• De chair et de sang

    "De chair et de sang" de John Harvey - Rivages/Noir

    Présentation de l'éditeur :

    APRES TRENTE ANS DE BONS ET LOYAUX SERVICES DANS LA POLICE DE NOTTINGHAM, L'INSPECTEUR PRINCIPAL FRANK ELDER A DONNÉ SA DÉMISSION. IL S'EST RÉFUGIÉ DANS UN COTTAGE EN CORNOUAILLES, MAIS LE PASSÉ CONTINUE DE LE HANTER. IL NE S'EST JAMAIS REMIS D'UNE AFFAIRE NON ÉLUCIDÉE : LA DISPARITION, EN 1998, DUNE ADOLESCENTE NOMMÉE SUSAN BLACKLOCK. DEUX PSYCHOPATHES CONDAMNÉS À L'ÉPOQUE POUR LE VIOL ET LE MEURTRE D'UNE AUTRE JEUNE FILLE RESTENT POUR L'INSPECTEUR DES SUSPECTS IDÉAUX.
    APPRENANT QUE L'UN D'EUX VA BÉNÉFICIER D'UNE LIBÉRATION, FRANK ELDER S'INTÉRESSE DE NOUVEAU À L'AFFAIRE BLACKLOCK. IL NE SE DOUTE PAS QU'IL VA PLONGER JUSQU'AU COU DANS UN DRAME AUQUEL SERA MÊLÉE SA PROPRE FAMILLE.
    CE PREMIER ROMAN DE LA SÉRIE CONSACRÉE À FRANK ELDER CONFIRME TOUTE L'ÉTENDUE DU TALENT DE JOHN HARVEY, RÉCOMPENSÉ EN GRANDE-BRETAGNE PAR UN DIAMOND DAGGER POUR L'ENSEMBLE DE SON OEUVRE.

    Première page :

    "Caressant et insidieux, le chat lui frôla le visage. Elder, encore aux trois quarts endormi, le repoussa du bras. Quelques instants plus tard, l'animal revenait à la charge, lui donnant des petits coups de tête, son ronronnement sonore résonnant dans le crâne d'Elder. Aiguisées, les griffes du chat pétrirent la chair tendre du haut de son épaule, de sa nuque. Sous lui, l'oreiller exhalait une acre odeur de sueur. Laborieusement, il se tourna pour soulever l'animal et l'écarter de lui. Sous ses doigts, il sentit une fourrure moite aux poils entremêlés, une peau flasque qui pendait, trop ample, sur une cage thoracique étriquée. À travers les fentes des paupières, les yeux brillaient d'une lueur jaune dans la quasi-obscurité.
    Tandis qu'Elder faisait l'effort de se redresser sur son séant, le chat se tortilla entre ses mains et le mordit profondément à la base du pouce. Poussant un juron, Elder laissa l'animal tomber sur le lit d'où il bondit sur le plancher en crachant. Quand Elder porta sa main à sa bouche, le goût de son propre sang lui parut âpre et piquant.
    Et à présent il y avait d'autres chats, en groupes serrés de deux ou trois, qui émergeaient de l'ombre aux confins de la chambre. Elder entendait le souffle un peu rauque de leur respiration sauvage…"

    Ce que j'en pense :

    Un bon polar : du suspens, des personnages avec de l'épaisseur, une grande humanité chez l'inspecteur (et chez les autres policiers), une bonne qualité d'écriture, de la chair (un peu plus que dans la série des Ressnick)… un livre qui donne envie de continuer la série des Elder.

    De chair et de sang

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  • La tresse

    "La tresse" de Laetitia Colombani - Grasset

    Présentation de l'éditeur :

    Trois femmes, trois vies, trois continents. Une même soif de liberté.
    Inde. Smita est une Intouchable. Elle rêve de voir sa fille échapper à sa condition misérable et entrer à l’école.
    Sicile. Giulia travaille dans l’atelier de son père. Lorsqu’il est victime d’un accident, elle découvre que l’entreprise familiale est ruinée.
    Canada. Sarah, avocate réputée, va être promue à la tête de son cabinet quand elle apprend qu’elle est gravement malade.
    Liées sans le savoir par ce qu’elles ont de plus intime et de plus singulier, Smita, Giulia et Sarah refusent le sort qui leur est destiné et décident de se battre. Vibrantes d’humanité, leurs histoires tissent une tresse d’espoir et de solidarité.

    Première page :

    "Smita

    Village de Badlapur, Uttar Pradesh, Inde.

    Smita s’éveille avec un sentiment étrange, une urgence douce, un papillon inédit dans le ventre. Aujourd’hui est une journée dont elle se souviendra toute sa vie. Aujourd’hui, sa fille va entrer à l’école.

    À l’école, Smita n’y a jamais mis les pieds. Ici à Badlapur, les gens comme elle n’y vont pas. Smita est une Dalit. Intouchable. De ceux que Gandhi appelait les enfants de Dieu. Hors caste, hors système, hors tout. Une espèce à part, jugée trop impure pour se mêler aux autres, un rebut indigne qu’on prend soin d’écarter, comme on sépare le bon grain de l’ivraie. Comme Smita, ils sont des millions à vivre en dehors des villages, de la société, à la périphérie de l’humanité.

    Tous les matins, c’est le même rituel. À la manière d’un disque rayé rejouant à l’infini une symphonie infernale, Smita s’éveille dans la cahute qui lui sert de maison, près des champs cultivés par les Jatts. Elle lave son visage et ses pieds à l’eau rapportée la veille du puits, celui qui leur est réservé. Pas question de toucher à l’autre, celui des castes supérieures, pourtant proche et plus accessible. Certains sont morts pour moins que ça. Elle se prépare, coiffe Lalita, embrasse Nagarajan. Puis elle prend son panier de jonc tressé, ce panier que sa mère portait avant elle et qui lui donne des haut-le-cœur rien qu’à le regarder, ce panier à l’odeur tenace, âcre et indélébile, qu’elle porte toute la journée comme on porte une croix, un fardeau honteux. Ce panier, c’est son calvaire. Une malédiction. Une punition. Quelque chose qu’elle a dû faire dans une vie antérieure, il faut payer, expier, après tout cette vie n’a pas plus d’importance que les précédentes, ni les suivantes, c’est juste une vie parmi les autres, disait sa mère. C’est ainsi, c’est la sienne."

    Ce que j'en pense :

    Écriture simple, l'auteure va directement au but en racontant succinctement trois histoires qui se croisent. C'est bien fait, émouvant (surtout pour la partie Indes), c'est fait pour plaire. J'aurai souhaité que le récit de Smita, l'indienne intouchable, soit plus approfondi, plus long, plus fouillé car on est à la fois attiré et révolté par cette civilisation.

    La tresse

    La tresse

     

     

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  • Ton père

    "Ton père" de Christophe Honoré - Mercure de France

    Présentation de l'éditeur :

    «Je m'appelle Christophe et j'étais déjà assez âgé quand un enfant est entré dans ma chambre avec un papier à la main.» 
    C'est par cette première phrase que Christophe Honoré nous fait entrer dans le fulgurant autoportrait romancé d'un homme d'aujourd'hui qui lui ressemble mais qui n'est pas tout à fait lui. Lui, le cinéaste, le metteur en scène de théâtre et d'opéra, mais avant tout l'écrivain. 
    Sur le papier que sa fille de dix ans a trouvé épinglé à la porte de son appartement, ces mots griffonnés au feutre noir : « Guerre et Paix : contrepèterie douteuse». Alors, très vite, tout s'emballe et devient presque polar. Qui a écrit ces mots? Qui le soupçonne d'être un mauvais père? Peut-on être gay et père? Le livre nous conduit soudain dans tous les recoins d'une vie mais aussi au cœur de l'adolescence – en Bretagne, avec la découverte du désir, des filles, des garçons, du plaisir, de la drague. 
    Un livre à la fois puissant et énigmatique, d'une merveilleuse liberté, à la mesure de son sujet.

    Première page :

    "Je m’appelle Christophe et j’étais déjà assez âgé quand un enfant est entré dans ma chambre avec un papier à la main. Il a agité le papier. Il a agité une punaise dans l’autre main. Il a continué et rapproché ses mains et les a éloignées et un courant magnétique a semblé circuler entre ses bras.

    — J’ai trouvé ça sur la porte d’entrée.

    Il était neuf heures moins le quart.

    — J’ai le droit de dormir un peu plus longtemps un dimanche non ?

    J’étais nu sous la couette et je ne bougeais pas. L’enfant avait gardé son blouson. Il se balançait d’un pied sur l’autre comme un petit garçon qui se retient et il me fixait ; je me suis baissé péniblement vers le parquet, plus péniblement j’ai ramassé mon caleçon, sans ménager mes soupirs, décidé à ne rien prendre au sérieux de si bonne heure, et lui s’inquiétait.

    — Alors ?

    — C’est moi qui suis inquiet. Tu devrais faire attention avec cette punaise parce que tu vas te blesser.

    — Tu ne veux pas lire ?

    — Non et je ne veux pas que tu te crèves un œil.

    — Pourquoi ?

    — Je n’aime pas qu’on abîme mes affaires, vois-tu !"

    Ce que j'en pense :

    Roman (autobiographique?) d'une grande sincérité. L'auteur se pose beaucoup de question autour de la paternité et de l'homosexualité. Il affirme ses choix  et nous montre sa fragilité. C'est à la fois une enquête et un témoignage,  et c'est très bien écrit.

    Ton père

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  • Derniers sacrements

    "Derniers sacrements" de John Harvey - Rivages/Noir

    Présentation de l'éditeur :

    Douze ans ont passé, pourtant Lorraine Preston s'en souvient comme si c'était hier : son frère dans le box des accusés, la condamnation à perpétuité et la honte. Aujourd'hui Michael Preston va sortir de prison, mais seulement pour quelques heures. il bénéficie d'une permission exceptionnelle afin d'assister aux obsèques de sa mère. son père est déjà mort depuis longtemps, c'est lui qui l'a tué. un acte aussi violent qu'inexplicable. Pour l'inspecteur Resnick, cette libération n'est pas une bonne nouvelle. La présence d'un meurtrier en ville est la dernière chose qu'il souhaite alors qu'il doit faire face à des bandes armées et à une explosion du trafic de drogue. et, comme un signe du chaos ambiant, sa relation avec Hannah Campbell se détériore... Derniers sacrements clôt en beauté le cycle de Resnick qui s'interroge sur les motivations humaines et la nature des sentiments.

    Première page :

    "Cela faisait douze ans qu'elle ne l'avait pas vu. Elle aurait bien voulu, pourtant ; mais elle ne lui avait pas écrit assez souvent, au début, pour lui demander de changer d'avis. Des lettres à destination de Feather-stone, Haverigg, Wandsworth, des Scrubbs. Le suppliant, ou presque. Avec le temps, pensait-elle, il va bien finir par passer l'éponge, par se rendre à de meilleurs sentiments.

    Au début, elle y était allée quand même, s'infligeant les trajets interminables, parfois en voiture, le plus souvent par le train. Non pas pour braver son interdiction, simplement pour être sur place, près de lui, pour partager un peu de la même atmosphère, du même air. De loin, elle observait les visiteuses massées devant les grilles : les épouses, les amantes, portant leurs plus beaux vêtements, coiffées pour l'occasion, maquillage retouché au dernier moment ; d'autres, accablées, entravées, tirant par la main des mômes avachis qui boudent et traînent les pieds. Au moment de la sortie, elle essayait si possible de se mêler à la fournée, d'attraper au vol des bribes de conversation pour son usage personnel. Et puis, tout à coup, elle cessa de faire le déplacement. Au lieu de cela, elle lui écrivit, régulièrement, le premier de chaque mois. Son rituel à elle. Les potins familiaux, des anecdotes concernant les enfants."

    Ce que j'en pense :

    C'est un bon Resnick, on y retrouve son humanisme, son attention à défendre les "laissés pour compte" de la société. On sent également une lassitude chez l'inspecteur et sans doute aussi chez l'auteur, comme s'il était temps de clôturer la série.

    Derniers sacrements

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