• Tout homme est une nuit

    "Tout homme est une nuit" de Lydie Salvayre - Seuil

    Présentation de l'éditeur :

    Des hommes retournent sur d'autres la brutalité d'un ordre dont ils souffrent. Ils s'inventent à peu de frais de commodes ennemis. Certaines frayeurs en eux les agissent.

    Des questions vieilles comme le monde mais d'une brûlante actualité, auxquelles Lydie Salvayre donne ici forme littéraire.

    Un roman, donc, et d'une causticité jubilatoire, où vont se faire face, d'une part : un solitaire, un lettré, un pas-tout-à-fait-pareil, un pas-tout-à-fait-conforme, un homme malade qui a choisi de se retirer dans un lieu de beauté, et de l'autre : les habitants d'un paisible village que l'arrivée de ce nouveau, de cet intrus, bouscule et profondément déconcerte.

    Très vite surgiront, entre l'un et les autres, l'incompréhension et la méfiance, puis les malentendus et les soupçons mauvais, puis les grandes peurs infondées et les violences que sourdement elles sécrètent. Puisque tout homme est une nuit.

    Première page :

    "Plus jamais ! C’est l’injonction que je me fis en traversant au pas de gymnastique le village où je pensais trouver le repos, sans bien savoir si cette injonction relevait du dépit, de la colère, ou d’une combinaison des deux. Je n’y remettrai plus jamais les pieds !

    Mais arrivé chez moi, dans ce qui me tenait lieu de chez-moi, j’essayai de réfléchir posément à l’accueil assez frais que m’avaient réservé les clients du Café des Sports (mes pensées fonctionnaient toujours à retardement). Et comme je ne voulais à aucun prix que mon séjour ici commençât par une défaite, je minimisai la gravité de ma mésaventure et m’en fis le seul responsable.

    Je me dis que je n’aurais jamais dû entrer aussi légèrement dans ce café, qu’entrer dans ce café exigeait peut-être je ne sais quels laissez-passer préalables, je ne sais quelles autorisations plus ou moins tacites que, par ignorance, j’avais enfreints. "

    Ce que j'en pense :

    Je suis plutôt déçu par ce livre de Lydie Salvayre. Le sujet est intéressant, la forme aussi, au moins au début car ensuite cela finit par lasser - cette confrontation des deux styles (le "populaire" et le "bien parlé"). L'ensemble est quand même assez manichéen, plein de clichés et finalement je ne suis pas certain qu'un tel livre fasse changer quelque chose dans les mentalités par rapport à l'étranger.

    Tout homme est une nuit

     

     

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  • Les loyautés

    "Les loyautés" de Delphine De Vigan - JC Lattès

    Présentation de l'éditeur :

    Chacun de nous abrite-t-il quelque chose d'innommable susceptible de se révéler un jour, comme une encre sale, antipathique, se révélerait sous la chaleur de la flamme ? Chacun de nous dissimule-t-il en lui-même ce démon silencieux capable de mener, pendant des années, une existence de dupe ?

    Première page :

    "HÉLÈNE

    J’ai pensé que le gamin était maltraité, j’y ai pensé très vite, peut-être pas les premiers jours mais pas longtemps après la rentrée, c’était quelque chose dans sa façon de se tenir, de se soustraire au regard, je connais ça, je connais ça par cœur, une manière de se fondre dans le décor, de se laisser traverser par la lumière. Sauf qu’avec moi, ça ne marche pas. Les coups je les ai reçus quand j’étais gosse et les marques je les ai cachées jusqu’au bout, alors à moi, on ne me la fait pas. Je dis le gamin parce que franchement il faut les voir, les garçons, à cet âge-là, avec leurs cheveux fins comme ceux des filles, leur voix de petit poucet, et cette incertitude qui colle à leurs mouvements, il faut les voir s’étonner grands yeux écarquillés, ou se faire engueuler, mains nouées derrière le dos, la lèvre tremblotante, on leur donnerait le bon Dieu sans confession. Pourtant, il n’y a aucun doute, c’est à cet âge-là que ça commence, les vraies conneries."

    Ce que j'en pense :

    Voilà un très bon roman choral avec 4 personnages. Ils ont chacun leurs blessures plus ou mois visibles. La force de l'auteure c'est de montrer sans juger, d'esquisser sans démontrer, de ne pas tout décrire, de laisser l'histoire continuer après avoir fermé le livre.

    Les loyautés

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  • Ma ZAD

    "Ma ZAD" de Jean-Bernard Pouy - Gallimard série noire

    Présentation de l'éditeur :

    Camille Destroit, quadra, responsable des achats du rayon frais à l'hyper de Cassel, est interpellé lors de l'évacuation du site de Zavenghem, occupé par des activistes. À sa sortie de GAV, le hangar où il stockait des objets de récup destinés à ses potes zadistes n'est plus qu'un tas de ruines fumantes, son employeur le licencie, sa copine le quitte... et il se fait tabasser par des crânes rasés. Difficile d'avoir pire karma et de ne pas être tenté de se radicaliser! 
    Heureusement, la jeune Claire est là qui, avec quelques compagnons de lutte, égaye le quotidien de Camille et lui redonne petit à petit l'envie de lutter contre cette famille de potentats locaux, ennemis désignés des zadistes, les Valter.

    Première page :

    "Emballez c’est pesé.

    Le 16, victoire (passagère).

    Le 17, triomphe (aviné).

    Le 18, la paix (revenue).

    Le 19, la baston (à nouveau).

    Le 21, l’incendie (salauds !).

    La vie sans cesse recommencée.

    Le 16, le tribunal de grande instance a statué. Le projet de la plateforme multimodale de Zavenghem est, en l’état, annulé ainsi que, pour vice de forme, l’enquête d’utilité publique, plombée par trop de manques et de mensonges (euphémisme…). Yarglaaa !

    Dans la foulée, le 16 également, le tribunal administratif, sous la pression des plaintes déposées par de nombreuses associations locales mais aussi nationales, donne trois ans aux initiateurs et prestataires du projet, et notamment la société de BTP Valter & Frères,…"

    Ce que j'en pense :

    Le "héros" s'appelle Camille, comme la plupart des gens de la ZAD de Notre Dame des Landes. J'ai lu ce livre alors que pleuvaient les grenades sur les zadistes de la région nantaise. Avec Pouy, il y a toujours un côté anar, drôle, en colère , déjanté, un peu amer, mais avec une grande culture musicale, cinématographique et politique.

    Ma ZAD

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  • La daronne

    "La daronne" de Hannelore Cayre - Points policiers

    Présentation de l'éditeur :

    Patience Portefeux, 53 ans, deux filles, un chien, un fiancé flic et une vieille mère en EHPAD. Patience trime, Patience est traductrice de l'arabe pour le ministère de la Justice. Des milliers d'heures à transcrire des écoutes entre petits dealers et grands bandits. Puis Patience franchit la ligne jaune : elle détourne une montagne de cannabis issue d'un Go Fast. Sans culpabilité ni effroi. Simplement une petite entorse morale. Et encore.
    Et Patience devient la Daronne.

    Première page :

    "L’argent est le Tout 

    Mes fraudeurs de parents aimaient viscéralement l’argent. Pas comme une chose inerte qu’on planque dans un coffre ou que l’on possède inscrit sur un compte. Non. Comme un être vivant et intelligent qui peut créer et tuer, qui est doué de la faculté de se reproduire. Comme quelque chose de formidable qui forge les destins. Qui distingue le beau du laid, le loser de celui qui a réussi. L’argent est le Tout ; le condensé de tout ce qui s’achète dans un monde où tout est à vendre. Il est la réponse à toutes les questions. Il est la langue d’avant Babel qui réunit tous les hommes.

    Il faut dire qu’ils avaient tout perdu, y compris leur pays. Il ne restait plus rien de la Tunisie française de mon père, rien de la Vienne juive de ma mère. Personne avec qui parler le pataouète ou le yiddish. Pas même des morts dans un cimetière. Rien. Gommé de la carte, comme l’Atlantide. Ainsi avaient-ils uni leur solitude pour aller s’enraciner dans un espace interstitiel entre une autoroute et une forêt afin d’y bâtir la maison dans laquelle j’ai grandi, nommée pompeusement La Propriété. Un nom qui conférait à ce bout de terre sinistre le caractère inviolable et sacré du Droit…"

    Ce que j'en pense :

    Une histoire très originale, avec ce qu'il faut de décalage, d'humour et un petit côté cynique et presque désespéré. Ce livre, très bien écrit, aborde aussi des sujets assez rares dans les polars : les survivants des camps, ce que l'on transmet à ses enfants, la fin de vie dans les maisons de retraite.

    La daronne

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  • Comment j'ai rencontré les poissons

    "Comment j'ai rencontré les poissons" de Ota Pavel - éditions do

    Présentation de l'éditeur :

    Les poignantes mais souvent joyeuses histoires de ce livre composent la tendre chronique d un homme qui se souvient de son père, génial représentant de commerce et grand amoureux de la pêche, géant captivant et charmeur aux yeux de l enfant qu il était. Elles commencent simplement, par ce regard de l enfance, puis elles se développent pour illustrer la prise de conscience d un garçon qui grandit et observe le monde autour de lui. Et si elles reconstituent l'histoire de sa famille, avec en arrière-plan celle de l Europe centrale, elles sont en réalité beaucoup plus que cela : de touchantes méditations sur la vie et la survie, la mort et la mémoire, l'humour, la justice et la compassion.

    Première page :

    "LE PLUS CHER DE TOUTE L’EUROPE CENTRALE

    Avant la guerre, maman avait une envie folle de se rendre en Italie. Ce n’était pas tellement pour voir les statues de Michel-Ange ou les tableaux de Léonard de Vinci, mais plutôt pour se baigner au moins une fois dans une mer tiède. Originaire de Drin près de Kladno, où il n’y avait qu’une pauvre petite mare aux canards sur laquelle flottait une couche épaisse et verte de lentilles d’eau, elle n’avait jamais pu, dans sa jeunesse, profiter d’une bonne baignade. Alors, à chaque printemps, elle posait à papa la même question : — Mon petit Leo, est-ce qu’on y va cette année ? Mon papa Leo répondait généralement que justement cette année nous n’avions pas assez d’argent et qu’à son avis, on serait beaucoup mieux près de Krivoklat, sur la rivière Berounka. Car papa avait bien d'autres préoccupations. Au premier rang de ses intérêts se trouvaient le commerce et les poissons. Il était exceptionnellement doué pour ces deux activités, mais donnait une préférence aux poissons, ce qui était fort préjudiciable tant à notre famille qu’à la maison suédoise Electrolux, où il était représentant en réfrigérateurs et aspirateurs. Parfois il disparaissait carrément de sa tournée et on le retrouvait sur la Berounka avec son meilleur ami le batelier Karel Prosek, à pêcher le brochet en appâtant avec des perches."

    Ce que j'en pense :

    Un peu déçu par ce livre dont on m'avait dit le plus grand bien. Certes, il y a de beaux passages, de l'humour. La vie en Tchécoslovaquie dans ces années avant et après la guerre est assez bien décrite et le personnage du père est magnifique... mais il faut vraiment beaucoup aimer les poissons ! Et, à partir du milieu du livre il nous arrive de nous ennuyer.... j'avoue avoir sauter quelques passages.

    Comment j'ai rencontré les poissons

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