• Ici et là, ou bien ailleurs

    "Ici et là, ou bien ailleurs" - 12 écrivains (de Foenkinos à Kaddour)- Gallimard

    Présentation de l'éditeur :

    Il était une fois douze écrivains donnant de leurs nouvelles, d'ici, de là-bas ou bien d'ailleurs. Les douze destinations furent multiples et surprenantes, proches ou lointaines, émouvantes, dépaysantes assurément.

    Extrait (nouvelle de Marie Nimier)

    "Dans quelques instants, la lumière de la cabine se rallumera. Elle se rallume. Ton voisin s'étire, son masque occultant remonté sur le front. Tu enlèves tes bouchons d'oreilles. Le steward a le teint frais, les cheveux coupés court dégageant un cou très fin et très long, comme s'il avait plus de vertèbres que le commun des mortels. De là-haut, sa tête s'incline vers toi, personnellement. Thé ? Café ? Il répétera l'opération, avec la même patience, la même gentillesse obstinée, autant de fois qu'il y aura de passagers en état de boire quelque chose. Non sans appréhension, tu tires sur l'opercule qui obstrue ton verre de jus d'orange. Résistance, insistance, levier... soulagement. Opération réussie sans éclaboussure. Tu finis le croissant, la confiture, le petit pain, tu laisses l'omelette même si tu n'aimes pas laisser. Tu n'as jamais aimé laisser. Ni partir. Ni arriver."

    Ce que j'en pense :

    C'est plutôt un livre de "mauvaises nouvelles" et parfois de "fausses nouvelles". Deux textes sont nettement au dessus du lot : "L'éveil" de Carole Martinez et "Quelqu'un t'attend" de Marie Nimier. Ces deux auteures nous font pénétrer dans un univers original et magnifiquement écrit. Mais deux sur douze c'est loin de la moyenne  -;)

    Ici et là, ou bien ailleurs

     

     

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  • L'homme dans la vitrine

    "L'homme dans la vitrine" de Kjelle Ola Dahl - Gallimard série noire

    Présentation de l'éditeur :

    Un matin d'hiver, Reidar Folke Jespersen, antiquaire à Oslo, va se poster dans un café non loin de chez lui.
    Après quelques heures d'attente, il aperçoit son épouse qui va retrouver son amant. Ensuite, Jespersen quitte son poste d'observation pour se rendre chez ses frères pour un important rendez-vous d'affaires. La réunion se passe mal et les frères se séparent fâchés. Le lendemain matin, on retrouve le corps sans vie de Jespersen, placé nu dans un fauteuil de la vitrine de son magasin. Le commissaire Gunnarstranda arrive sur les lieux du crime avec l'inspecteur Frank Frolich.
    Les indices dont ils disposent ne sont pas nombreux : une série de chiffres tracés au feutre sur le cadavre et des objets volés. L'enquête s'annonce d'autant plus difficile que de nombreuses personnes semblent très contentes de la disparition du vieil homme. Avec L'homme dans la vitrine, Kjell Ola Dahl signe un roman dense et complexe, une histoire d'amour et de vengeance sur laquelle plane l'ombre du passé et des heures les plus sombres de l'histoire norvégienne.

    Première page :

    "Reidar Folke Jespersen entama ce vendredi 13 de la même manière qu'il avait commencé tous les matins des cinquante dernières années de sa vie qui en comptait déjà soixante-dix-neuf, avec une bouillie d'avoine, dans la cuisine, seul dans la pénombre hivernale du matin, les bretelles pendantes dans son dos, avec les petits tintements rythmés de sa cuillère contre le fond de l'assiette creuse pour tout accompagnement musical de sa solitude. Reidar Folke Jespersen avait des cernes marqués sous ses yeux bleu vif, le menton couvert d'une barbe blanche taillée court et avec soin. Les mains qui tenaient la cuillère étaient épaisses et ridées, avec des veines saillantes qui disparaissaient sous les plis de ses manches de chemise. Ses avant-bras n'auraient pas paru déplacés chez un bûcheron ou un forgeron.

    Il n'avait pas faim. Il n'avait jamais eu faim le matin, mais, en homme raisonnable et bien informé, il comprenait la nécessité pour l'estomac de travailler avec quelque chose de solide. Ainsi, il commençait chaque journée par une assiette de bouillie qu'il préparait lui-même. Si on lui avait demandé à quoi il pensait pendant ces minutes-là, il n'aurait su répondre. En mangeant, il se concentrait toujours pour compter le nombre de cuillerées …"

    Ce que j'en pense :

    L'intrigue est lente, et même un peu poussive. Le rythme s'accélère dans les dernières pages. L'auteur a voulu faire des efforts pour donner un peu d'épaisseur psychologique à ses deux enquêteurs mais c'est quand même un peu faible.

    L'homme dans la vitrine

     

     

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  • L'accident

     "L'accident" de Agnès Aziza - Gründ

    Présentation de l'éditeur :

    Un court roman qui traite le thème de la mort et de la disparition d'un être cher avec une grande économie de moyens et beaucoup d'efficacité. Une morale qui peut se résumer ainsi : C'est ça aussi la vie.

    Première page :

    "Ce matin-là, j'avais interro d'anglais. Je m'étais réveillée plus tôt que d'habitude pour travailler encore. À 7 h 30, maman est venue vérifier que j'étais bien levée. Elle me trouva à mon bureau en train de réciter mes verbes irréguliers.

    - Vanessa, m'a-t-elle dit en soupirant, combien de fois faudra-t-il que je te répète qu'il ne faut jamais réviser à la dernière minute !

    - C'est  juste   pour  être  sûre,  je  lui   ai répondu.

    - Allez, lâche ton livre et viens prendre un bon petit déjeuner. Tu vas t'embrouiller l'esprit à force de relire les mêmes choses.

    Je l'ai suivie jusqu'à la cuisine sans pour autant lâcher ma liste de verbes. Henri était déjà debout et avalait goulûment son bol de céréales en discutant avec papa du match de foot qu'il allait disputer le lendemain."

    Ce que j'en pense :

    Très court roman pour ados (et plus !) dans un style simple et direct. Pas de pathos mais beaucoup d'émotion. À conseiller aux ados et pré ados qui ont "peur" des gros livres. Ça peut se lire en une demi-heure.

    L'accident

    L'accident

     

     

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  • Les tribulations d'un lapin en Laponie

    "Les tribulations d'un lapin en Laponie" de Tuomas Kyro - Denoël

    Présentation de l'éditeur :

    Des chaussures de foot à crampons. C'est afin de pouvoir en offrir à son fils Miklos que Vatanescu quitte sa Roumanie natale pour mendier sur les trottoirs de Helsinki, sous l'impitoyable férule d'un trafiquant russe, Iegor Kugar. Mais les affaires tournent vite au vinaigre et Vatanescu est contraint de fuir. Sans papiers, pourchassé par la mafia et par la police, notre Candide contemporain entame un long périple qui va le mener jusqu'en Laponie, en compagnie d'un lapin dont il a sauvé la vie dans un jardin public. 
    Leur épopée sera jalonnée de rencontres et de personnages hauts en couleur. Les péripéties du héros et de son lapin, plus burlesques les unes que les autres, laisseront à Vatanescu le loisir d'étudier les us, coutumes et travers des Finlandais en particulier et des pays développés en général. 

    Les tribulations d'un lapin en Laponie, roman en forme d'hommage au cultissime Lièvre de Vatanen, impose Tuomas Kyro comme le fils spirituel du grand Arto Paasilinna, dont il partage l'humour, le sens de l'épopée bucolique et l'art de croquer avec tendresse les loufoqueries de ses contemporains.

    Première page :

    "Il y aurait bien sûr eu d'autres possibilités, notre héros aurait pu voler des voitures, récupérer le cuivre des câbles téléphoniques ou vendre un de ses reins. Mais de toutes les mauvaises solutions, celle que lui offrait Iegor Kugar était la meilleure. Elle lui assurait un contrat de travail d'un an, le transport jusqu'au théâtre des opérations et un emploi pour sa soeur, avec en prime de nouvelles dents et des implants mammaires.
    Vatanescu laissa un mot à son ex-femme, promettant de lui envoyer l'argent de sa pension alimentaire dès qu'il aurait constitué un petit pécule. Après leur divorce, ses relations avec la mère de son fils Miklos s'étaient quelque peu envenimées. Au point que le pus giclait, malgré leur bonne volonté réciproque. Mais quand l'amour s'éclipse, le vide est vite comblé par la jalousie, la rancoeur, la vengeance, les jérémiades et l'entêtement.
    Vatanescu s'assit sur le bord du lit où dormait sa mère, avec Miklos au creux de son bras. Sans le réveiller, il lui ôta sa chaussette droite et, à l'aide d'une craie de couleur, traça soigneusement sur une feuille de papier le contour de sa plante de pied.
    Tu auras tes chaussures de football. 
    Papa va t'en acheter."

    Ce que j'en pense :

    C'est plein d'humour, souvent burlesque. L'auteur se situe évidemment dans la lignée de Paasilinna mais c'est loin d'en avoir la force tout au long du récit. Les personnages paraissent un peu fades, sauf le lapin.

    Les tribulations d'un lapin en Laponie

    Les tribulations d'un lapin en Laponie

     

     

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  • Le dernier gardien d'Ellis Island

    "Le dernier gardien d'Ellis Island" de Gaëlle Josse - éditions Noir sur Blanc - collection Notabilia

    Présentation de l'éditeur :

    New York, 3 novembre 1954. Dans quelques jours, le centre d’immigration d’Ellis Island va fermer. John Mitchell, son directeur, reste seul dans ce lieu déserté, remonte le cours de sa vie en écrivant dans un journal les souvenirs qui le hantent : Liz, l’épouse aimée, et Nella, l’immigrante sarde porteuse d’un très étrange passé. Un moment de vérité où il fait l’expérience de ses défaillances et se sent coupable à la suite d’évènements tragiques. Même s’il sait que l’homme n’est pas maître de son destin, il tente d’en saisir le sens jusqu’au vertige.

    À travers ce récit résonne une histoire d’exil, de transgression, de passion amoureuse, et de complexité d’un homme face à ses choix les plus terribles.

     

    Première page :

    "Ellis Island, le 3 novembre 1954. 10 heures, ce matin.

    C'est par la mer que tout est arrivé. Par la mer, avec ces deux bateaux qui ont un jour accosté ici. Pour moi ils ne sont jamais repartis, c'est le vif de ma chair et de mon âme qu'ils ont éperonné avec leurs ancres et leurs grappins. Tout ce que je croyais acquis a été réduit en cendres. Dans quelques jours, j'en aurai fini avec cette île qui a dévoré ma vie. Fini avec cette île dont je suis le dernier gardien et le dernier prisonnier. Fini avec cette île, alors que je ne sais presque rien du reste du monde. Je n'emporte que deux valises et quelques pauvres meubles. Des malles de souvenirs. Ma vie.

    Il me reste neuf jours, pas un de plus, avant que les hommes du Bureau fédéral de l'immigration ne viennent officiellement fermer le centre d'Ellis Island. Ils m'ont prévenu qu'ils arriveraient tôt, très tôt, vendredi prochain, 12 novembre."

    Ce que j'en pense :

    C'est un livre à l'écriture simple, classique, on retrouve, mais pas complètement, le style de Gaëlle Josse. L'auteure cherche, comme dans chacun de ses livres, à nous faire entrer dans un univers, entre histoire et fiction, entre présent et passé. Je trouve qu'elle y parvient moins bien que dans ses précédents romans. Pour moi c'est surtout le thème du livre qui le rend intéressant.

    Le dernier gardien d'Ellis Island

    Le dernier gardien d'Ellis Island

     

     

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  • Le homard

    "Le homard" de Pascale Diétrich - Les éditions in8

    Présentation de l'éditeur :

    Quand Camille gagne un homard vivant à la tombola, elle ignore encore qu’elle ne pourra l'ébouillanter. Mais entre-temps, elle s'est débarrassée d’un pic à glace, car c’est l’utilité des tombolas : on fait le ménage dans les placards. Près des plages, un premier touriste anglais est retrouvé mort. Puis un second. Est-ce trop pour une petite ville bretonne de 3000 âmes ? Doit-on parler de serial killer ?

    Première page :

    "Le capitaine des pompiers se tenait tout droit sur l'estrade comme une bougie d'anniversaire sur un gâteau. Il était bedonnant et avait le visage marqué par la bière brune. Cette bière-là donne un teint et un air bouffi tout à fait particuliers, il n'y a pas à s'y tromper. Des auréoles de sueur s'étaient formées sur son uniforme au niveau des aisselles. Il chassa encore un chat dans sa gorge puis regarda avec circonspection le public, essentiellement composé de familles de pompiers.

    — Mesdames et messieurs, je vous souhaite un bon 14 Juillet, articula-t-il enfin. Vive la révolution ! Nous allons procéder au tirage des lots. Ma main est innocente, je le jure.

    Des ricanements parcoururent l'assemblée. Il avait visiblement sa réputation. Je me tournai vers Lucette qui lorgnait vers les jeunes soldats du feu aux cheveux ras, aux oreilles bien dégagées et aux képis, visière tombante sur les yeux. Tous se tenaient parfaitement droits, le torse bombé, prêts à sauver une vie."

    Ce que j'en pense :

    C'est un court roman à l'écriture précise qui vaut surtout pour l'atmosphère dans laquelle nous plonge l'auteure. Nous sommes entraînés dans une Bretagne étrange : manoirs aux pièces pleines de recoins, tombolas où l'on peut gagner homard, marteau, pic à glace, hache… Il y a de l'humour, de l'amour, de l'étrange.

    Le homard

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  • La source

    "La source" de Hubert Mingarelli - éditions Cadex

    Présentation de l'éditeur :

    Orfèvre en histoires courtes, Hubert Mingarelli condense dans La Source ce qui a fait son succès : une émotion tenue au plus près du silence par des mots simples, des phrases impeccables dans leur pouvoir d'évocation, une délicatesse vis-à-vis de ses personnages et cette façon incroyable qu'il a de faire d'eux nos propres frères. Une nuit qui en aurait contenu mille, presque belle. Et tandis qu'elle avançait et qu'ils se parlaient, George savait que des nuits comme ça, ils n'en auraient plus. Ils avaient l'air de prendre une dernière inspiration, de se remplir d'air une dernière fois avant de s'enfoncer dans l'eau profonde que serait leur monde au réveil.

    Première page :

    "Pendant un  moment George regarda Renzo dormir. Puis il lui parla, mais si bas que ça ne servit à rien. Il s'accroupir devant le lit, posa une main sur son épaule et lui dit, plus fort cette fois :

    - Réveille-toi.

    - Il fait encore nuit ? lui demanda son frère.

    - Oui, lui répondit George.
    - Laisse-moi me réveiller.

    - Entendu, mais pas longtemps.

    George se redressa et s'en alla. II attendit dans la cuisine, devant la fenêtre, et chercha à voir dans le ciel quelle journée ils auraient dans les gorges de Neviglie. Ce n'était jamais bon lorsqu'il pleuvait là-bas. L'eau grossissait et emportait la terre, les feuilles les branches, et il y faisait

    plus froid qu'ailleurs, et bien après qu'il eut cessé de pleuvoir. Il se pencha et aperçut une étoile. Ensuite il attendit, chassa l'idée de la pluie, puis ralluma le feu sous la cafetière."

    Ce que j'en pense :

    Retourner aux origines, surmonter le bruit et la colère, affronter la faille, découvrir la lumière et le bruit de la source… autant de symboles évoqués dans cette nouvelle parfaitement réussie où l'on retrouve l'art de Mingarelli de dire beaucoup avec presque rien.

    La source

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  •  L'espérance

     

    J’ai ancré l’espérance
    Aux racines de la vie

    *

    Face aux ténèbres
    J’ai dressé des clartés
    Planté des flambeaux
    A la lisière des nuits

    *

    Des clartés qui persistent
    Des flambeaux qui se glissent
    Entre ombres et barbaries

    *

    Des clartés qui renaissent
    Des flambeaux qui se dressent
    Sans jamais dépérir

    *

    J’enracine l’espérance
    Dans le terreau du cœur
    J’adopte toute l’espérance
    En son esprit frondeur.

    Andrée Chedid

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  • Boulevard de l'océan

    "Boulevard de l'océan" de François de Cornière - Le Castor Astral

    Présentation de l'éditeur :

    Ces chroniques se lisent comme un album de photos. Derrière l'apparente banalité des événements, quelque chose d'essentiel se joue: il y a tout simplement le temps qui passe, et ce à quoi on pense dans ces moments-là. François de Cornière, promeneur invétéré, révèle alors des grâces d'enlumineur, un humour tendre infiltré de mélancolie.

    Extrait :

    "Il en faut bien, des bruits, pour entendre le silence. Je note par exemple, dans le port, celui que font les mâts le soir; celui d'une tourterelle sur un arbre voisin ; une guêpe dans un rideau ; ou encore un craquement clé la tuyauterie, quj empêche de fermer l'œil et fait penser la nuit.

    Mais, au lieu de tous ces bruits, je voudrais m'arrêter sur celui du vélo que je prends tous les jours, tous les soirs, et particulièrement sur sa dynamo, que j'aimerais chanter.

    Le vélo, en effet, est loin d'être silencieux, et s'il y a les pédales, s'il y a les roues qui crissent sur les graviers, le frottement du garde-boue arrière sur le pneu à chaque tour, et puis le dérailleur ou la sonnette, il y a surtout la dynamo, qui fait comme un moteur et me donne des ailes en direction de la mer. J'appuie sur les pédales, mes cuissardes bâillent un peu et, avec la lumière de mon phare à l'avant, c'est bien le bruit qui me permet d'y voir clair dans tant d'ombres et de formes que j'emporte avec moi."

    Ce que j'en pense :

    C'est un livre qui se déguste ; un livre rempli d'images simples de vacances avec de la pluie, du soleil, du vent ; un livre d'odeurs d'algues et de marées ; un livre de souvenirs, débordant d'amour pour l'océan ; un livre de douceurs avec un soupçon de mélancolie. C'est le livre d'un vrai poète du quotidien. Encore un livre qu'on peut trouver à La Gède aux livres de Batz sur mer.

    Boulevard de l'océan

    Boulevard de l'océan

    Boulevard de l'océan

     

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  • Les petites filles respirent le même air que nous

    "Les petites filles respirent le même air que nous" de Paul Fournel - folio

    Présentation de l'éditeur :

    «On a joué à bleu-blanc-rouge. Quand la grosse Josiane s'est retournée pour nous surprendre, Maline s'est statufiée. Elle reste, bras écartés, bouche ouverte et jambe en l'air, comme une danseuse pataude. Les autres sont immobiles, au garde-à-vous. On jurerait qu'elles n'ont pas bougé. Madeleine quitte brusquement le jeu, sans raison ; elle s'ébroue, esquisse un ou deux mouvements de gymnastique et va pour rentrer en classe. En frôlant Maline, elle murmure : - Si la mort passe, tu resteras comme ça et on ne pourra même pas t'enterrer.» Dix petites filles inquiètes, dans dix-neuf nouvelles, qui jouent à cache-cache avec l'envie de grandir et la peur d'être grandes. Dix petites filles tendres dans les moments douloureux, ravissants ou magiques de leurs existences.

    Première page :

    "Elle avait essayé le côté gauche, le côté droit (celui de son cœur), elle s'était mise à plat ventre, elle avait embrassé son oreiller, elle était sur le dos les deux yeux grands ouverts ; plus ouverts encore qu'en plein jour, lui semblait-il. Elle tenait les mains croisées sur la poitrine. Entre les rideaux, passait une barre de lune qui coupait son lit en deux et touchait à peine celui de Thérèse, sa sœur. Elle dormait, elle. Chaque fois qu'elle inspi­rait, le coin du mouchoir à carreaux qui lui servait à dormir et à pleurer venait se coller un instant sur ses lèvres. Lorsqu'elle expirait, il flottait comme une algue.

    Au plafond, il y avait douze rosés par rangée, sauf vers la cheminée où il n'y en avait que dix ; au-dessus de la porte il n'en rentrait que deux."

    Ce que j'en pense :

    Livre paru en 1978 (trouvé dans une petite librairie indépendante : "La Gède aux livres" à Batz sur mer), donc très éloigné du "m'as-tu vu" des dernières rentrées littéraires. Il y a un côté à la fois poétique et cruel dans ces nouvelles mais elles vieillissent plutôt bien…

    Les petites filles respirent le même air que nous

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