• Une autre saison comme le printemps

    "Une autre saison comme le printemps" de Pierre Pelot - Héloïse d'Ormesson

    Présentation de l'éditeur :

    Devenu un auteur à succès aux États-Unis, où il vit désormais, François Dorall revient en France pour participer à un festival de polar, à Metz. Une nuit, lorsque Elisa, une amie d’enfance, le supplie de retrouver son fils de 9 ans qui a été kidnappé, il a soudain l’étrange impression d’être plongé dans l’un de ses livres. N’est-il pas spécialiste des disparitions mystérieuses ? Dorall hésite, mais ne lui doit-il pas cela ? Le romancier se mue en enquêteur. Et pendant ce temps-là, un petit garçon se dirige vers le Sud en compagnie d’un homme qu’il appelle papa.

    Une autre saison comme le printemps est une histoire qui ne ressemble à aucune autre, où les indices de l’énigme sont savamment distillés au détour des mots. Mais c’est avant tout une interprétation poignante de ce que peut faire l’amour quand la mort l’a privé de son objet.

    Première page :

    "AVANT, LES PRÉS DESCENDAIENT en pente douce jusqu’à la rivière, en dessous de la maison. Des arbres bordaient le cours d’eau. La route passait de l’autre côté, à une dizaine de mètres au plus près de la rive, calquant ses méandres sur ceux de la rivière. Avant, quand les arbres avaient des feuilles, on ne voyait même pas la route.

    Et puis le tout-venant des hommes politiques se retrouva à même de prendre des décisions, et ces gens-là ne s’adressaient plus à des « citoyens » mais à des « consommateurs », des « électeurs », des « automobilistes ». Ces gens-là estimaient manquer leur carrière s’ils n’avait pas à leur actif la création d’une portion quelconque d’autoroute, une voie de contournement ou une zone industrielle.

    Ils tracèrent donc la route de ce côté-ci de la rivière, en plein milieu des prés, ce qui coupa quelques virages, permit aux usagers de rouler un peu plus vite, aux accidents de se multiplier. Au trafic des camions de s’écouler sans discontinuer.

    Un de ces camions avait tué le chien du vieil homme.

    Le chien n’était plus tout jeune. Lui aussi avait vécu le temps où l’ancienne route passait de l’autre côté de la rivière…"

    Ce que j'en pense :

    Voilà une histoire complexe où il est question de revenants, de deuil… mais ce n'est pas un roman fantastique, ni complètement un polar. Difficile de le faire entrer dans une case (c'est souvent le cas chez Pelot). Les retours en arrière sont fréquents. Les indices sont distribués au compte goutte. C'est plaisant à  lire à condition d'accepter de se laisser surprendre.

    Une autre saison comme le printemps

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  • Rêves oubliés

    "Rêves oubliés" de Léonor de Récondo - Points

    Présentation de l'éditeur :

    À l’ombre des pins, ils ont oublié le bruit de la guerre et la douleur de l’exil. Dans cette ferme au cœur des Landes, Aïta, Ama et leurs trois enfants ont reconstruit le bonheur. Dans son journal, Ama raconte leur quotidien, l’amour, la nécessité de s’émerveiller des choses simples et de vivre au présent. Même dans la fuite, même dans la peur, une devise : être ensemble, c’est tout ce qui compte.

    Première page :

    "Aïta est assis sur le lit défait, il tient sa tête entre ses mains. Partir maintenant. Ces mots martèlent sa pensée. Partir maintenant à Irún. Il se lève, fait quelques pas dans la chambre. Il jette un coup d’œil distrait au miroir qui surplombe la commode. Il scrute un instant cette vie qu’il laisse. Pour combien de temps ? Quelques mois, tout au plus. Le temps de retrouver Ama et les enfants. Être ensemble, c’est tout ce qui compte. Il s’approche de la commode et prend une des photos encadrées, celle qu’il préfère, celle qu’il regarde chaque soir avant de se coucher. Il y a Ama et son sourire, Ama et leurs trois fils. Le petit est dans ses bras, les deux autres s’accrochent à sa jupe. Bonheur furtif, piégé sur du papier, volé par lui un après-midi ensoleillé, alors qu’ils se promenaient dans les jardins d’Aranjuez, cette ville qu’il doit quitter. Il sort la photo de son cadre en verre biseauté. Il la caresse du regard, puis la glisse dans la poche de sa chemise."

    Ce que j'en pense :

    C'est un livre rempli de mélancolie et de tristesse. Il y a aussi bien sûr de l'émotion à suivre le parcours de ces exilés espagnols. On se dit que c'est un beau texte mais on ne réussit pas complètement à y entrer comme si tout cela était trop lisse.

    Rêves oubliés

     

     

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  • Une longue impatience

    "Une Longue impatience" de Gaëlle Josse - Notabilia

    Présentation de l'éditeur :

    Ce soir-là, Louis, seize ans, n’est pas rentré à la maison. Anne, sa mère, dans ce village de Bretagne, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, voit sa vie dévorée par l’attente, par l’absence qui questionne la vie du couple et redessine celle de toute la famille. 

    Chaque jour, aux bords de la folie, aux limites de la douleur, Anne attend le bateau qui lui ramènera son fils. Pour survivre, elle lui écrit la fête insensée qu’elle offrira pour son retour. Telle une tragédie implacable, l’histoire se resserre sur un amour maternel infini. 

    Avec Une longue impatience, Gaëlle Josse signe un roman d’une grande retenue et d’une humanité rare, et un bouleversant portrait de femme, secrète, généreuse et fière. Anne incarne toutes les mères qui tiennent debout contre vents et marées. 

    « C’est une nuit interminable. En mer le vent s’est levé, il secoue les volets jusqu’ici, il mugit sous les portes, on croirait entendre une voix humaine, une longue plainte, et je m’efforce de ne pas penser aux vieilles légendes de mer de mon enfance, qui me font encore frémir. Je suis seule, au milieu de la nuit, au milieu du vent. Je devine que désormais, ce sera chaque jour tempête. »

     

    Première page :

    "Ce soir, Louis n’est pas rentré. Je viens d’allumer les lampes dans le séjour, dans la cuisine, dans le couloir. Leur lumière chaude et dorée, celle qui accompagne la tombée du jour, si réconfortante, ne sert à rien. Elle n’éclaire qu’une absence. Dans leur chambre, baignés, séchés, au chaud dans leurs pyjamas aux couleurs douces, les petits sont à leurs  jeux, à leurs leçons, à leur monde. Puis ils ont faim, les voilà à la cuisine, qui me demandent pourquoi Louis n’est pas là. Je ne sais que leur dire. Peut-être vais-je leur expliquer qu’il va arriver ; il sera resté faire ses devoirs chez un ami, ils auront bavardé, il se sera attardé et aura laissé passer l’heure. Et j’essaierai de croire mes propres paroles tout en préparant le repas, en surveillant le four, en disposant les assiettes, les verres, en rangeant la vaisselle superflue empilée sur l’évier, il ne va pas tarder, venez dîner."

    Ce que j'en pense :

    Un livre d'une très belle écriture, légère, poétique, qui nous donne une grande émotion. C'est à la fois d'une immense tristesse et d'un amour considérable, au point de ressembler à une tragédie grecque.  En peu de mots les atmosphères sont présentes, respirables. C'est un très beau portrait de femme, un des meilleurs livres de Gaëlle Josse.

    Une longue impatienceUne longue impatienceUne longue impatienceUne longue impatienceUne longue impatience

     

     

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  • L'art presque perdu de ne rien faire

    "L'art presque perdu de ne rien faire" de Dany Laferrière - Grasset

    Présentation de l'éditeur :

    La nonchalance est une affaire de connaisseur. « J’étais devenu un spécialiste mondial de la sieste », nous révèle Dany Laferrière dès le début de son livre. Cela n’interdit pas de lire et de réfléchir – la sieste y est, au contraire, propice. Elle permet aux pensées de jaillir, s’attachant aux petites et aux grandes choses, aux rêves et aux lectures. Dany Laferrière nous parle d’Obama et de l’Histoire, de ses premières amours nimbées d’un parfum d’ilang-ilang, de Salinger et de Borges, de la guitare hawaïenne, du nomadisme et de la vie – car cet Art presque perdu de ne rien faire est, ni plus ni moins, un art de vivre.

    Première page :

    "Dès qu’on commence à se plaindre que le son est trop fort dans les discothèques, que les policiers sont trop jeunes et qu’ils nous font rire sous cape quand ils prennent cette allure de faux cow-boys, que les voitures roulent trop vite, que les gens ne respectent plus les règles de la circulation et que plus personne ne sait à quoi sert le feu jaune, que la politesse est devenue une forme de flatterie publique, que les femmes qu’on a connues rajeunissent à si folle allure qu’on a l’impression de les croiser en remontant le temps, que les médecins sont devenus insensibles aux états d’âme de patients eux-mêmes survoltés, qu’on n’arrive pas à comprendre ce que disent ces animateurs de la télé qui n’articulent pas et parlent décidément trop vite, dès qu’on se plaint que des gens qu’on connaît à peine vous téléphonent tôt le dimanche matin, qu’il n’y a plus de bons écrivains comme du temps de Malraux et Miller, que le cinéma italien a connu son âge d’or dans les années 60 et qu’on n’aura plus jamais de cinéastes comme Fellini, Rossellini et Antonioni, que Kerouac et sa bande nous semblent décidément trop insouciants pour qu’on les suive aveuglément dans cette joyeuse balade à travers une Amérique qui tente timidement de s’échapper de ces molles années 50, que l’injustice et le racisme restent les deux mamelles du capitalisme comme du communisme, que c’était plus rassurant pour l’équilibre du monde quand la Russie pouvait encore faire face aux États-Unis, dès qu’on ne se souvient plus de ce qu’on faisait le jour de la mort de John Kennedy,…"

    Ce que j'en pense :

    Des réflexions sages, philosophiques au fil de la vie, sur des sujets très divers. C'est à la fois simple et érudit, familier et grave, il y a de l'humour, de l'ironie. Ce n'est pas un livre à lire d'une traite (on risquerait de le trouver trop long) mais il faut l'ouvrir au hasard et déguster quelques pages.

    L'art presque perdu de ne rien faire

    L'art presque perdu de ne rien faire

     

     

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  • De cendre et d'os

    "De cendre et d'os" de John Harvey - Rivages/Noir

    Présentation de l'éditeur :

    Katherine, la fille de l'inspecteur Frank Elder, est toujours profondément traumatisée par le viol qu'elle a subi de la part d'un criminel que traquait son père. Ce dernier est toujours rongé par la culpabilité. A Londres, le sergent Maddy Birch se remet difficilement d'une arrestation violente au cours de laquelle l'un de ses jeunes collègues a été tué. Depuis ce tragique épisode, elle a l'impression d'être épiée, son cadavre sera découvert quelques semaines plus tard auprès d'une voie de chemin de fer désaffectée. Frank Elder n'a jamais oublié Maddy, ils avaient connu un bref moment de passion amoureuse, il y a seize ans. Alors Frank va accepter de collaborer à l'enquête sur la mort et retrouver le chemin des souvenirs, aux côtés de deux femmes officiers de police, Karen et Vanessa. 

    Première page :

    "Maddy Birch avait bel et bien dépassé le cap de la trentaine. Et même celui de la quarantaine. S'écartant du miroir, elle regarda d'un sale œil les rides qui commençaient à se dessiner aux coins de sa bouche, de ses yeux ; le gris qui s'insinuait dans ses cheveux par ailleurs bruns, presque châtains. A son prochain anniversaire, elle fêterait ses quarante-quatre ans. Inspectrice à la S07, la brigade de répression du crime organisé, elle avait quelques centaines de livres à la banque, et un appartement dont elle n'avait pas fini de payer les traites, situé dans cette partie de Upper Holloway que les agents immobiliers du nord de Londres se permettaient de rebaptiser Highgate Borders. Le bilan était maigre pour une femme qui avait passé la moitié de sa vie dans la police. Les rides mises à part.

    Tirant énergiquement ses cheveux en arrière, elle les noua à l'aide d'un bandeau écarlate qu'elle avait sorti de sa poche. Elle recula d'un pas, jeta un coup d'œil à ses chaussures montantes, au devant de son jean, ferma les attaches en Velcro de son gilet pare-balles, tira une dernière fois sur sa queue de cheval, et regagna la salle principale.

    Le personnel concerné était si nombreux que le briefing avait dû se tenir dans la salle de réunion…"

    Ce que j'en pense :

     Un bon polar qui continue la série des "Elder". On retrouve beaucoup d'ingrédients qui ont fait le succès de John Harvey : l'humanité, l'empathie, la solitude, une approche sociétale assez juste, une tendresse un peu maladroite, les relations familiales complexes... et la Cornouailles, même si elle est moins présente dans ce livre.

    De cendre et d'os

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