• Ils s'en allaient faire des enfants ailleurs

    "Ils s'en allaient faire des enfants ailleurs" de Marie-Ange Guillaume - Points

    Présentation de l'éditeur :

    Elle les a tous aimés - et n'a pas su les garder. La liste est longue: amants d'une nuit ou d'un été, beaux, moches, bisexuels, mariés, cavaleurs... Ils sont tous là, décrits avec tendresse, affection, cruauté parfois. A travers eux, Marie-Ange Guillaume effleure l'homme sous toutes ses facettes, dans toutes ses faiblesses. Et au fil des pages se dessine la femme qui se souvient : légère, volage, forcenée de l'amour. Un vivifiant hommage à la liberté.

    Première page :

    "Il y a de la neige partout et, cette année-là, la chute des températures bat les records saisonniers. Il est brun, avec dans les yeux le reflet de toute cette blancheur. Il croque des carottes crues en écoutant Salut les copains. «C'est qui, cette fille ?» s'informe-t-il d'une voix flemmarde. C'est moi. Il m'apprend à tenir debout sur mes skis. Quand il n'y a plus de neige, on s'aime par lettres. Les siennes viennent de Nantes, et je guette les mots d'amour dans sa petite écriture serrée. Le reste ne m'intéresse guère. On se voit en cachette et, dans l'hiver, on passe la journée entière à s'embrasser au bord de la Loire, qui coule chez moi et chez lui. L'eau est grise et l'herbe gelée. Sa bouche est le seul point chaud du paysage. On parle à peine. Quand on se quitte, c'est au bout du pont métallique qui traverse la Loire, et je reviens plusieurs fois sur mes pas. Il me regarde partir et revenir, on pleure et il rate son train - je l'apprends dans la lettre suivante. Un jour, il m'écrit qu'il bricole un avion miniature dans son salon. Je pâlis, je n'ai pas de salon. Quand on ne se verra plus en cachette, quand il viendra chez moi, il s'en apercevra forcément. Pour parer à cette humiliation, je romps brutalement, sans explications, très malheureuse et inflexible. C'était le premier."

    Ce que j'en pense :

    De la franchise, de la pudeur mais surtout beaucoup d'humour. On pense bien sûr à Desproges pour la tendresse qui pointe sous l'amertume. Un livre pour découvrir l'écriture de Marie-Ange Guillaume.

    Ils s'en allaient faire des enfants ailleurs

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  • fantôme

    "Fantôme" de Jo Nesbo - folio policier

    Présentation de l'éditeur :

    Harry Hole avait choisi de fuir la Norvège et ses échecs. Aujourd’hui il doit revenir à Oslo pour enquêter sur le meurtre d’un dealer dont l'assassin ne serait autre qu’Oleg, son fils adoptif. Ses investigations le conduisent dans les bas-fonds d’une ville ravagée par la fioline, une nouvelle drogue terriblement addictive. La police et le pouvoir politique semblent indifférents au problème. Ne pouvant compter que sur lui-même pour se battre contre un système corrompu, Harry doit également affronter ses ennemis intimes : ses propres fantômes…

    Première page :

    "Les cris l'appelaient. Telles des lances sonores, ils transperçaient tous les autres bruits du soir dans le centre d'Oslo, le ronronnement régulier de la circulation sous les fenêtres, la sirène lointaine qui montait et descendait, les cloches de l'église qui venaient de se mettre à sonner. C'était maintenant, à la tombée de la nuit, et éventuellement juste avant le lever du soleil, qu'elle partait en quête de nourriture. Elle promena son nez sur le linoléum crasseux de la cuisine. Enregistra et classa à toute vitesse les odeurs en trois catégories : comestibles, menaçantes ou sans intérêt pour la survie. Le parfum acre de la cendre de tabac. Le goût doucereux et sucré du sang sur un coton. L'exhalaison amère de la bière dans une capsule de Ringnes. Des molécules de soufre, de salpêtre et de dioxyde de carbone s'élevaient d'une douille métallique vide adaptée à une balle de 9 x 18 mm, appelée aussi Makarov, d'après le pistolet pour lequel le calibre avait été conçu. La fumée d'un mégot encore chaud à filtre jaune et papier noir frappé de l'aigle impérial russe. Le tabac était comestible. Et là : des effluves d'alcool, de cuir, de graisse et d'asphalte. Une chaussure."

    Ce que j'en pense :

    L'intrigue est bien conduite (bien qu'un peu longue), la description sans complaisance de la société scandinave est toujours sans complaisance… mais tout cela parait un peu poussif, les rebondissements qui permettent à l'inspecteur de s'en sortir sont de plus en plus invraisemblables… Bref, ce n'est pas le meilleur des Nesbo.

    fantôme

     

     

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  • Monsieur est mort

    "Monsieur est mort" de Karine Silla - Plon

    Présentation de l'éditeur :

    A la mort de son père, Vincent quitte l'Inde où il vit depuis quinze ans pour revenir à Paris. Telle une bombe à retardement, cette disparition fait resurgir du passé des traumatismes enfouis. Ce retour sera-t-il le déclencheur pour que se brisent enfin les tabous, que soient dévoilés les secrets et les non-dits familiaux ? Un roman sur la culpabilité, le pardon et le pouvoir de destruction du silence.

    Première page :

    "Mon père est mort il y a deux jours. C'était un mardi, le 9 avril, une journée comme les autres. J'étais loin depuis plusieurs années et je n'imaginais pas à quoi il pouvait ressembler, en ce mardi, quelques minutes avant de rendre son ultime souffle. Dans le dernier souvenir que j'ai de lui, il n'avait pas encore de cheveux gris, ce qui était très étonnant pour un homme de son âge. Je le croyais immortel. Avec ses yeux perçants de chat siamois, je pensais qu'il aurait sept vies qu'il vivrait d'une traite.

    Ce jeudi matin, à Calcutta, il faisait une chaleur épouvantable. L'air était irrespirable. Dehors, le paysage était flou, avec ses couleurs un peu passées, comme enveloppé dans une brume de feu. Il me faisait penser à une toile de Monet et à la subtilité presque divine que le peintre avait pour réinventer la lumière, mais peut-être ma vue était-elle seulement brouillée par la chaleur accablante. J'étais assis par terre sur le carrelage où j'essayais de trouver un peu de fraîcheur, écrasé par cette température, si loin de ma terre natale …"

    Ce que j'en pense :

    Pas très original ni très passionnant. C'est narcissique, de l'introspection assez artificielle. L'auteure n'est pas parvenue à me toucher véritablement bien que l'écriture soit plutôt convenable.

    Monsieur est mort

     

     

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  • Les arpenteurs

    "Les arpenteurs" de Kim Zupan, traduction Laura Derajinski - Gallmeister

    Présentation de l'éditeur :

    Nuit après nuit, dans une prison du Montana, le jeune Val Millimaki s'assied face aux barreaux qui le séparent de John Gload, 77 ans, en attente de son procès. Astreint aux pires heures de garde, l'adjoint du shérif se retrouve à écouter le criminel qui, d'instinct, est prêt à lui révéler en partie son passé. Petit à petit, Millimaki se surprend à parler, lui aussi, et à chercher conseil auprès de l'assassin. En dépit des codes du devoir et de la morale, une troublante amitié commence à se tisser entre les deux hommes. Dans un subtil jeu d'échos, entre non-dits, manipulations et sombres confessions, le jeune shérif cherche des réponses à ses propres tourments et, chaque matin, il tente vainement de reprendre pied dans la réalité. Mais sa vie, comme son mariage, lui échappe chaque jour un peu plus.
    Premier roman hypnotique et crépusculaire, Les Arpenteurs met en scène deux personnages poursuivis par leur conscience et hantés par la mélancolie d'un paysage qui les a faits tous deux à son image.

    Première page :

    "À l'automne de cette année-là, le garçon descendit du bus au bout de la route sèche, la haie de buissons vrombissant du crissement des sauterelles affolées qui bondissaient à son passage depuis les hautes herbes et le feuillage pâle et poussiéreux des oliviers de Bohême, se heurtaient à son pantalon et se précipitaient contre les pans de sa chemise. Une fois par mois, on leur permettait de quitter l'école plus tôt et on les encourageait à mettre ce temps libre au profit des œuvres de charité. Val était un garçon sérieux. Tandis qu'il faisait passer ses livres d'une main à l'autre en avançant vers la maison au loin, il entreprit d'établir une liste : rendre visite aux malades, vêtir ceux qui sont nus, ensevelir les morts. Quoi d'autre ? Les vaches noires du voisin baissaient les yeux vers lui depuis le promontoire, leurs silhouettes ondulant et flottant étrangement dans la brume de chaleur. Visiter les prisonniers, voilà encore autre chose. Donner à boire aux assoiffés. A l'ouest, au pied du promontoire, il apercevait son père sur le Minneapolis-Moline qui décrivait des cercles au milieu du champ des Schmidt dans un nuage de poussière.

    L'écriture de sa mère était faite de boucles splendides, perfectionnées sous la menace et les cannes agitées de ces mêmes sœurs de la Providence intimidantes qui enseignaient aujourd'hui à Val, cette écriture dessinée sur les petits mots qu'elle lui laissait avec son déjeuner de l'école, sur les marges d'une carte d'anniversaire ou, plus rarement, lorsqu'elle et son père sortaient…"

    Ce que j'en pense :

    Encore une belle découverte des éditions Gallmeister. C'est un livre qui chemine lentement dans cette nature du Montana, comme la relation qui s'installe entre le jeune shérif et le vieil assassin. C'est un roman noir, sur l'insomnie, le crépuscule, l'ombre et la lumière ; un roman qui se lit à petits pas dans ces paysages magnifiquement décrits.

    Les arpenteurs

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  • Comment tu vas le monde ?

    "Comment tu vas  le monde ?" de Claude Burneau, illustration de Lisa Launay - Gros Textes

    Présentation de l'éditeur :

    Le poème ne parle pas forcément, ni toujours, du joli arc-en-ciel qui court d’une rose à une autre, non. Le poème parle aussi et surtout du reste. De ce qui interpelle. De ce qui fâche. De ce qui révolte. Des poèmes qui disent le réel et qui en dénoncent les inhumanités. Des poèmes qui battent avec le cœur des hommes. Des poèmes dont un jeune lecteur pourra s’emparer aussi facilement qu’un adulte. Un livre noir et pessimiste, alors, qu’on lirait avec un mouchoir ? Non. L’humour, même noir, est plus corrosif que tous les apitoiements, plus positif puisqu’il ouvre un espoir. L’espoir de cerveaux qui pétillent et qui inventent des jours plus humains, plus tendres. Avec des touches de couleurs dans la grisaille. Touches joyeuses que l’on suit dans les illustrations et qui résonnent avec l’éclat d’un sourire d’enfant. Demeurons du côté des couleurs et mettons-en à nos sourires malicieux. Patrick Joquel

    Extrait :

    Mon père disait souvent

    Les flics sont toujours

    du côté des patrons

    Y’a pas de justice

     

    Mon père disait souvent

    Celui qui gagne

    En un jour

    Ce que je gagne

    En un an

    Est-il 365 fois

    moins bête que moi ?

    (mon père utilisait un autre mot que bête)

    Y’a pas de justice

     

    Mon père disait souvent

    Si l’usine ferme un jour

    J’en connais un

    Qui pointera pas à Pôle Emploi

    Y’a pas de justice

     

    Mon père disait aussi

    La seule justice qui soit

    C’est qu’on crèvera tous les deux

     

    Quand mon père a appris

    Que ses poumons étaient

    Étouffés par l’amiante

    Il n’a rien dit

    Mais moi j’ai crié

    Y’a pas de justice

    Ce que j'en pense :

    De la poésie à la portée de tous, de la poésie qui "s'insurge" contre l'injustice, de la  poésie qui dénonce ce qui est presque devenu "normal" dans notre monde actuel, de la poésie sourire malicieux "à la Claude Burneau". De plus,  Lisa Launay accompagne magnifiquement les textes. Une réserve cependant : la couleur et la mise en page de la couverture.

    Comment tu vas le monde ?

    Comment tu vas le monde ?Comment tu vas le monde ?

     

     

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