• Moi, Anthony, ouvrier d'aujourd'hui

    "Moi, Anthony, ouvrier d'aujourd'hui"
    Raconter la vie - Seuil

    Présentation de l'éditeur :

    Anthony a 27 ans et habite la banlieue lyonnaise. Il raconte dans ce livre le choc qu’a été pour lui la découverte du monde du travail après avoir décroché du lycée à 16 ans. Son itinéraire est révélateur de l’actuel mouvement de reprolétarisation qui touche de nombreux jeunes qui lui ressemblent. Anthony est emblématique de ces ouvriers d’aujourd’hui dont la vie professionnelle est marquée par le triple sceau de l’incertitude, de la précarité des statuts et de l’absence de recours à l’action collective. À travers lui, c’est donc une nouvelle classe ouvrière, travaillant ici dans le monde des entrepôts et de la logistique, que l’on découvre. L’histoire d’Anthony n’est pas uniquement celle d’illusions perdues. Bien que résolument pudique sur sa vie personnelle, elle révèle aussi une personne déterminée et mûrie par ses expériences, un jeune qui, à sa manière, refuse de plier.

    Première page :

    "Je m’appelle Anthony. J’ai 27 ans. J’ai quitté l’école en 2nde, en 2003. Il paraît que je suis dans les 10% de jeunes qui ont tout lâché. Évidemment, je regrette maintenant, car je le paie cher. Mais quand je regarde en arrière, je vois mal comment les choses auraient pu se passer autrement. Au collège, dès la 4e, on nous mettait la pression pour qu’on dise ce qu’on voulait faire. Il fallait qu’on soit orienté, c’était obligatoire. Moi, je n’avais aucune idée. La seule chose qui était claire, c’est que j’avais la tête à autre chose, que j’en avais marre de l’école. Ça a commencé très tôt. Je ne supportais pas la façon de faire des profs, ce qu’il fallait apprendre, toutes les obligations. J’étouffais, ça me rendait agressif. J’étais en pleine crise d’ado. Ça a même été franchement violent pour moi. J’étais vraiment mal et je commençais à déraper.

    Mais soyons clairs, je n’étais pas comme les gars des cités, avec toutes les galères qu’il peut y avoir là-bas. Je n’étais pas un «kassos». Mes parents avaient de bons emplois, ma mère était comptable, mon père éducateur spécialisé. Ils avaient fait des études. Et je n’avais pas trop de problèmes avec eux.

    Moi, c’est vraiment l’école qui m’a cassé. J’ai été viré du collège et je suis même passé un an par le privé, où ça a été pire encore. Ils se sont acharnés sur moi, ils voulaient me «faire rentrer dans le rang» comme ils disaient."

    Ce que j'en pense :

    Un livre à lire par tous ceux qui pensent que les jeunes ne veulent pas travailler et que les chômeurs sont des fainéants !

    Il y a de l'amertume, de la colère (et il y a de quoi!) mais aussi une envie d'être respecté, d'être traité comme un être humain.

    Moi, Anthony, ouvrier d'aujourd'hui

    Moi, Anthony, ouvrier d'aujourd'hui

    Moi, Anthony, ouvrier d'aujourd'hui

    Moi, Anthony, ouvrier d'aujourd'hui

     

     

    __________


    votre commentaire
  • La terre ronde

    "La terre ronde" de François de Cornière
    Atelier du Gué

    Présentation de l'éditeur :

    La Terre ronde aurait pu être, seulement, l’histoire d’une vieille maison, à moitié écroulée, quelque part en Ardèche... Mais il y a ceux qui, l’été, pendant les vacances, reviennent dans la maison. Dès lors, La Terre ronde devient le récit de plusieurs vies, et surtout, celui d’un attachement, d’un acharnement, d’une fidélité. « Tout a poussé. Il faudra couper. Défricher. S’écorcher. Tout reprendre. Poursuivre un bout d’histoire qui s’accroche au rocher, au versant. »

    Première pages :

    "On ne peut pas dire où et quand, exactement. Mais c'est bien avant d'arriver dans le dernier virage. Il y a eu la fatigue, la longue route, les derniers kilomètres, et le jour s'est levé : on a roulé toute la nuit.

    Alors on change de temps. L'épicerie du village viendra tout juste d'ouvrir. On fera quelques courses, l'indispensable. On prendra un cageot. Sur la place, entre les platanes, on regardera le ciel, les martinets, très haut. On repartira.

    La route continue. De plus en plus étroite maintenant. Il n'y a qu'à la suivre. Monter. Tourner. Beaucoup tourner. Les mains sur le volant la connaissent par cœur. Avec des images, et des noms sur les pancartes des bas-côtés : les UBACS, les adrets. Comme dans un livre."

    Ce que j'en pense :

    L'auteur a l'art de mettre en mots des choses simples du quotidien, des instants fragiles, des silences, des respirations, de petits faits d'hiver et c'est un vrai bonheur de lecture. Comme dirait Thomas Vinau, on a vraiment l'impression que ce livre a été écrit pour nous.

    La terre ronde

    La terre ronde

    La terre ronde

    La terre ronde

     

     

    __________


    votre commentaire
  • La scierie

    "La scierie"  anonyme, préface de Pierre Gripari
    éditions Héros-Limite

    Présentation de l'éditeur :

    Le lendemain matin, je me lève à cinq heures trente, je pars à six heures quinze vers Huisseau. On est en septembre, le jour se lève à peine. Je vois des quantités de lapins dans le parc de Chambord. J'arrive à la scierie en avance. Tout est sombre sous le hangar. J'ai dans mes sacoches ma gamelle qui contient mon repas de midi. Le chauffeur bourre la chaudière et fait monter la pression. Je m'approche du four et je me chauffe. Il est sept heures moins dix. Tout le monde arrive tout à coup et se rassemble autour du four. Garnier arrive bouffi, il n'a pas fini de s'habiller, il sort du lit, il ne mange pas le matin. Après de brèves politesses, à sept heures moins cinq, il gueule : Allez, graissez !

    Première page :

    "J'écris parce que je crois que j'ai quelque chose à dire. C'est la vie que j'ai menée entre dix-huit et vingt ans, entre mon échec au bac et mon départ au régiment.

    Je regrette de ne pas avoir pris de notes au cours de cette période, mais en guise de consolation, je peux me dire que c'était impossible. Manque de temps et surtout la fatigue.

    Après avoir travaillé tout un été à la préparation de la session d'octobre tout en tenant la place de chasseur à l'Hôtel de France de Blois, je viens de me faire étendre. Ça ne m'étonne pas. La réussite ne me paraissait pas possible. J'ai fait ce que j'ai pu. Qui connaît la fatigue et la tension de la journée habituelle, ajoutés à l'effort nocturne qui brûle les yeux, me comprendra.

    Je n'ai pas de métier. Je n'ai de goût que pour la Marine. J'essaye de m'engager, mais mon frère, qui est mon tuteur, me refuse son consentement. L'hypothèse d'un emploi de bureau me dégoûte, j'en ai marre de cette plume qui m'a trahi, j'en ai marre de rester assis toute la journée sous les ordres de cornichons blafards. Je sais que je suis fort. Je vais essayer de travailler avec ma force, mais que faire? Dans le pays que j'habite sur les bords de la Loire, aucun débouché à n'importe quel échelon, sinon la culture. Les paysans me font chier avec leurs plaintes et leurs gros sous qu'ils cachent comme des salauds."

    Ce que j'en pense :

    C'est plutôt un témoignage qu'un roman. C'est à la fois un hommage au travail, aux travailleurs et une critique assez féroce de certaines pratiques de ces mêmes travailleurs. C'est un texte cru, sans fioritures, qui ne laisse aucun repos (comme le travail à la scierie). Un grand texte.

    La scierie

     La scierieLa scierieLa scierie

     

    __________ 


    votre commentaire
  • Mort sur la route

    "Mort sur la route" par David Le Breton
    éditions Métailié

    Présentation de l'éditeur :

    Il est difficile de se construire à seize ans, on en meurt parfois. Laure et Olivier sont partis sur la route, en stop, pour échapper à la violence de leur vie familiale, ils ont fui l'enfer. Max les a suivis mais lui, ses parents l'aiment, ce sont juste des parents ordinaires, une vie ordinaire. Jetés dans un monde ennemi, ils connaissent la misère des squats, la saleté, la promiscuité, et parfois ils rencontrent l'horreur, l'indicible.
    Ana, elle, a fui la misère des Balkans. Thomas est un peu cassé par ses missions sur les théâtres de guerre, le hasard va le projeter violemment dans cet univers adolescent où la douleur permet de fuir la souffrance. Il découvre que des jeunes disparaissent, que des prédateurs sont à l'affût, et mène en solitaire une enquête dangereuse, dans cette ville de Strasbourg si belle et si cruelle.
    David Le Breton écrit ici un roman noir passionnant et très documenté sur la douleur de grandir dans un monde hostile. 

    Première page :

    "Ils marchaient le long de la nationale, frigorifiés, se retournant et levant parfois le pouce quand une voiture s'approchait. Manifestement, personne ne souhaitait s'embarrasser de trois jeunes avec leurs sacs à dos. Ils cheminaient depuis des heures. Ils étaient partis en fin d'après-midi de Saint-Chély après avoir tenté de prendre le train, mais le chef de gare avait menacé d'appeler la police. Il les savait sans billets et tenait les squatters en horreur.
    Ils allaient non loin de là, à une trentaine de kilomètres, à Marvejols. On était en février, il faisait froid mais quand ils s'étaient mis en marche le soleil de la fin de l'après midi rendait la température encore supportable. Peu à peu avec la tombée du soir le froid ne cessa d'augmenter. Ils étaient trop loin de la ville pour revenir, trop loin aussi de leur but. Pris au piège, ils continuèrent à avancer. Ensuite la neige fit son apparition. De petits flocons tout d'abord, et puis la tempête rendit leur progression difficile. Le vent cinglait leurs visages. La neige les transforma peu à peu en choses informes sur le bord de la nationale.
    Max, dix-sept ans, était sur les routes depuis quelques heures seulement. Son père, médecin, n'était jamais là. Sa mère enseignait la physique dans une université à une centaine de kilomètres de leur maison. Pour ses parents il était une sorte de Martien. Ils lui donnaient le vivre et le couvert, l'associaient aux fêtes de famille les rares fois où il y en avait. Le reste du temps il disposait de la clé de la maison et du frigidaire pour se débrouiller. Il ne manquait de rien, comme lui avait dit une fois sa mère qui lui trouvait l'air un peu triste et le rabrouait à ce propos.
    - On t'a toujours tout donné."

    Ce que j'en pense :

    Le sujet est intéressant. C'est assez bien construit. L'auteur (universitaire et scientifique reconnu) semble bien connaître l'univers des squats. Mais cela ne suffit pas pour faire un bon polar. Le lecteur ne "rentre" pas vraiment dans cette histoire.

    Mort sur la route

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Guide de survie en milieu hostile

    "Guide de survie en milieu hostile" de Shane Kuhn
    traductionKarine Lalechère - éditions Sonatine

    Présentation de l'éditeur :

    Le stagiaire se caractérise par son insignifiance. On lui demande d’être corvéable à merci, mais pour le reste personne ne lui prête attention. Passant facilement inaperçu, le stagiaire est ainsi un parfait assassin en puissance. C’est la raison pour laquelle, depuis une dizaine d’années, John Iago enchaîne les stages en entreprise afin d’éliminer les cibles qu’on lui assigne : quelle meilleure couverture, en effet, pour un tueur à gage ? Ainsi vient-il tout juste de rejoindre l’un des plus grands cabinets d’avocats new-yorkais avec pour mission d’assassiner un des associés.
    À ses heures perdues, John a décidé d’écrire un Guide de survie à l'intention des jeunes stagiaires, illustré d’exemples tirés de sa propre expérience. Ce qui lui permet de donner quelques précieux conseils aux nouvelles recrues de Human Resources, Inc, la mystérieuse organisation qui l’emploie, spécialisée dans l’entraînement et le placement des « stagiaires ». 
    Le problème, c’est que John n’est plus au top de sa forme. À chacun des trente-quatre meurtres qu’il a commis, quelque chose est mort en lui. Et, alors que l’heure de se retirer du jeu a sonné, la mission qu’on lui a confiée va s’avérer la plus dangereuse et la plus inattendue de toutes.

    Entre American Psycho et Un employé modèleGuide de survie en milieu hostile nous fait pénétrer dans l’esprit d’un tueur particulièrement attachant qui, à son grand désespoir, devient de plus en plus humain à mesure que ses chances de survie diminuent. À la fois drôle, cruel et grinçant, ce premier roman impose d’emblée Shane Kuhn comme l’un des auteurs de thriller les plus inventifs de la scène littéraire.

    Extrait :

    "Si tu lis ces mots, c’est que tu es un nouvel employé de RH Inc. Félicitations. Et condoléances. Le moins que l’on puisse dire est que tu te lances dans une carrière que tu ne pourras jamais qualifier d’ennuyeuse. Tu visiteras des lieux intéressants. Tu rencontreras des personnages hors du commun et stimulants, venant de tous les horizons. Et tu les assassineras. Tu gagneras beaucoup d’argent, mais cela ne signifiera plus rien pour toi une fois ta première mission accomplie. Tuer, c’est facile au cinéma. Dans la vraie vie, c’est la profession la plus pénible, la plus stressante et la plus solitaire qui soit. Désormais, chaque fois que tu entendras quelqu’un se plaindre de son travail, il te faudra faire un effort surhumain pour ne pas lui rire au nez. Tout le monde n’est pas taillé pour ce job. Toi et tes condisciples ne tarderez pas à l’apprendre à vos dépens, car vous serez presque tous morts avant la fin du mois. Et il ne s’agit que de la phase de formation.

    Tu hésites ? C’est une réaction naturelle. S’il y a une chose qui doit faire hésiter, c’est bien l’idée de tuer pour gagner sa vie. Et au cas où tu te demanderais si parfois tu seras écœuré et découragé, si tu auras constamment la peur au ventre et si tu songeras même à mettre fin à tes jours, je n’ai qu’une réponse à te donner : oui. Tous tes pires cauchemars vont se réaliser, et à un point que tu n’imagines même pas. Soit tu surmonteras l’épreuve, soit tu finiras par te faire sauter le caisson. D’une manière ou d’une autre, après, tu seras tranquille."

    Ce que j'en pense :

    C'est excessif, drôle, grinçant, parfois assez subversif ; il y a des cadavres, du sang, du suspens, des rebondissements ; il y a beaucoup de références cinématographique … Polar très original, belle découverte des éditions Sonatine.

    Guide de survie en milieu hostile

    Guide de survie en milieu hostile

    Guide de survie en milieu hostile

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Ruptures

    "Ruptures" de Rémi De Vos
    Actes-Sud-Papiers

    Présentation de l'éditeur :

    Une femme quitte son mari après lui avoir préparé un excellent dîner, un homme avoue à sa femme qu'il a une aventure avec un pompier et un couple songe à se quitter après avoir envisagé de se débarrasser de leur enfant. Mais, dans ces trois ruptures, qui va finalement réussir à quitter l'autre ?

    Extrait :

    "L'HOMME. Il est pompier

    LA FEMME. Pompier?

    L'HOMME. Oui

    LA FEMME. Où ça pompier ?

    L'HOMME. À la mairie de Paris

    Elle le regarde.

    LA FEMME. Pompier?

    L'HOMME. Oui

    Un temps.

    LA FEMME. Pompier professionnel ?

    L'HOMME. Ce n'est pas important ça

    LA FEMME. C'est sa seule activité? Pompier?

    L'HOMME. Oui

    LA FEMME. Il n'est pas pompier bénévole avec un métier à côté ?

    L'HOMME. Non seulement pompier

    Un temps.

    LA FEMME. Il est pompier quoi

    L'HOMME. Pompier c'est tout

    Un temps.

    LA FEMME. OK

    L'HOMME. Voilà

    LA FEMME. Oui

    L'HOMME. C'est comme ça

    LA FEMME. Bien sûr

    L'HOMME. Pompier

    Elle le regarde.

    LA FEMME. Mais pompier"

    Ce que j'en pense :

    Trois histoires à la fois drôle et tragique (la troisième est même assez cruelle). Les dialogues, très alertes, révèlent l'incompréhension entre l'homme et la femme. C'est un concerto pour couples en crise. Un vrai plaisir de lecture.

    Ruptures

    Ruptures

    Ruptures

    Ruptures

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Joseph

    "Joseph" de Marie-Hélène Lafon
    Buchet Chastel

    Présentation de l'éditeur :

    Joseph est ouvrier agricole, dans une ferme du Cantal. Il a bientôt soixante ans. Il connaît les fermes de son pays, et leurs histoires. Il est doux, silencieux. Il a aimé Sylvie, un été, il avait trente ans. Elle n'était pas d'ici et avait beaucoup souffert, avec et par les hommes. Elle pensait se consoler avec lui, mais Joseph a payé pour tous. Sylvie est partie au milieu de l'hiver avec un autre. Joseph s'est alors mis à boire, comme on tombe dans un trou. 
    Joseph a un frère, marié, plus beau et entreprenant, qui est allé faire sa vie ailleurs et qui, à la mort du père, a emmené la mère vivre dans sa maison. Joseph reste seul et finira seul. Il est un témoin, un voyeur de la vie des autres. 

    Première page :

    "Les mains de Joseph sont posées à plat sur ses cuisses. Elles ont l'air d'avoir une vie propre et sont parcourues de menus tressaillements. Elles sont rondes et courtes, des mains presque jeunes comme d'enfance et cependant sans âge. Les ongles carrés sont coupés au ras de la chair, on voit leur épaisseur, on voit que c'est net, Joseph entretient ses mains, elles lui servent pour son travail, il fait le nécessaire. Les poignets sont solides, larges, on devine leur envers très blanc, charnu, onctueux et légèrement bombé. La peau est lisse, sans poil, et les veines saillent sous elle. Joseph tourne le dos à la télévision. Ses pieds sont immobiles et parallèles dans les pantoufles à carreaux verts et bleu marine achetées au Casino chez la Cécile;"

    Ce que j'en pense :

    L'auteure écrit sur sa terre et ses paysans. Elle sait faire le portrait de ces "taiseux" avec une écriture finement travaillée. Il ne se passe presque rien dans ce roman mais l'émotion est bien présente. Marie Hélène Lafon sait donner vie à son "pays".

     JosephJosephJoseph

     

    __________ 


    votre commentaire
  • Mirage d'amour avec fanfare

    "Mirage d'amour avec fanfare" de Herman Rivera Letelier
    traduction Bertille Hausberg - Métailié

    Présentation de l'éditeur :

    Elle s'appelle Golondrina del Rosario, elle joue du piano et enseigne la déclamation poétique, elle est toute délicatesse et sensibilité. Il s'appelle Bello Sandalio, il est roux et trompettiste de jazz dans les bordels de la région. Ils se sont rencontrés une nuit de passion, elle s'est donnée à lui... Ils vivent dans une colonie minière du désert d'Atacama où l'on attend une visite présidentielle, mais la fanfare des "damnés de la terre", menée par le barbier anarchiste, prépare un autre type de réception. L'auteur de La Reine Isabel chantait des chansons d'amour s'est donné pour tâche de chanter " son " désert " où les seules fleurs sont l'ombre des pierres " et d'en raconter l'épopée infernale à travers des personnages qui vont à l'essentiel : la vie et la mort, la douleur et la folie, la force de l'amour, des rêves et de l'utopie.

    Première page :

    "Tout comme les familles qui transportaient des animaux vivants parmi leurs frusques - ces chevreaux et ces agneaux rendaient encore plus pénible la promiscuité à bord - ils avaient trouvé le moyen d'embarquer leur grand piano à queue. Et, dans le tangage des nuits de haute mer, sous un ciel d'étoiles cruelles et rouillées, Elidia del Rosario, son épouse malade, avait eu le courage de distraire cet obscur troupeau entassé sur les planches du pont en jouant du Chopin. Et elle avait même trouvé la force, la dernière nuit du voyage, de déclamer quelques rimes de Gustavo Adolfo Bécquer, le "poète de son cœur comme elle l'appelait. Tout cela malgré la terreur d'un naufrage qui mettait à bout de nerfs son Elidia, si craintive. Pendant toute la traversée, elle n'avait cessé de penser à ce qui s'était produit quelques années plus tôt, quand un vapeur où se trouvaient cinq cents nouvelles recrues des mines de salpêtre avait sombré au large des côtes de Coquimbo. Pour comble de tristesse, tous ces gens enfermés dans les soutes du bateau n'avaient pas été enregistrés à la capitainerie et leur mort avait été catégoriquement démentie par les autorités; néanmoins, certains hommes d'équipage rescapés du naufrage le racontaient en secret dans les tavernes du port. Sa grand-mère maternelle pouvait d'ailleurs apporter sur ce fait un témoignage digne de foi car elle était elle-même allée faire ses adieux a un de ses frères embauché dans le désert et il avait disparu, englouti par la mer."

    Ce que j'en pense :

    Beaucoup de chaleur, de fièvre, de passion dans ce récit qui évoque une rude époque en particulier pour les travailleurs du salpêtre dans le nord du Chili. L'auteur y mêle adroitement la tragédie et la comédie, dans un style splendide (parfois trop riche en adjectifs).

    Mirage d'amour avec fanfare

    Mirage d'amour avec fanfare

    Mirage d'amour avec fanfare

     

     

    __________


    votre commentaire
  • Etre un homme

    "Etre un homme" 75 auteurs réunis par Colum McCann
    Belfond

    Présentation de l'éditeur :

    Lors de l'été 2013, dans le Colorado, un groupe d'écrivains et de militants s'est réuni pour s'interroger sur le rôle de la littérature et ses liens avec l'action sociale. De cette rencontre est née Narrative 4, une association caritative voulue par Colum McCann autour d'un concept fort, celui de l'" empathie radicale ". Sa philosophie ? Le partage. " Mettez-vous dans ma peau, je me mettrai dans la vôtre. " Son but ? Faire s'échanger les histoires à travers les pays, les continents ; une narration globale. Son action ? Favoriser des rencontres entre des jeunes d'horizons, de cultures, de vécus différents, pour se raconter, pour écouter. Et ainsi repousser le cynisme et la désolation, donner une place à l'espérance. De Michael Cunningham à Khaled Hosseini, en passant par Salman Rushdie, Joseph O'Connor, Edna O'Brien ou encore Ian McEwan, soixante-quinze auteurs, réunis par Colum McCann pour soutenir Narrative 4, ont accepté d'écrire un texte inédit répondant à la question : " Qu'est-ce qu'être un homme ? "

    Extrait :

    "Taylor Antrim

    Traduit de l'anglais par Bernard Cohen

    Le type l'a attaquée avec un couteau de cuisine. Elle lui a tiré en pleine figure. Parfait, ai-je pensé en remettant les coupures de presse vieilles de dix ans dans son tiroir à culottes. Parce que j'en ai soupé des gentilles filles. Parce que je me sens coupable tout le temps.

    Elle, elle dit souvent : Je ne suis pas désolée. Ce qui, laissez-moi vous le dire, me donne envie de la choper.

    Quand elle veut prendre son pied, elle m'attrape en glissant un doigt dans ma ceinture.

    Elle sort toute seule, trois soirs par semaine. Elle a aussi une petite chienne qu'elle aime plus que n'importe quel être humain au monde."

    Ce que j'en pense :

    Très beau projet qui se veut international, mais on retrouve dans ce livre une très grande majorité d'écrivains anglo-saxons (et peu de femmes), dommage !

    Il y a de très beaux textes mais l'ensemble est quand même inégal.

    Etre un homme

     

     

    __________


    votre commentaire



    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires