connu ? Je ne me souviens que de brouillard, d’attente et d’odeur âcre. Je ne me souviens que du deuil qu’a porté ma mère, jusque dans ma naissance, jusque dans ma conception, le deuil impossible de sa seule fille …"

    Ce que j'en pense :

    Livre très fort sur le monde ouvrier, et sur le deuil, qui se lit lentement. Ce n'est pas juste le portrait d'un père, c'est toute une époque qui est racontée, avec une classe ouvrière encore puissante, avec ses espoirs et ses déceptions. Une écriture magnifique, une construction très originale.

    Après le silence

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  • Le cahier bleu

    "Le cahier bleu" de James A. Levine - éditions Buchet Chastel

    Présentation de l'éditeur :

    Batuk est âgée de neuf ans à peine quand son père, un paysan du Madya Pradesh, la vend à un bordel d'enfants de Common Street, à Bombay. Jetée en pâture aux désirs pervers des notables de la ville et des policiers pédophiles, la petite prostituée parvient, six années plus tard, à subtiliser un crayon à sa patronne. Et se met à couvrir les pages d'un cahier bleu auquel elle confie le quotidien épouvantable de son esclavage sexuel. Dans ce journal intimiste, désespéré, expiatoire, Batuk écrit tous les jours avec ses mots d'enfant sacrifiée. Elle écrit pour conjurer son destin, pour oublier que son père a abandonné sa léoparde aux yeux d'argent à la violence de ces clients qui viennent jusque dans son nid pour y faire des pains au lait. Elle écrit aussi pour retrouver ses jeux au village avec les lézards de son enfance entre les rochers chauffés par le soleil. Et, dans son cahier bleu, Batuk finit par s'inventer des héros fantastiques qui viendront peut-être, un jour, la libérer... Mais, une nuit, un taxi blanc s'arrête devant sa prison...

    Extrait :

    "Puneet est un "garçon perdu" depuis la disparition de sa mère. C'est un miracle qu'il ait survécu. Il m'a raconté les atrocités qu'il avait vu dans la rue, avant même que maître Gahil ne l'acquiert : meurtres, tortures et vols avec violence pour ne citer que celles là. Il m'a dit que son père s'était échappé de prison pour partir à sa recherche, mais qu'il avait été repris après une bagarre de rue mémorable. il m'explique souvent que sa mère a épousé un riche homme d'affaire qui va venir le chercher : "bientôt, tu verras". Ces histoires sont de la pure fiction. Cela fait longtemps que Puneet a été effacé de la mémoire de ses parents. Sinon, comment pourraient-ils réconcilier leurs places sur terre avec la pensée vit à deux nids du mien et que chaque jour il donne du plaisir à des hommes qui sont sales au dedans et au dehors ? Puneet ne connaît d'autre réalité que sa cage et cette rue. Voilà pourquoi il ne cherche jamais à s'échapper; son monde se limite à cela."

    Ce que j'en pense :

    C'est un récit plein de violence (physique, viols…) qui veut dénoncer les violences faites aux enfants prostitués. C'est un livre dérangeant, souvent à la limite de la complaisance voire du voyeurisme.

    Le cahier bleu

     

     

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  • Otages intimes

    "Otages intimes" de Jeanne Benameur - Actes Sud

    Présentation del'éditeur :

    Photographe de guerre, Etienne a toujours su aller au plus près du danger pour porter témoignage. En reportage dans une ville à feu et à sang, il est pris en otage. Quand enfin il est libéré, l'ampleur de ce qu'il lui reste à ré-apprivoiser le jette dans un nouveau vertige, une autre forme de péril. De retour au village de l'enfance, auprès de sa mère, il tente de reconstituer le cocon originel, un centre duquel il pourrait reprendre langue avec le monde. Au contact d'une nature sauvage, familière mais sans complaisance, il peut enfin se laisser retraverser par les images du chaos. Dans ce progressif apaisement, se reforme le trio de toujours. Il y a Enzo, le fils de l'Italien, l'ami taiseux qui travaille le bois et joue du violoncelle. Et Jofranka, l'ex petite fille abandonnée, avocate à La Haye, qui aide les femmes victimes de guerres à trouver le courage de témoigner. Ces trois-là se retrouvent autour des gestes suspendus du passé, dans l'urgence de la question cruciale : quelle est la part d'otage en chacun de nous ? De la fureur au silence, Jeanne Benameur habite la solitude de l'otage après la libération. Otages intimes trace les chemins de la liberté vraie, celle qu'on ne trouve qu'en atteignant l'intime de soi.

    Première page :

    "Il a de la chance. Il est vivant. Il rentre.

    Deux mots qui battent dans ses veines Je rentre. Depuis qu'il a compris qu'on le libérait, vraiment, il s'est enfoui dans ces deux mots. Réfugié là pour tenir et le sang et les os ensemble. Attendre. Ne pas se laisser aller. Pas encore.

    L'euphorie déçue, c'est un ravage, il le sait. Il ne peut pas se le permettre, il le sait aussi. Alors il lutte. Comme il a lutté pour ne pas basculer dans la terreur des mois plus tôt quand des hommes l'ont littéralement "arraché" de son bord de trottoir dans une ville en folie, ceinturé, poussé vite, fort, dans une voiture, quand toute sa vie est devenue juste un petit caillou qu'on tient serré au fond d'une poche. Il se rappelle. Combien de mois exactement depuis ? il ne sait plus. Il l'a su il a compté mais là, il ne sait plus rien.

    Ce matin, on l'a fait sortir de la pièce où il était enfermé, on lui a désentravé les pieds comme chaque matin et chaque soir quand on le conduit, les yeux bandés, à ce trou puant qui tient lieu de toilettes. Mais il n'a pas compté les dix-huit pas, comme d'habitude. Dix-neuf, vingt, vingt et un... il a cessé de compter, le cœur battant. On l'a conduit, les yeux toujours bandés, jusqu'à un avion."

    Ce que j'en pense :

    Roman intéressant qui montre bien comment chacun est prisonnier et peut réussir à s'échapper. Le style est précis, fait souvent de courtes phrases. J'ai cependant été un peu déçu car je n'ai pas réussi à pénétrer complètement dans ce livre, comme c'était le cas dans les autres livres de Benameur. J'ai eu l'impression de lire "du Benameur" ou même parfois "du Bobin" !

    Otages intimes

    Otages intimes

     

     

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    Une terre d'ombre

    "Une terre d'ombre" de Ron Rash - points seuil

    Présentation de l'éditeur :

    Laurel Shelton et son frère Hank vivent au fond d'un vallon encaissé des Appalaches. Marquée par une tache de naissance, Laurel est considérée comme une sorcière. Hank, revenu de la Première Guerre mondiale, y a laissé une main. Isolés, bannis, ils mènent une vie fastidieuse et solitaire. Mais lorsque Laurel rencontre un mystérieux joueur de flûte, sa vie bascule.

    Première page :

    "Laurel songea d'abord à une fauvette ou à une grive, mais - contrairement à toutes celles qu'elle avait déjà entendues - son chant était plus soutenu, si pur, semblait-il, que nulle respiration n'avait à le porter dans le monde. Elle sortit les mains du ruisseau et se releva. Elle repensa à l'oiseau que Mlle Calicut avait montré à sa classe. Un perroquet de Caroline, avait annoncé l'institutrice, qui avait déplié un foulard révélant le corps vert et la tête jaune et rouge. La plupart des perroquets vivent dans des pays tropicaux comme le Brésil, avait expliqué Mlle Calicut, mais pas celui-ci. Elle avait laissé les élèves se passer l'oiseau de main en main, en leur recommandant de bien le regarder et de ne pas oublier à quoi il ressemblait, car bientôt il n'en resterait plus, non seulement dans ces montagnes mais peut-être dans le monde entier.

    Seize ans avaient passé, pourtant Laurel se souvenait de la longue queue et du gros bec, du vert, du rouge et du jaune si éclatants qu'ils semblaient miroiter. Et surtout elle se souvenait que l'oiseau ne pesait rien dans la soie fraîche du foulard, comme si même dans la mort il conservait la légèreté de son vol. Laurel ne se rappelait pas si Mlle Calicut avait décrit le chant du perroquet, mais ce qu'elle entendait lui paraissait concorder, était aussi joli que les oiseaux eux-mêmes."

    Ce que j'en pense :

    Ce roman mêle adroitement les événements de la fin de la guerre 14/18, une peinture poétique de la nature, le portrait d'une petite ville avec son lot de gens bêtes et méchants et une belle histoire d'amour. On est comme envoûté par l'écriture car, même dans la description des bons moments, on sent pointer une inquiétude qui nous mènera vers la tragédie finale. je définirai ce roman comme un western noir.

     Une terre d'ombreUne terre d'ombreUne terre d'ombreUne terre d'ombre

     

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  • Vivement l'avenir

    "Vivement l'avenir" de Marie-Sabine Roger - Rouergue (La brune)

    Présentation de l'éditeur :

    «Dans les maternités, d'après moi, il n'y a que des princesses et des princes charmants, dans les petits berceaux en plastique. Pas un seul nouveau-né qui soit découragé, déçu, triste ou blasé. Pas un seul qui arrive en se disant :
    Plus tard, je bosserai en usine pour un salaire de misère. J'aurai une vie de chiotte et ce sera super. Tra-la-lère.»

    Après le succès de La tête en friche, adapté au cinéma par Jean Becker, Marie-Sabine Roger nous raconte, avec chaleur et drôlerie, une histoire d'une justesse rare sur notre époque.

    Première page :

    "Comment c'était venu dans la conversation, je ne sais plus très bien.
    C'était venu. C'est tout.
    L'origine, elle était peut-être à chercher du côté des clébards, quand la télé avait parlé de ceux qu'on abandonne à la SPA, au début des vacances. Tous ces braves chiens-chiens avec la truffe humide et dans leurs yeux marron de l'amour sans reproche.
    - Abandonner son chien ! Si c'est pas malheureux ! a dit Marlène, à un moment, en caressant Tobby. La peine de mort, il leur faudrait, à tous ces salopards !
    - Bah ! La peine de mort, faut pas pousser, non plus... Mais de la tôle, oui. Là, je dirais pas non ! a répondu Bertrand, de sa voix toujours calme.
    Jamais je ne l'ai vu énervé, celui-là.
    Marlène a secoué la tête. Quand elle a une idée, elle s'y tient."

    Ce que j'en pense :

    Beau moment de lecture, c'est plein d'optimisme, sans mièvrerie, alors que l'histoire se passe dans un quotidien plutôt gris, avec des personnages assez désabusés. L'écriture est toujours juste, pleine de trouvailles que l'on a envie de noter.

    Vivement l'avenir

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  • Le testament de Vénus

    "Le testament de Vénus" de Enzo Cormann - Gallimard

    Présentation de l'éditeur :

    «Je, soussigné Vénus, cinquante-cinq ans, né le 25 avril 1947...» Félix Fayard, dit Vénus, retrace le récit de sa vie sur trois cahiers sauvés de la poubelle. Dans cet almanach buissonnier se croisent et se bousculent les figures de sa mère Lucie, fille de meunier, et de Driss Ben Shaab, ce Père Non Connu. L'image de la jarre enfouie où il se réfugiait enfant, et le souvenir d'un chien tueur. Ses Leçons de Voyouterie à Paris puis en Afrique, et les années de prison qui en découlent. Ses Gamberges sur l'Être initiées à l'hôpital psychiatrique où sa mère l'a fait interner, et ses conversations avec le Mouvementeur, ce peintre qui l'enjoint de suivre ses impulsions de gribouilleur... 
    Devenu Artiste Général, le soussigné a conçu près de cinq mille pièces, qu'il expose dans sa galerie L'Amusée, avant que le progrès et ses hydrorapaces ne le chassent pour toujours du moulin de son enfance. Squattant dès lors une tannerie désaffectée sur les berges de l'Ire, il organise sa survie en marge d'un monde qui semble vouloir sa disparition. Rares sont ceux à visiter cet ermite tenu pour fou, voire dangereux, qui, revenu des fureurs du baroud, de la tentation de la folie et des affres de l'amour, n'aspire qu'à «rentrer à la maison»... 
    Cette geste drolatique d'un «œuvrier», nourrie des affinités d'Enzo Cormann avec l'art brut, restitue à un «homme de peu» sa grandeur déniée et lui donne acte de son échappée belle.

    Première page :

    "Je, soussigné Vénus, cinquante-cinq ans, né le 25 avril 1947 à Presques, enregistré à l'état civil sous le nom de ma mère, Fayard, et prénoms Paul André Félix, rebaptisé par amusement public ou méchanceté soiffarde, Bâtard, 'Tit Gris, Microuille, Grésil, j'en passe, et par folie, Vénus — Artiste Général —, certifie ce qui suit véritable, écrit en toute connaissance, pour faire valoir ce que de droit, quoique non fait chez le notaire, lequel maître Coin, maire de Nuit-sur-l'Ire, devenu Nuit-le-Lac, commune résidentielle du soussigné, refuse de l'inscrire sur les registres électoraux, par vexation administrative pour non-paie­ment d'impôt sur ladite commune. Le présent testament sera donc rédigé de la main même du soussigné, au stylo bic ordinaire, sur trois cahiers sauvés de la poubelle, lesquels seront cousus ensemble et postés le 13 septembre 2002 (aujourd'hui le 12 juillet). Chaque cahier comptant cent pages et restant au soussigné soixante-trois jours d'ici le 13 septembre, c'est au rythme de cinq pages quotidiennes qu'il lui faudra tester.

    Squattant depuis quinze ans une ancienne tannerie, mais ne manquant de rien pour qui sait se passer d'à peu près tout, le soussigné s'est toujours maintenu propre …"

    Ce que j'en pense :

    Long monologue (sans doute un peu trop long) à la gloire de l'art brut, à la lisière de la folie qui pourrait nous faire penser à un "croisement" entre Antonin Artaud et Gaston Chaissac. C'est souvent drôle, avec beaucoup d'auto dérision. Le style est percutant, direct et donne envie de lire à haute voix beaucoup de passages.

    Le testament de Vénus

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  • Dans la maison de l'autre

    "Dans la maison de l'autre" de Rhidian Brook - Fleuve noir

    Présentation de l'éditeur :

    Hambourg, 1946

    La ville est en ruines et la nation brisée. Si la guerre est terminée, la vie, elle peine à reprendre ses droits. Des ombres fantomatiques errent parmi les décombres à la recherche de nourriture, d'un proche, d'un espoir.
    Lewis Morgan, colonel de l'armée britannique, est chargé de superviser les opérations de reconstruction du territoire et de dénazification de la population. Il s'installe dans une somptueuse villa réquisitionnée à son intention avec son épouse et leur dernier fils encore en vie.
    Touché par leur situation, le colonel propose aux propriétaires des lieux, un architecte allemand éploré par la mort de sa femme et sa fille adolescente, de rester. Les deux familles partagent alors le même toit, se croisent, se frôlent, mais comment supporter pareille situation quand une haine viscérale continue d'opposer les deux peuples ? Dans cette ambiance oppressante, inimitiés et hostilités vont laisser place à des sentiments plus dangereux encore...

    Première page :

    "— La Bête est là. Je l'ai vue. Berti l'a vue. Dietmar l'a vue. Avec sa fourrure noire comme le manteau d'une dame chic. Et des dents comme des touches de piano. On doit la tuer. Si on ne le fait pas, qui le fera? Les Tommies? Les Yankees? Les Popov? Les Français? C'est pas eux qui le feront, ils sont trop occupés à chercher autre chose. Ils veulent un coup ci, un coup ça. Ils sont comme des chiens qui se disputent un os sans viande autour. C'est à nous de le faire. Attrapons la Bête avant qu'elle nous attrape. Après tout ira mieux.

    Le jeune Ossi rajusta son couvre-chef tout en guidant les autres à travers les décombres de la ville pulvérisée par les bombes des Tommies. Il portait le casque anglais qu'il avait volé à l'arrière d'un camion non loin de l'Alster. Même s'il avait moins de classe que les casques américains, voire russes, de sa collection, c'était celui qui lui allait le mieux. En plus, il l'aidait à jurer en anglais aussi bien que le sergent tommy qu'il avait vu hurler sur les prisonniers à Dammtor, la gare de Hambourg : « Eh! Mains en l'air, nom de Dieu! En l'air, j'ai dit ! Je veux les voir! Foutus crétins de Boches. » Ces hommes avaient tardé à lever les mains, non parce qu'ils n'avaient pas compris, mais parce qu'ils étaient trop affaiblis par le manque de nourriture. Foutus crétins de Boches ! Le reste de la tenue d'Ossi consistait en un mélange inventif de loques et de vêtements de luxe : robe de chambre de dandy, cardigan de vieille fille, chemise sans col de grand-père …"

    Ce que j'en pense :

    L'arrière plan historique est intéressant dans ce roman mais l'histoire en elle-même est assez convenue. Les personnages paraissent un peu "taillés à la serpe" et n'accrochent pas vraiment.

    Dans la maison de l'autre

     

     

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  • La brigade du rire

    "La brigade du rire" de Gérard Mordillat - Albin Michel

    Présentation de l'éditeur :

    Il y a Kowalski, dit Kol, Betty, licenciée de l imprimerie où elle travaillait. Dylan, prof d anglais et poète. Les jumelles Dorith et Muriel, pour qui la vie est une fête permanente. L Enfant-Loup, coureur et bagarreur. Suzana, infirmière en psychiatrie. Rousseau, beau gosse et prof d économie. Hurel, industriel, lecteur de Marx et de Kropotkine. Ils sont chômeurs, syndiqués, certains exilés, tous ont été des travailleurs. Pas des « cocos », ni des militants. Des hommes et des femmes en colère, qui décident de régler leur compte à cette société où l autorité du succès prime sur celle du talent. Des samouraïs, des mercenaires, une redoutable fraternité constituée en Brigade du rire. Leur projet ubuesque et génial tient à la fois de la supercherie que de la farce grotesque : kidnapper et faire travailler Pierre Ramut, l éditorialiste vedette de Valeurs françaises, et, dans un bunker transformé en atelier, l installer devant une perceuse à colonne pour faire des trous dans du dularium. Forcé de travailler selon ce qu il prescrit dans ses papiers hebdomadaires semaine de 48h, salaire de 20% inférieur au SMIC, productivité maximum, travail le dimanche , Ramut saura désormais de quoi il parle... 
    Le héros de ce roman c est l amitié qui unit cette ancienne équipe de hand-ball ; L héroïne, cette comédie loufoque, ce pied de nez à un système pétri de contradictions et enfermé dans ses convictions. Dans une grande fresque tragi-comique, fidèle à son univers Vive la sociale, Les Vivants et les Morts Gérard Mordillat parle du monde d'aujourd hui, de ses injustices, de ses luttes, de ceux qui refusent de se soumettre et se vengent d'un grand éclat de rire.

    Première page :

    "Il ne faisait pas encore tout à fait nuit quand Pierre Ramut sortit de l'hôtel Westminster au Touquet. Il prit une grande inspiration et soupira :

    Mais, c'est que les jours rallongent !

    Il rajusta son nœud papillon et ferma les yeux pour jouir de cet instant de paix et de silence. L'air était doux, à peine rafraîchi par un petit vent venu de la mer.

    Monsieur Ramut ! Monsieur Ramut s'il vous plaît !

    Une jeune fille blonde, lunettes en plastique rouge, décolleté avantageux, arrivait à sa rencontre, claquant des talons. Elle tenait à la main La France debout, le dernier essai du journaliste.

    Anne-Sophie Janvier, je fais un master d'économie, dit-elle en reprenant son souffle. Vous voulez bien me le dédicacer...

    Ramut ne se fit pas prier :

    -  Bien sûr, avec plaisir. Elle lui tendit un feutre noir.

    S'il vous plaît...

    Anne-Sophie ? Je ne me trompe pas ?"

    Ce que j'en pense :

    Bien sûr on rit, on se révolte, on partage les discours sur le monde d'aujourd'hui, ses injustices. Les personnages sont intéressants et quelques uns sont très originaux. Mais tout cela est un peu trop démonstratif, longuet et parfois assez "poussif".

    La brigade du rire

     

     

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  • La dictature des ronces

    "La dictature des ronces" de Guillaume Siaudeau - Alma éditeur

    Présentation de l'éditeur

    Un petit bout de terre perdu au milieu de la mer, un bouchon dans l'eau qui attend que ça morde. C'est là, sur l'île de Sainte-Pélagie, que s'installe un été le narrateur. Son ami Henri parti en voyage lui a confié la garde de la maison, du chien et du jardin. Une aubaine pour le narrateur qui s'ennuyait ferme. Bien décidé à sauver le potager des ronces et sa vie de l'atonie douce, il prend ses marques, observe le paysage, arpente ce nouveau territoire. Et fait d'étranges rencontres : un enfant inconsolable, un maire iconoclaste, un voisin au lourd secret, deux chasseurs d'étoiles... Petit à petit il se prend d'affection pour cet endroit unique et surprenant. L'île pourrait tout aussi bien être une planète perdue dans l'espace.

    Première page :

    "Cet été-là, le canapé avait conclu un marché avec mon postérieur, si bien qu'ils avaient fini par devenir les meilleurs amis du monde et qu'il fallait désormais faire des pieds et des mains pour les séparer. Les oiseaux s'étaient tous barrés quelque part à la campagne et il ne fallait plus compter que sur les croassements insupportables qu'une poignée d'irréductibles corbeaux baladait de long en large tout autour de l'immeuble.

    Puis un matin le téléphone a retenti comme une sirène annonçant un bombardement doux et inoffensif.

    J'avais rencontré Henry lors d'un boulot saisonnier, une dizaine d'années plus tôt. Nous étions restés très proches et depuis il m'arrivait de lui rendre visite une ou deux fois l'an (je n'en avais pas encore eu l'occasion depuis qu'il était parti s'installer à Sainte-Pélagie).

    C'était une île à la réputation étrange, à l'image d'Henry, et peu de touristes s'y aventuraient …"

    Ce que j'en pense :

    Un très beau livre, amusant, délicat, à l'écriture très poétique  C'est étonnant, surprenant et toujours émouvant. Une lecture qui donne envie de "remplir ses chaussures de sable pour avoir l'impression d'aller à la plage".

    La dictature des ronces

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