• Jour de gloire

    "Jour de gloire" de Pascale Fonteneau
    éditions du Masque

    Présentation de l'éditeur :

    Monique et Sylvie sont copines, copines d'usine parce que voisines sur la chaîne. Quand leur entreprise est délocalisée, elles sont avec les autres ouvriers devant les grilles pour crier leur colère. Galvanisées par les discours syndicaux, Monique et Sylvie se croient enfin actrices de leur destin. Hélas, leurs espoirs de justice sociale seront balayés par la télé-réalité et les rêves de star de la fille de Monique. Sans oublier ces morts violentes qu'il faudra bien venger. Accablé, chacun va devoir réviser son idéal de vie à la baisse. A moins que le jour de gloire...

    Première page :

    "Trois semaines avant de s'achever dans un bain de sang, l'histoire commence dans la cuisine de Monique. Elle m'y attend avec une figure comme on en voit à la télé quand les journalistes parlent de la faim dans le monde ou de la mort accidentelle d'une vedette de la chanson.

    Comme eux, Monique secoue la tête d'un air navré. Par mimétisme, je le suis aussi.

    Monique et moi sommes assises dans la cuisine de Monique où elle tient à me résumer l'histoire entendue à la radio juste avant mon arrivée.

    - Une histoire horrible, m'a-t-elle prévenue.

    Il s'agit d'une femme, une Danoise âgée de trente-deux ans, qui, après avoir fait appel aux techniques de la fécondation artificielle, a mis au monde des jumeaux de couleur noire. L'histoire est horrible parce que son mari est très blond et très blanc comme tous les Danois. En théorie, c'est pourtant son sperme qui devait être utilisé."

    Ce que j'en pense :

    Pascale Fonteneau ne se prend pas au sérieux dans ce roman. C'est léger, plein d'ironie (pour le monde ouvrier mais surtout pour le monde de la télé) et ça se lit avec plaisir.

    Jour de gloire

    Jour de gloire

     __________ 


    votre commentaire
  • 1945

    "1945" de Michel Chaillou
    éditions de la différence

    Présentation de l'éditeur :

    L'histoire que nous conte Michel Chaillou dans 1945 n'est pas seulement les souvenirs d'un enfant, l'auteur a entre 9 et 15 ans, pendant la guerre, c'est la généalogie d'une sensibilité confrontée aux agissements incompréhensibles des adultes qui l'entourent. Cela se passe en Bretagne pendant l'Occupation allemande. Sa mère, Éva, est très jeune et séparée de son père, Alex, qui a le même âge qu'elle. Remariée avec un médecin, Robert Le Floch, surnommé Bob, homme taciturne et glacial vis-à-vis de l'enfant, elle va commettre l'irréparable, en ces temps où rien n'est innocent, frayer avec l'ennemi. La progressive prise de conscience de l'adolescent de la faute de sa mère, son désarroi, puis son désespoir d'ignorer où elle se trouve quand la guerre se termine, la recherche éperdue de sa trace dans la France à l'heure des règlements de compte, sont parmi les plus belles pages de ce livre magnifique où Nantes et la Bretagne sont sublimées par l'écriture du grand écrivain qu'est Michel Chaillou.

    Première page :

    "Je couche avec un soldat allemand. Je crierais trop la nuit à cause de la nuit. Mais qu'y puis-je si cette mégère tarde à devenir ma soeur inconsolable ? Aussi pour me faire taire m'a-t-on fourré dans le lit du cuisinier. Un «on» unanime à casquettes galonnées qui ricane de mes cauchemars à travers les étages, se moque sur tous les tons de cette frayeur sans nom qui me catapulte dans l'épouvante. A-t-on idée de croire à toutes ces bêtises du sommeil ! On a déjà bien assez de ce que l'aube nous propose en ces années terribles. Comment se peut-il qu'un grand garçon comme moi se pelotonne d'effroi dès que s'enhardit le crépuscule... ? D'ici que ces Prussiens s'imaginent que les Français sont tous peureux ! Je dois montrer l'exemple, entrer en résistance, question d'honneur ! Si bien que dans la journée j'essaie d'attraper du courage, du menton. Hélas aux premières ténèbres, je défaille, remonte le drap. Il y a déjà trop de recoins d'ombre dans cette bâtisse et comme j'y ajoute les miens !
    Une nuit, le cuisinier et moi, on a été réveillés. Un autre soldat gueulait dans la cour accompagné d'une «gretchen» en uniforme qui chantait aussi."
     

    Ce que j'en pense :

    Des souvenirs par morceaux, avec beaucoup d'interrogations, d'allers-retours dans le temps, des répétitions, des traces qui semblent se dérober…comme si l'auteur reconstituait à tâtons ses blessures d'enfance. C'est écrit dans une langue très imagée, poétique ; c'est un livre à la fois sensible et lucide.


    1945 1945 1945 1945

    __________ 


    votre commentaire
  • Le doux parfum des temps à venir

    "Le doux parfum des temps à venir" de Lyonel Trouillot
    Actes Sud - Essences

    Présentation de l'éditeur :

    Pour la collection “Essences”, Lyonel Trouillot s’est prêté au jeu des réminiscences olfactives. Sans précision de lieu ni d’époque, une mère parle à sa fille. Fugitive marquée au fer d’une fleur de honte, elle revisite les parfums violents de ses haltes et de ses errances. Un voyage dans le souvenir de cités délabrées, de paysages désertiques, de musiques barbares, de corps défaits et de rêves interdits qui fait naître en elle, comme après chaque épreuve, dans la promesse de l’enfant à naître à qui elle raconte aujourd’hui son histoire, le doux parfum des temps à venir.

    Première page :

    Femme je suis.

     Et ta mère.

     Je ne tiens pas rigueur à l’aube qui s’annonce pour moi

    comme une fin de route.

    Car qui passe la main au lever du soleil laisse à

    ceux qui survivent

    un jour pour eux tout seuls.

    Au point du jour je te quitterai.

    Je fus et ne serai plus.

    Tu seras. Vous serez.

     N’embaume pas mon corps.

     Il me suffira que mes yeux morts donnent face

    à la mer.

    Garde tes philtres pour ta route.

    Et souviens-toi qu’une femme libre est maîtresse

    de son parfum.

     Ce que j'en pense :

    Ode à  la femme, à la mère, à la fille.  Il y a de la tristesse, de la nostalgie, de la sensualité et cette odeur de «fruit pur, de rosée franche » qui revient régulièrement du début à la fin du texte.

      

    __________ 


    votre commentaire
  • Les petits polars du Monde

    "Les petits polars du monde" - 2 tomes de 13 nouvelles inédites

    Présentation de l'éditeur :

    Cette collection de deux fois treize nouvelles inédites propose un portrait de groupe du polar français d’aujourd’hui. Elle réunit quelques-uns des maîtres du genre, qui ont écrit pour vous des histoires étonnantes, effrayantes ou amusantes sur le thème des vacances et du voyage. Parmi eux, plusieurs lauréats du Prix SNCF du polar, qui, depuis 2000, contribue à la promotion et à la reconnaissance du genre. Le Monde et SNCF sont heureux de vous présenter ce florilège, illustré par les plus grands dessinateurs.

    Au programme :

    Les Négatifs de la Canebière et Voiles de mort -  Didier Daeninckx, illustré par Loustal
    Ce crétin de Stendhal et Plein le dos -  Jean-Bernard Pouy, illustré par Florence Cestac et François Avril
    Tessa et La Cavale de Lina - Marc Villard, illustré par Jean Christophe Chauzy et Cabanes
    Parfums d’été - Dominique Sylvain. Illustration, Lorenzo Mattotti
    Famille nucléaire et Chérie noire -  Caryl Ferey, illustré par Charles Berberian  et Jean-Christophe Chauzy
    Momo et Ava et Marilyn -  Alexandra Schwartzbrod, illustré par Miles Hyman
    Crise de nerfs - Chantal Pelletier. Illustration, François Avril
    Le Grand Voyage et Hostiles -  Franck Thilliez, illustré par Dominique Corbasson  et Jean-Philippe Peyraud
    Triste comme un enfant - Michel Quint. Illustration, Miles Hyman
    Un été 22 - Tito Topin. Illustration, Cabanes
    Les Indiens - Marcus Malte. Illustration, Jean-Philippe Peyraud
    Le Temps égaré - Sylvie Granotier. Illustration, Loustal
    Roman de gare - Pierre Pelot. Illustration, Jean-Christophe Chauzy
    Monsieur Meurtre - Jean Vautrin, illustré par Baru
    Que ta volonté soit faite - Marin Ledun, illustré par Götting
    Dix doigts dans l’engrenage - Christian Roux, illustré par Anthony Pastor
    Le Machiniste - Anne Secret, illustré par Jean-Philippe Peyraud
    Dernier été -  Patrick Pécherot, illustré par Joe Pinelli
    Boulevard du Midi - Brigitte Aubert, illustré par Max Cabanes
    Hématomes - Romain Slocombe, illustré par Jean-Claude Denis

    Extrait : (Première page de "Le Machiniste" de Anne Secret)

    "Juin 1982. Métro Belleville. Victor glisse un ticket dans la machine. Il n'utilise pas sa carte de service : inutile de se faire remarquer. La chaleur est étouffante. Il y a du monde sur le quai. À cette heure tardive, l'intervalle entre les rames est d'une bonne vingtaine de minutes.

    Rambuteau. Il sort de terre à l'angle de la rue Beaubourg. Le côté pair de la voie n'a pas bougé. En face, c'est le nouveau quartier de l'Horloge : une catastrophe.

    Il longe l'îlot entièrement reconstruit. La rue Brantôme est juste derrière, mais il n'a jamais eu le courage d'aller voir à quoi elle ressemble maintenant.

    Sur la piazza du Centre Pompidou stagne la faune habituelle : touristes, jeunes désargentés, provinciaux...

    Pendant cinq minutes, Victor considère le jeu savant d'un jongleur. Personne ne fait attention à lui.

    Boulevard de Sébastopol, il repère Gilles, scotché à la devanture d'une librairie. Ils ne se font pas signe. Victor prend la rue Berger. Il se sent à la fois épuisé et excité. Des palissades, place du Bellay. Un ensemble monstrueux est prévu là."

    Ce que j'en pense :

    Évidemment tous les textes ne se valent pas mais l'ensemble est très agréable. On peut ainsi de temps en temps passer une heure de plaisir noir. De plus, à côté des "grosses pointures", il y a des auteurs qui sont vraiment à découvrir.

     

    __________ 


    votre commentaire
  •  

    Auschwitz et après (tomes 1, 2 et 3)

    Auschwitz et après (tomes 1, 2 et 3)

    Auschwitz et après (tomes 1, 2 et 3)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    AUSCHWITZ ET APRÈS  1. AUCUN DE NOUS NE REVIENDRA, 2. UNE CONNAISSANCE INUTILE, 3. MESURE DE NOS JOURS

    Charlotte Delbo - éditions de Minuit

    Présentation de l'éditeur :

    Charlotte Delbo était une des 230 femmes qui, dans Le Convoi du 24 janvier, partirent en 1943 de Compiègne pour Auschwitz. Aucun de nous ne reviendra est, plus qu'un récit, une suite de moments restitués. Ils se détachent sur le fond d'une réalité impossible à imaginer pour ceux qui ne l'ont pas vécue. Charlotte Delbo évoque les souffrances subies et parvient à les porter à un degré d'intensité au-delà duquel il ne reste que l'inconscience ou la mort. Elle n'a pas voulu raconter son histoire, non plus que celle de ses compagnes ; à peine parfois des prénoms. Car il n'est plus de place en ces lieux pour l'individu. « Une voix qui chuchote, déchirante. Un chuchotement à fleur de vie et d'horreur. Cette voix une fois entendue vous obsède, ne vous quitte plus. Je ne connais pas d'oeuvre comparable à celle de Charlotte Delbo, sinon Guernica, sinon le film Nuit et brouillard, même pudeur, même déchirure, même atroce tendresse, chez cette femme, chez Alain Resnais. Cette douloureuse et bouleversante incantation est de ces livres rares qui laissent soudain le lecteur en pays étranger à lui-même. » (François Bott, L'Express).

    Extrait :

    "RUE DE L’ARRIVÉE, RUE DU DÉPART

    Il y a les gens qui arrivent. Ils cherchent des yeux dans la foule de ceux qui attendent ceux qui les attendent. Ils les embrassent et ils disent qu’ils sont fatigués du voyage.

    Il y a les gens qui partent. Ils disent au revoir à ceux qui ne partent pas et ils embrassent les enfants.

    Il y a une rue pour les gens qui arrivent et une rue pour les gens qui partent.

    Il y a un café qui s’appelle « À l’arrivée » et un café qui s’appelle « Au départ ».

    Il y a des gens qui arrivent et il y a des gens qui partent.

     Mais il est une gare où ceux-là qui arrivent sont justement ceux-là qui partent

    une gare où ceux qui arrivent ne sont jamais arrivés, où ceux qui sont partis ne sont jamais revenus.

    C’est la plus grande gare du monde.

     C’est à cette gare qu’ils arrivent, qu’ils viennent de n’importe ou.

    Ils y arrivent après des jours et après des nuits

    ayant traversé des pays entiers

    ils y arrivent avec les enfants même les petits qui ne devaient pas être du voyage.

    Ils ont emporté les enfants parce qu’on ne se sépare pas des enfants pour ce voyage-là.

    Ceux qui en avaient ont emporté de l’or parce qu’ils croyaient que l’or pouvait être utile.

    Tous ont emporté ce qu’ils avaient de plus cher parce qu’il ne faut pas laisser ce qui est cher quand on part au loin.

    Tous ont emporté leur vie, c’était surtout sa vie qu’il fallait prendre avec soi.

     

    Ce que j'en pense :

     Je n'ai pas pu lire les trois tomes à la suite tellement ces livres sont puissants, bouleversants. C'est plus qu'un témoignage ou qu'un récit, c'est une œuvre écrite dans une langue à la fois simple et profonde. La prose poétique de Charlotte Delbo nous donne à entendre longtemps la voix des disparus, des revenants, des survivants  de ces années noires. A lire absolument, pour ne pas oublier ... que nous sommes actuellement dans des années grises.

       

    __________ 


    votre commentaire



    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires