• La peau d'Elisa

    La peau d'Elisa

    "La peau d’Élisa" de Carole Fréchette - Actes Sud-Papiers

    Présentation de l'éditeur :

    Une femme seule, assise devant nous. Une femme de chair, d'os et de sang, qui se livre à un étrange rituel. Avec délicatesse, elle raconte des histoires d'amour. Des histoires vraies qui sont arrivées dans des lieux précis d'une ville précise. Elle insiste avec minutie sur tous les détails intimes : le cœur qui bat, les mains moites, le souffle court, la peau qui frémit sous les doigts. Tour à tour, elle évoque le souvenir de Sigfried qui était fou, de Jan qui voulait tout et tout de suite, d'Edmond qui l'attendait sous les arbres l'après-midi et aussi de Ginette qui était boulotte et d'Anna qui lui a dit les choses qu'on rêve d'entendre... Qui est-elle, cette femme au passé multiple et pourquoi raconte-t-elle tout cela ? Elle parle avec fébrilité, comme si elle était en danger, comme si son cœur, sa vie, sa peau en dépendaient. Peu à peu, à travers ses récits, elle révèle ce qui la pousse à raconter et livre le secret insensé qu'un jeune homme lui a confié, un jour, dans un café...

    Première page :

    "Élisa est assise et s'adresse au public. On la sent un peu inquiète. On ne sait pas depuis combien de temps elle est là ni depuis combien de temps elle parle.

    Élisa. Qu'est-ce que je disais ? Ah oui. Ça s'est passé à Saint-Gilles, quand je portais des pantalons péruviens et des ceintures larges comme ça, avec des clochettes. Je le croisais tous les midis, clans la rue de la Glacière. Une rue terne et triste. Il était assez petit, et pas vraiment beau, mais il avait... Je sais pas... Il était différent. J'avais dix-sept ans, peut-être dix-huit. Je portais des grandes ceintures avec des clochettes qui tintaient quand je marchais. Les entendez-vous, les clochettes ? Lui aussi portait des vêtements colorés : des chemises de pirate, des pantalons bouffants, des vestes bariolées. Il y avait une espèce de compétition entre nous ; c'était à celui qui irait le plus loin dans l'extravagance. Quand on se croisait, on se regardait du coin de l'œil, et on comptait nos points, en silence. Quelquefois, son coude frôlait le mien et ça faisait une petite étincelle qui éclairait pendant quelques secondes la rue de la Glacière, qui était terne et triste. Et puis, j'allais à mon école et lui à la sienne. Et c'était tout. Notre vie de jeunes gens volages suivait son cours. Plus tard, j'ai changé d'école ; on s'est retrouvés dans la même classe et on est devenus amis. On a fait toutes sortes de folies. On allait se baigner dans les piscines privées, la nuit. Un jour, il a enlevé le toit de son auto au chalumeau, pour faire une décapotable. Quand il pleuvait, il fallait la vider avec un petit seau, comme une chaloupe. On riait beaucoup. Il était fou, Sigfried. Il s'appelait Sigfried. C'était gai, mais on ne s'aimait pas encore. Pas complètement… Je veux dire avec la peau et la bouche et tout. (Elle s'arrête.) Excusez-moi.

    Elle prend un petit miroir et regarde son visage, attentivement. Elle passe le doigt autour de sa bouche, puis elle reprend."

    Ce que j'en pense :

    C'est presque un monologue, toujours adressé au public. Le texte est magnifique, assez troublant, poétique, rempli d'émotion. A la fin du livre l'auteure raconte comment cette histoire est née à partir d'un projet "écrire la ville" à Bruxelles et cela apporte encore plus de force au texte.

    La peau d'Elisa

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